Raffarin et les retraites : Endormir les travailleurs pour mieux les dépouiller06/02/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/02/une1801.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Raffarin et les retraites : Endormir les travailleurs pour mieux les dépouiller

Après les manifestations du 1er février contre les projets du gouvernement sur les retraites, qui ont réuni des centaines de milliers de personnes, Raffarin a présenté lundi 3 février les principes de sa " réforme " des retraites devant le Conseil économique et social et sur TF1. Il s'est voulu conciliant, voire compréhensif, face aux inquiétudes de la population travailleuse, tout en restant inflexible sur le fond, c'est-à-dire sur la remise en cause programmée de ce qui existe aujourd'hui.

Raffarin a dit et répété qu'il se voulait le défenseur de la " justice sociale ". Les manifestations du samedi ? C'est tout juste s'il n'aurait pas pu y participer, car lui aussi, a-t-il martelé, il veut défendre la retraite par répartition ; ajoutant qu'il ne fallait pas opposer les salariés du public au privé (comme si ce n'était pas ce que fait le gouvernement depuis des mois, et même depuis des années en ce qui concerne ses prédécesseurs).

Si Raffarin a essayé de rassurer, c'est avant tout parce qu'il craint que la première protestation du monde du travail qui s'est exprimée le 1er février n'en reste pas là. Il a donc essayé de désamorcer l'inquiétude en affirmant d'une part que la réforme qu'il veut mettre sur pied d'ici l'été se mettra en place progressivement d'ici 2020, avec ajustement tous les cinq ans, et que d'autre part ceux qui sont à la retraite aujourd'hui ou ceux qui s'apprêtent à y partir dans les années qui viennent " n'ont rien à craindre ".

Il faut donc croire que les autres ont bien raison de craindre ! D'autant qu'il y a tout lieu de comprendre que les attaques d'aujourd'hui en préparent d'autres tous les cinq ans. Sur le fond, le discours de Raffarin n'avait donc rien de rassurant car ses intentions sont claires, sinon précises. Il se dit pour l'équité entre le public et le privé, mais refuse d'aligner les salariés du secteur privé sur ce que le public a pu garder grâce aux grèves de 1995, les 37,5 années de cotisation pour une retraite à taux plein. " L'équité " se fera par le bas !

Il n'est pas question non plus de remettre en cause la retraite à 60 ans, ajoute-t-il, mais " ceux qui voudront s'arrêter plus tôt que les autres " verront leur pension diminuer en conséquence. Il est à peine sous-entendu donc que ceux qui voudront avoir une retraite décente devront travailler au-delà de 60 ans.

Raffarin a osé, en plus, parler de la nécessité d'augmenter la présence au travail des travailleurs de plus de 55 ans, au moment où son gouvernement laisse tranquillement les patrons les jeter à la rue par charrettes entières !

Il a le culot de parler des " efforts équitablement partagés " pour assurer l'avenir des retraites. Mais partagés par qui ? Par les actifs et les retraités, par les salariés du privé et du public ? C'est-à-dire par les travailleurs eux-mêmes qui sont censés faire tous les sacrifices. Et les patrons ? Les seuls qui sont exclus de ce partage des sacrifices programmé par le gouvernement sont les patrons et les classes riches et leurs immenses profits accumulés. Depuis 25 ans ils ont diminué la part des travailleurs dans les richesses produites et augmenté la leur. Alors s'ils rendaient ce qu'ils ont volé, ni les actifs ni les retraités n'auraient de sacrifices à faire.

Il faut refuser les " réformes " de Raffarin et faire payer les patrons.La seule réponse au discours de Raffarin qui eût convenu, aurait été l'annonce par les dirigeants des confédérations syndicales des prochaines mobilisations générales de la classe ouvrière, travailleurs du public unis aux travailleurs du privé. Mais il n'y a rien eu de cela, pas même une réplique cinglante de la part des dirigeants syndicaux.

Le secrétaire général de la CFDT a tenu au contraire à faire ses offres de services à Raffarin, le félicitant de son " discours offensif ", qui apporterait des informations " concrètes " sur " tous " les sujets. Même le très gouvernemental quotidien Le Figaro s'est étonné de ces félicitations déplacées, c'est tout dire ! Mais ni Thibault, pour la CGT, ni Blondel, pour FO, n'ont appelé les travailleurs à l'élargissement de la riposte face aux mauvais coups qui se préparent. Ils se sont contentés de dire qu'ils restaient " sur leur faim ". Pour bien signifier qu'il était urgent d'attendre, selon lui, le secrétaire général de la CGT a précisé : " C'est une fois entrés dans le processus que nous apprécierons progressivement la capacité d'écoute du Premier ministre ". Comme s'il pouvait y avoir quoi que ce soit de positif qui puisse sortir des mesures concoctées par Raffarin et Chirac.

Mais Raffarin aurait tort de croire pour autant qu'il a gagné la partie. L'épreuve de force ne fait que commencer. Les travailleurs doivent reprendre confiance en leurs forces. S'ils se rassemblent, toutes catégories confondues, au-delà des divisions artificielles qui ne sont mises en avant que pour les affaiblir, la classe ouvrière peut imposer à Chirac-Raffarin de faire machine arrière, et pas seulement sur les retraites, mais aussi sur bien d'autres problèmes, à commencer par celui des salaires et celui des licenciements.

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