Surenchère sécuritaire09/11/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/11/une-1738.gif.445x577_q85_box-0%2C11%2C166%2C227_crop_detail.jpg

Leur société

Surenchère sécuritaire

La loi dite de la "sécurité quotidienne" qui vient d'être adoptée par l'Assemblée nationale présente un étrange amalgame entre des mesures prévues depuis des mois pour lutter contre la délinquance, et des dispositions rajoutées in extremis pour faire face, a-t-on dit, au terrorisme. En présentant dans un lot commun les unes et les autres, le gouvernement tente d'apparaître comme le champion tous azimuts de la lutte contre l'insécurité.

Côté "sécurité quotidienne", les attroupements intempestifs dans les parties communes des immeubles pourront être dorénavant lourdement sanctionnés. Les rave parties devront être encadrées. Le contrôle de la vente des armes est renforcé. Quant au combat contre le terrorisme, les pouvoirs de la police sont élargis pour perquisitionner, fouiller les véhicules, ou contrôler les communications. Dorénavant des vigiles privés pourront légalement "palper" si nécessaire quiconque à l'entrée de magasins ou de lieux publics.

C'est donc ce fourre-tout que le PS et les quelques députés chevènementistes ont voté, les représentants du PCF s'abstenant et ceux des Verts votant contre.

Le gouvernement affirme le caractère provisoire des mesures prises contre le terrorisme, qui limitent effectivement certaines des libertés dites fondamentales. Il déclare vouloir faire le point sur leur maintien, dans deux ans, fin 2003 !

Mais en attendant, en droit, elles donnent davantage de pouvoirs à la police, même si celle-ci ne les avait pas attendues pour anticiper cette loi. Les mesures adoptées sont dénoncées, à juste titre, par les organisations de défense des droits de l'Homme comme la porte ouverte à un arbitraire accru. Mais il est loin d'être dit qu'elles améliorent l'efficacité de la police contre la délinquance et contre d'éventuels actes terroristes. Car ces terroristes, quand ils agissent, ne se laissent pas arrêter par de telles mesures.

Pour l'effet d'annonce, il est facile de décider quelques mesures répressives. Autre chose est de supprimer ne serait-ce qu'en partie les causes de cette petite délinquance qui gâche effectivement la vie dans certains quartiers. Pour cela, il faudrait d'abord, en préalable, avoir la ferme détermination de supprimer le chômage, d'aider à la formation des jeunes et à l'insertion de tous, de transformer de fond en comble nombre de quartiers.

Mais en agissant de la sorte, le gouvernement et le PS se lancent dans une surenchère médiatique avec la droite. Ils visent seulement l'efficacité... électorale. Dans ce domaine, ils risquent d'être battus. De surenchère en surenchère, les partis de droite jouent au chat et à la souris avec le PS. Rivalisant avec l'extrême droite, allant eux-mêmes toujours plus dans cette direction sur un de leurs terrains de prédilection.

A défaut d'efficacité dans l'amélioration du bien-être dans les quartiers où règne le sentiment d'insécurité, essentiellement les quartiers populaires, le gouvernement risque de rendre encore plus difficile la vie d'une fraction de la population, par des mesures qui encouragent les contrôles "au faciès" comme le dénoncent les organisations antiracistes et de défense des libertés, tels le MRAP et la Ligue des Droits de l'Homme.

Régler les problèmes qui touchent véritablement la vie du plus grand nombre, n'est pas la volonté du gouvernement et du PS. En revanche, pratiquer une guéguerre avec la droite, en jouant sur les inquiétudes d'une partie de la population, est la préoccupation des politiciens prêts à abandonner leurs vagues déclarations de principes, pour quelques suffrages de plus, dans la surenchère sécuritaire.

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