On apprend de belles histoires au tribunal. Deux anciens ministres, François Léotard et Renaud Donnedieu de Vabres, poursuivis par la justice pour «blanchissement et infraction à la législation sur le financement des partis», ont raconté, pour leur défense, les us et coutumes financiers des partis au pouvoir.

En 1995, François Léotard, à l'époque ministre de la Défense du gouvernement Balladur, sentant venir la fin proche de son poste, avait transféré 5 millions de francs des coffres de son ministère directement vers les coffres du pauvre parti nécessiteux dont il était président, le Parti Républicain. Il ne le nie pas, et son collègue de parti de l'époque, Donnedieu de Vabres, actuel porte-parole du parti chiraquien, l'UMP, aura servi de porteur de liasses de billets de 500F.

Ces 5 millions de francs venaient, d'après leurs dires, des «fonds spéciaux». Et de rappeler que, depuis très longtemps, Matignon allouait à chaque ministre de grosses sommes en liquide, qu'il pouvait utiliser comme il le voulait: petites enveloppes, voyages privés, frais de bouche... Ces millions échappaient ainsi à tout contrôle. Et Léotard de préciser: «C'est plus qu'un usage. Des centaines de ministres, des dizaines de Premiers ministres, quelques présidents de la République ont procédé ainsi».

Et quand le président du tribunal s'est étonné que les sommes non dépensées n'aient pas été rendues à l'État, Léotard a répliqué: «Je n'ai pas connaissance que mon successeur au ministère de la Défense (Charles Millon) ait restitué ses fonds».

Voilà la défense de Léotard quand on l'accuse de piquer dans la cagnotte de son ministère et d'être en infraction avec les lois qui réglementent le financement des partis politiques: les autres ministres font pareil. Pour une fois, on le croit.