Algérie : Le gouvernement veut briser la grève des enseignants03/12/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/12/une1844.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Algérie : Le gouvernement veut briser la grève des enseignants

Après deux mois de grève des enseignants, le gouvernement algérien semble mettre en application ses menaces à l'égard des grévistes. On a appris la radiation de centaines de grévistes (281 à Alger, 229 à Chlef, 986 à Tizi-Ouzou).

Le gouvernement a annoncé également que les grévistes radiés seraient remplacés par des diplômés au chômage. Le Premier ministre Ahmed Ouyahia en a profité pour afficher sa morgue en déclarant qu'il y avait en Algérie 180000 diplômés ainsi en attente d'emplois...

Pourtant, il y a quelques semaines, le gouvernement avait dû reculer. Il annonçait une augmentation de salaire de 5000 dinars (environ 45 euros) pour le secondaire ainsi que 3200 et 2500 dinars pour l'enseignement moyen et primaire. Ce recul permettait à la FNTE (Fédération nationale des travailleurs de l'enseignement, branche de la centrale syndicale Ugta proche du pouvoir) d'annuler les quatre jours de grève auxquels elle avait appelé

La FNTE avait fait semblant de prendre le train en marche, alors qu'elle avait été totalement débordée dans cette grève à la tête de laquelle étaient deux syndicats non reconnus officiellement, le CLA (Conseil des lycées d'Alger) et le CNAPEST (Conseil national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique). Ceux-ci, au contraire de la FNTE, ont appelé à la poursuite de la grève pour la satisfaction des revendications, à savoir une augmentation du salaire de base de 100% et la retraite au bout de 25 ans d'activité.

Le CNAPEST insistait surtout pour obtenir l'agrément, c'est-à-dire la reconnaissance légale, que lui refusait le gouvernement. Meziane Meriane, le responsable du CNAPEST, avait déclaré que, si on lui demandait de choisir entre les revendications des grévistes et cet agrément, il choisirait l'agrément. C'était se comporter comme des bureaucrates cherchant à utiliser la grève des enseignants pour s'imposer au pouvoir comme partenaires sociaux à la place de ceux de la FNTE. Mais en fait, l'attitude du pouvoir, ne leur a pas laissé le choix.

Début décembre, la grève semblait toujours suivie et majoritaire à l'appel des deux syndicats, et cela malgré le tapage médiatique gouvernemental annonçant depuis des jours la reprise. Des manifestations de sympathie apparaissaient, y compris de la part de lycéens. Des débrayages de soutien avaient lieu ici et là dans des établissements du moyen et du primaire. Le CNES (syndicat des enseignants du supérieur) appelait pour le mercredi 3 décembre à une journée de protestation.

Le CLA et le CNAPEST appellent à continuer la grève, tout en conditionnant la reprise des cours à la levée de toute poursuite judiciaire et à l'annulation de toutes les radiations ainsi qu'à l'ouverture de négociations. Le gouvernement a décidé d'utiliser la répression. Mais il n'est pas sûr qu'il arrive à intimider les enseignants en lutte et à briser leur grève.

En exigeant une augmentation de 100% de leur salaire de base, les enseignants ont posé un problème qui concerne tous les travailleurs, dans un pays où les salaires sont extrêmement bas et où l'immense majorité de la population et des travailleurs vit dans la misère.

Ces dernières semaines, plusieurs grèves ont éclaté autour de revendications de salaire. A la mi-octobre, les cheminots ont fait une semaine de grève à l'appel de l'UGTA et ont obtenu 1500 dinars d'augmentation. Du 15 au 20 novembre, les travailleurs du complexe véhicules industriels de Rouiba ont fait également une semaine de grève, cette fois sans le syndicat UGTA de l'usine. Ils ont obtenu 1200 dinars d'augmentation mensuelle.

C'est sans doute le mécontentement généralisé des travailleurs sur les salaires que le gouvernement veut étouffer en tentant de briser la grève des enseignants. Il n'est pas dit qu'il y réussisse.

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