Salaires des PDG : Touchez pas au grisbi03/12/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/12/une1844.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Salaires des PDG : Touchez pas au grisbi

Une mission parlementaire était censée plancher sur les salaires du gratin des PDG, ceux des quarante premiers groupes français. Leur rémunération a dépassé 2 millions d'euros en moyenne en 2002, soit une progression annuelle de 15%.

Le rôle de cette commission consistait soi-disant à faire cesser des abus et à rendre les rémunérations plus transparentes. Elle s'est finalement conclue sur quelques propositions qui ont eu au moins un résultat assuré: faire bien rire les patrons. Les quinze propositions de cette commission sont en effet tout sauf contraignantes, comme l'avait annoncé par avance son président: «Nous ne souhaitons pas légiférer, car la loi fait fuir les investisseurs», avait-il précisé.

Mais la véritable vedette de cette commission a été un député nommé Marsaud, ancien collaborateur de Jean-Marie Messier à Vivendi. Il avait parait-il quelques comptes à régler depuis qu'il a été limogé par le nouveau PDG, Fourtou. «Quand le gouvernement demande aux Français de se serrer la ceinture, on ne peut tolérer les abus de quelques patrons», s'est-il exclamé. Mais ses audaces en sont restées là.

Quelques PDG ont daigné faire le déplacement pour répondre aux questions de ces députés, qu'ils connaissent bien pour avoir fait leurs classes ensemble, avoir occupé des postes de direction côte à côte, ou encore pour les côtoyer régulièrement lors des dîners en ville, des cocktails mondains, ou lors de parties de chasse.

Bébéar, alias «le parrain du capitalisme français», officiellement en retraite du groupe Axa et toujours administrateur de divers groupes comme BNP-Paribas et Vivendi, a perçu chaque mois l'an dernier 88000 euros (soit 572000 francs) rien qu'en jetons de présence aux conseils d'administration de ces sociétés, sans compter un paquet d'actions de l'ordre de 31 millions d'euros. Il est venu, mais personne ne l'a importuné sur ses rémunérations et ses stock-options à tel point que, bon prince, il a fini par exhorter les parlementaires à lui poser quelques questions.

Son successeur à la tête d'Axa, de Castries, a lui aussi consacré quelques heures à ce cinéma, alors qu'il s'était octroyé l'année dernière une augmentation de 54%, avec un bonus de 1,4 million d'euros. Jean-Marie Messier, tout sourire pour un one-man-show retransmis à la télé, est encore venu se donner en spectacle. Et au final, le baron Seillière, patron du Medef, a mis les points sur les «i». Il a signifié aux députés, pourtant bien rémunérés, qu'il n'est pas loin de les considérer comme de pauvres gens: «Si les grands patrons étaient payés comme des parlementaires, vous n'auriez plus une seule grande entreprise en France!» En clair: «Pas touche à la fortune des nantis». Ça sonnait la fin de la récréation.

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