RKW-Saint-Frères (Ville-le-Marclet - Somme) : - Patrons licencieurs07/08/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/08/une1827.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

RKW-Saint-Frères (Ville-le-Marclet - Somme) : - Patrons licencieurs

La direction de RKW a annoncé la suppression de 63 emplois (sur 180) à l'usine de Ville-le-Marclet, dans la Somme. Les salariés y voient la volonté de la direction de fermer à terme toute l'usine. Ainsi s'achèverait dramatiquement pour les ouvriers la longue histoire dans la région de l'industrie textile, qui s'est accompagnée de l'enrichissement de plusieurs générations de patrons.

L'industrialisation de la vallée de la Somme s'était en effet réalisée au travers de l'implantation des fabriques des frères Saint dès 1889. Celle de Ville-le-Marclet est d'ailleurs toujours entourée par les corons bâtis par le patron pour loger la main-d'oeuvre venue des campagnes, et surplombée par le château de monsieur Saint. À cette époque, l'empire industriel Saint-Frères comptait dans la vallée environ 6000 ouvriers.

Ils étaient 20000 en 1979 (dont 3800 dans la Somme) dans les différentes usines du groupe nouvellement fusionné Boussac-Saint-Frères. Les frères Saint vendirent alors leur empire industriel et placèrent leur fortune ailleurs.

Puis, plusieurs nouveaux patrons s'enrichirent en démantelant ces industries. Il y eut tout d'abord les frères Willot, qui laissèrent dans la mémoire des ouvriers le souvenir d'une sorte de famille Dalton, avec toujours au moins l'un de ses membres aux prises avec la justice. En 1984, ils déposèrent finalement le bilan, avant qu'un nouveau patron entre en scène. Les candidats repreneurs, parmi lesquels on comptait Bernard Tapie, se bousculèrent.

Fabius, alors Premier ministre, donna sa préférence à Bernard Arnaud, qui n'eut besoin d'apporter que 100 millions de francs alors que le seul patrimoine immobilier du groupe industriel était évalué à 800 millions. Il comprenait une quarantaine d'usines, 5000 logements, des milliers d'hectares de terrains, un château. Sans avoir besoin que les usines produisent, Bernard Arnaud était déjà gagnant. Ce fut en partie avec l'argent récupéré par la liquidation des usines textiles, qui occasionna des milliers de licenciements, que Bernard Arnaud put prendre le contrôle de Dior et de LVMH, le numéro un de l'industrie de luxe, les bagages Louis Vuitton, les champagnes Veuves Cliquot, Moët et Chandon, les parfums Givenchy, etc.

Il ne reste plus actuellement que deux usines rescapées. L'une appartient à un groupe finlandais et ne compte plus que quelques dizaines de salariés, avec des plans de licenciements chaque année. L'autre à Ville-le-Marclet, appartient à la multinationale allemande RKW qui vient donc d'annoncer le licenciement d'un tiers de ses ouvriers.

Le travail de générations d'ouvriers pendant un siècle, puis les licenciements de milliers de salariés ont enrichi fabuleusement quelques grandes familles bourgeoises dont les fortunes sont toujours là, qui doivent servir à la sauvegarde des revenus des travailleurs de Ville-le-Marclet.

Partager