- Accueil
- Lutte ouvrière n°1818
- Irak : Fausses et vraies raisons pour une sale guerre
Dans le monde
Irak : Fausses et vraies raisons pour une sale guerre
Cela fait près de trois mois que les États-Unis ont déversé un déluge de feu sur l'Irak, et les fameuses "armes de destruction massive" qui avaient servi de prétexte à déclencher la guerre n'ont toujours pas été trouvées. Et pour cause. Le 29 mai, à mots couverts, un des responsables militaires a laissé entendre que cette raison invoquée n'était qu'un mensonge.
Des armes chimiques, l'Irak en a disposé dans la guerre contre l'Iran, dans les années 1980. Le massacre de la jeunesse des deux pays fut une bonne affaire pour les trusts américains et français de l'armement. En 1988, le rapport d'un sénateur américain précisa que les armes chimiques fabriquées avec l'aide des États-Unis avaient servi également au massacre des populations kurdes, mais ce rapport est resté sans suite. Le massacre d'Halabja, une ville kurde dont environ 5000 habitants furent gazés par l'armée irakienne, avait été minimisé et mis, à l'époque, sur le compte de l'Iran. A la fin de la guerre du Golfe, quand de nouveaux massacres touchèrent les Kurdes et les Chiites, les troupes des États-Unis qui occupaient le cinquième du pays ne bronchèrent pas, laissant faire Saddam Hussein.
Une légende est née, fabriquée par les autorités US et leurs alliés, dont la France, selon laquelle, malgré les destructions de la guerre du Golfe et l'embargo, les armes détenues par le régime de Saddam Hussein pouvaient mettre en péril les grandes puissances qui, elles, sont dotées d'une panoplie d'armes de destruction massive constamment perfectionnées, grâce à des budgets militaires représentant plusieurs fois le produit intérieur brut de l'Irak.
Au début de cette année, tout ce que la CIA avait apporté comme "preuve la plus solide que l'Irak cachait un programme d'armes biochimiques", c'était la découverte de... deux semi-remorques laboratoires. Ses experts ont admis d'ailleurs n'avoir détecté aucune trace d'un produit mortel dans ces camions, pourtant passés au peigne fin. Une fois la guerre déclenchée, il n'en a plus été question. Ce qui n'empêcha pas les armées américaines et anglaises de procéder à des bombardements massifs et d'utiliser des bombes à fragmentation, extrêmement meurtrières, dont les débris continuent encore à tuer des civils aujourd'hui.
Le secrétaire d'État adjoint à la Défense américain, Paul Wolfowitz, vient de reconnaître que la prétendue menace d'armes de destruction massive n'avait été invoquée que pour des "raisons bureaucratiques". "C'était la seule raison sur laquelle tout le monde pouvait tomber d'accord", a-t-il expliqué, reconnaissant ainsi à mots couverts qu'il s'agissait d'un mensonge. "On nous a dit que Saddam avait des armes prêtes à être utilisées dans les 45 minutes. Cela fait maintenant 45 jours que la guerre est finie et nous n'avons toujours rien découvert", a ajouté un ancien ministre anglais traitant le chef du gouvernement, Tony Blair, de "menteur".
Il est vrai que les dirigeants des grandes puissances ont l'habitude des mensonges les plus éhontés pour dresser les peuples les uns contre les autres ou justifier l'envoi de troupes aux quatre coins de la planète afin d'y consolider leur influence et faciliter les rapines de leurs trusts. Ainsi, il avait été caché à l'opinion que, si elle a dû subir deux guerres mondiales, c'était parce que quelques trusts capitalistes luttaient pour se repartager le monde: les gouvernements invoquaient la "défense de la patrie" ou la "lutte des démocraties contre le fascisme". Tout comme la guerre d'Algérie n'a jamais officiellement existé: ce n'était qu'une "opération de maintien de l'ordre".
Il y a eu aussi un autre mensonge que les faits se sont chargés de démentir rapidement: en janvier dernier, le secrétaire d'État Donald Rumsfeld déclarait: "Le pétrole appartient aux Irakiens (...). Dire que nous ferons cette guerre pour le pétrole est une bêtise". Peut-être pas uniquement "pour le pétrole". Il n'empêche que, aujourd'hui, les compagnies américaines, notamment pétrolières, ont les pleins pouvoirs dans un pays ravalé au rang d'une colonie qui ne dit pas son nom, et la population irakienne endure de nouvelles souffrances.