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Dans les entreprises
Le concorde pour les richards, la crise pour les travailleurs
Après 17 mois d'une immobilisation consécutive à l'accident qui avait fait 113 morts, le 25 juillet 2000, Concorde a repris son vol. Ce fait a été salué par la presse comme un événement majeur. On s'est congratulé en haut lieu des "miracles" réalisés pour sécuriser le supersonique, entre autres par les ingénieurs de Michelin.
Le ministre des Transports, Jean-Claude Gayssot n'a pas été en reste. D'ailleurs n'a-t-il pas fait partie, aux côtés du PDG d'Air France Spinetta, de la petite bande de privilégiés qui ont inauguré le nouveau vol inaugural de l'appareil, le 7 novembre ? Quant à l'Humanité de ce jour-là, il a salué à la Une "ce nouvel envol", ajoutant sur un ton pour le moins dithyrambique dans son éditorial : "Concorde, est-ce (...) une exhibition d'auto-satisfaction ? Est-ce une décision politique oublieuse des principes de réalité ? Non, trois fois non."
Eh bien si, trois fois si, au moins quand on se place du point de vue des réalités auxquelles doit faire face la classe ouvrière aujourd'hui. Car les compagnies exploitantes du Concorde, Air France et British Airways, font quand même preuve en l'occurrence d'une arrogance sociale pour le moins indécente.
Ces compagnies se vantent des centaines de millions de francs qu'elles viennent de gaspiller pour faire voler douze appareils dont elles disent elles-mêmes qu'elles ne tiraient guère de profit, même avant leur immobilisation. Or, ce sont ces mêmes compagnies qui, arguant d'une baisse de leurs profits, prétendent aujourd'hui faire payer la note aux travailleurs : Air France, par un gel des salaires et un plan d'économies de cinq milliards de francs annoncé au début septembre, et British Airways, par 6 000 licenciements assortis d'une baisse des salaires et de l'indemnisation des congés payés pour le personnel restant !
Les voilà les "réalités" que l'Humanité et le ministre des Transports Gayssot choisissent d'oublier. Au nom des intérêts mythiques de l'aéronautique française, ils en viennent à cautionner les préoccupations des dirigeants et actionnaires des compagnies aériennes pour qui l'important est que la petite élite qui peut se payer l'aller-retour Paris New York à plus de 53 000 F l'unité, puisse retrouver son club supersonique !
Mais les travailleurs, en particulier ceux qui sont touchés par les mesures d'austérité et de licenciement actuelles dans le transport aérien, auraient au contraire de bonnes raisons de demander des comptes à ces compagnies sur l'usage qu'elles ont fait de leurs profits passés et présents. Et sans doute trouveraient-ils bien des gouffres de prestige du style Concorde.