Guerre contre les taliban ? non, guerre contre la population afghane !09/11/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/11/une-1738.gif.445x577_q85_box-0%2C11%2C166%2C227_crop_detail.jpg

Dans le monde

Guerre contre les taliban ? non, guerre contre la population afghane !

Les bombardements américains sur l'Afghanistan continuent depuis un mois. La plupart des dirigeants européens continuent d'afficher leur solidarité avec George W. Bush. Le gouvernement Jospin et Chirac rivalisent pour avoir l'initiative en ce domaine. Un bilan non officiel fait état de 1 500 civils afghans tués, dont des enfants, ce qui alimente le doute des opinions publiques occidentales. D'autre part, les sentiments anti-américains des populations musulmanes des Etats voisins grandissent. Bref, la "guerre longue et difficile" annoncée par Bush l'apparaît d'autant plus que personne ne voit où mènent les opérations militaires en cours.

Les Etats-Unis disent poursuivre les objectifs militaires affichés depuis le début des bombardements. Ils ont intensifié le pilonnage des positions des taliban au nord du pays. Il s'agit d'ouvrir la voie à l'Alliance du Nord. Sur ce terrain, les bombes qui s'ajoutent aux bombes contribuent à faire le vide, mais les dirigeants américains restent en panne d'une solution politique. C'est l'objet des tractations qui se déroulent dans la coulisse et qui consistent à chercher une équipe de rechange aux taliban. Ces taliban, dont les Etats-Unis se félicitaient, à cause de l'ordre qu'ils avaient su imposer face aux autres chefs de guerre afghans, y compris ceux de l'Alliance du Nord. Cette solution alternative peine à voir le jour.

Les diplomates occidentaux, qui multiplient les déplacements ces jours-ci, n'ont pas l'air d'avancer non plus. On a vu le ministre des Affaires étrangères français, Hubert Védrine, se rendre en pélerin à la rencontre du dictateur pakistanais, pour lui exposer le "point de vue" du gouvernement français.

On se demande comment, après quelques parlottes avec un dictateur, Védrine ose prétendre que la situation n'allait pas si mal. Selon lui, la population pakistanaise, dont on nous montre une partie manifester dans la rue son soutien au régime des taliban, et certains s'enroler pour aller combattre contre l'Alliance du Nord, serait quantité négligeable, sous prétexte que ces organisations islamistes pakistanaises n'avaient que 6 % de voix aux dernières élections ! Mais quel poids réel ont-elles aujourd'hui et surtout quel poids auront-elles demain si les dirigeants américains continuent de bombarder les Afghans, pendant le ramadan ? Sans parler des effets de la détérioration de la situation au Proche-Orient où les affrontements sans fin entre l'armée israélienne et la population palestinienne frappent l'opinion du monde arabe.

Car, au fur et à mesure que les bombardements américains se poursuivent, avec leurs victimes civiles dont la liste s'allonge, l'opinion arabe tend à se solidariser, à juste titre, avec les victimes. Même dans des pays arabes bien disposés vis-à-vis des Etats-Unis, comme l'Egypte, par exemple, on assiste à un renforcement du courant islamiste, depuis que la guerre est engagée.

Le ministre français dévoile une autre facette de ses options. Lui aussi s'interroge sur des bombardements, mais parce qu'ils lui semblent moins bien adaptés à la situation. Il souhaite qu'ils "puissent laisser place rapidement aux opérations qui doivent être menées au sol"...

Bush affiche son assurance mais celle-ci est démentie par les déclarations du porte-parole de la CIA qui demandait, à la télévision, de l'aide pour faire face à la psychose de l'anthrax et à d'éventuelles nouvelles attaques terroristes. Pour maintenir l'adhésion d'une opinion inquiète, les dirigeants américains ne cessent de répéter que de nouvelles menaces sont possibles. Ils ont parlé cette semaine des ponts de San Francisco, susceptibles d'être une cible des terroristes.

Bref, les Etats-Unis piétinent. Non seulement ils ne viennent pas à bout des taliban mais Ben Laden reste insaisissable. En poursuivant ainsi les bombardements, non seulement ils sont en train de déclencher un véritable désastre parmi la population afghane, mais également de renforcer, au sein du monde arabe l'opinion de ceux qui cherchent une issue, même si pour les peuples c'est une impasse tragique, du côté des courants islamistes.

Le seul résultat auquel sont en train de parvenir les Etats-Unis, avec l'appui de la Grande-Bretagne et le soutien des autres grandes puissances européennes, c'est de semer une fois de plus les graines d'autres terrorismes.

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