Argentine : Les péronistes, de retour au pouvoir... pour faire payer la crise11/01/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/01/une-1746.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Argentine : Les péronistes, de retour au pouvoir... pour faire payer la crise

Le nouveau président argentin, le péroniste Eduardo Duhalde, a formé son gouvernement et fait adopter une loi d'urgence économique. Il a opté pour une dévaluation du peso argentin et annoncé divers moratoires vis-à-vis de la dette, des loyers et de certains licenciements.

Cette mesure fait évidemment planer sur la population la menace d'un renchérissement violent des prix, façon de présenter la note, plutôt salée, de la crise à la population argentine. Le patronat argentin des entreprises exportatrices, lui, serait favorisé.

Une nouvelle équipe surtout péroniste

Le nouveau président a constitué une équipe gouvernementale comprenant notamment sept ministres et quatre secrétaires généraux. Tous ont prêté serment le 3 janvier. La majorité d'entre eux appartiennent au parti péroniste et, comme le président, viennent de la province de Buenos Aires, leur bastion. L'un d'entre eux vient de l'appareil syndical péroniste. On y trouve aussi un milliardaire de l'industrie textile, alors que les précédents présidents étaient plutôt entourés de patrons de la finance. Duhalde avait annoncé un gouvernement d'union nationale, mais on n'y trouve qu'un homme venu des milieux radicaux (l'autre grand parti de la bourgeoisie). La formation de centre gauche (Frepaso) ne se décide pas à entrer dans le gouvernement, mais les plus mielleux saluent ce gouvernement qui unirait " le capital et le travail ". La femme du président, Hilda Gonzalez de Duhalde, surnommée " Chiche ", chapeaute l'aide sociale, conformément à la démagogie péroniste qui attribuait un rôle de dame patronnesse en chef à Evita, la femme de Juan Peron.

Le peso dévalué

L'union des péronistes et des radicaux a été plus marquée au Congrès et au Sénat, qui ont approuvé les mesures de la nouvelle équipe. La suspension du paiement de la dette argentine, 157 milliards d'euros (1 029 milliards de francs), soit plus de la moitié du produit intérieur brut, est maintenue. Le peso est dévalué. Pour les opérations monétaires en rapport avec le commerce extérieur, la valeur du dollar, qui était de un peso, passe à 1,40 peso. Pour le reste, le cours du peso est flottant. Le ministre de l'Economie prétend que le peso " flottant " restera proche de 1,40. Cela reste à voir : le dollar vaut déjà 1,80 peso quand on change dans la rue.

Les dettes contractées en dollars par les Argentins sont converties en pesos, mais comme le nouveau gouvernement cherche à ménager les banquiers, cette conversion est plafonnée à hauteur de 100 000 dollars (environ 115 000 euros ou 750 000 francs). Les retraits bancaires restent limités, ce qui complique énormément la vie quotidienne de la population. Celle-ci craint, à juste titre, que la dévaluation ne ramène l'inflation, et même l'hyperinflation. Un risque d'autant plus grand qu'il n'est pas prévu de contrôle des prix, même si on sait qu'une telle mesure est le plus souvent symbolique.

Quelques mesures sont destinées à satisfaire des demandes de la population : le montant des loyers, exprimé en pesos, est bloqué pour six mois. De même les tarifs des services publics (électricité, gaz, téléphone, eau et péages) sont également bloqués, et désormais exprimés en seuls pesos.

Dans la mesure où ces tarifs publics aboutissaient pour l'essentiel dans les coffres des entreprises françaises et espagnoles qui s'étaient partagé ces services publics lors des vagues de privatisations sous Menem (1989-1999), des entreprises françaises comme France Télécom, EDF ou la Lyonnaise des Eaux voient ainsi enrayées les pompes à dollars qu'elles avaient branchées sur la richesse argentine.

Duhalde, au moment où il choisissait ses orientations, a tenu à faire savoir qu'il n'avait jamais subi autant de pressions, notamment un coup de fil direct d'Aznar, pour l'Espagne (les banquiers espagnols, qui avaient, en outre, pénétré le secteur financier, comptent aussi leurs pertes) et un courrier plus doucereux de Védrine, pour la France, le tout pour lui rappeler ses devoirs vis-à-vis des entreprises capitalistes européennes.

Mais pour le moment, Duhalde cherche d'abord à relancer la machine tout en apaisant la population. Il a décidé, mais seulement pour trois mois, une suspension des licenciements " sans motif valable ", avec un barème d'indemnités (très faibles) dans les cas de licenciement " acceptable ". On est bien loin de l'interdiction des licenciements, mais la CGT dite " rebelle ", qui soutient la dévaluation du peso, approuve cette mesure. D'autres dirigeants syndicaux se contenteraient d'une revalorisation des allocations chômage...

La nouvelle équipe gouvernementale espère que ces premières mesures lui assureront un répit tandis qu'elle va reprendre contact avec les représentants des banques, chapeautées par le Fonds Monétaire International, pour renégocier la dette. Si celle-ci est suspendue, l'Etat argentin n'a pas abandonné l'idée de rembourser des dettes, qui ont surtout permis à une ribambelle d'entreprises et d'affairistes de s'enrichir. Et si, dans la presse patronale française, Les Echos, notamment pleurent ces jours-ci sur les pertes des capitalistes français ou espagnols en Argentine, ce sont des larmes de crocodile, car ceux-ci avaient provisionné ces pertes, depuis des mois, pour protéger leurs actionnaires.

La menace de la hausse des prix

La situation reste donc extrêmement fragile et les mesures adoptées par la nouvelle équipe n'ont pas pour principal objectif de sortir la population laborieuse du précipice dans lequel la crise argentine les a précipités, mais de relancer une machine économique qui profite principalement aux nantis. La dévaluation du peso signifie de fait que les prix vont augmenter, même si le ministre de l'Economie prétend le contraire. A quel rythme, cela reste à voir, mais la situation des classes pauvres est suffisamment difficile pour que de nouvelles hausses des prix la rendent impossible.

Même si le nouveau gouvernement relâche les restrictions bancaires, il faut aussi que les comptes des travailleurs soient alimentés, que les pensions soient payées. La plupart des entreprises de petite taille ont reporté à plus tard le règlement des salaires, ce qui précarise y compris la partie de la population qui avait réussi tant bien que mal à conserver un emploi.

Les travailleurs, les chômeurs, les retraités, les masses pauvres ne peuvent voir leur situation s'améliorer que s'ils prennent en main la défense de leurs intérêts car ce gouvernement, comme les autres avant lui, ne défend que les possédants.

Jacques FONTENOY

Hôpitaux de Paris : réduction du temps de travail bidon

Dans son édition du 7 janvier, Le Parisien annonce que les personnels de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) vont passer à " 32 h 30 " en 2002, présentant cela comme un " somptueux cadeau de Noël que la direction de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris vient d'offrir à ses 66 000 agents ".

Qu'en est-il en réalité ? D'abord, Le Parisien évoque un projet de protocole sans dire qu'il n'est même pas encore signé.

Et surtout, aujourd'hui, la réalité est que nous travaillons toujours en 39 heures, même si depuis le 1er janvier nous sommes sur le papier en 35 heures. Les quatre heures en plus sont en principe stockées sur un " compte épargne temps " provisoire, que nous serons censés pouvoir utiliser lorsque les nouveaux horaires entreront en application effective.

Et ce jour apparaît à beaucoup d'entre nous comme bien lointain : personne ne voit, étant donné le manque permanent de personnel, quand il pourra effectivement s'absenter du service pour prendre ses jours de Réduction du Temps de Travail.

Ce fameux protocole prévoit une réduction du temps de travail sur le papier mais il ne prévoit pas des embauches en nombre suffisant pour compenser la réduction du temps de travail.

Mais Le Parisien ne tient aucun compte de cela et déduit des 35 heures théoriques les cinq demi-heures de repas hebdomadaires que l'AP-HP consent dans son protocole à intégrer dans le temps de travail.

Or, bien peu de monde travaillera réellement 32 h 30 par semaine puisque l'AP-HP, comme tous les établissements hospitaliers, veut introduire un calcul annuel du temps de travail : on peut être en 35 heures sur le papier et continuer à faire des journées de 10 heures voire de 12 heures.

En attendant, aujourd'hui l'AP-HP propose de nous payer une partie des heures en plus des 35 heures théoriques.

Un effet d'annonce par une journaliste bien " briefée " par la direction de l'AP.

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