Renault Flins (78) - Grève au montage : Ras le bol des suppressions de postes !12/10/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/10/une-1734.gif.445x577_q85_box-0%2C11%2C166%2C227_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Renault Flins (78) - Grève au montage : Ras le bol des suppressions de postes !

Après une semaine de grève, des travailleurs du Montage, le plus gros atelier de l'usine Renault de Flins où sont montées les Clio et les Twingo, ont repris le travail mardi 9 octobre en fin de matinée.

Ce n'est pas un hasard si c'est au Montage, le département le plus dur de l'usine, que la colère a fini par éclater. Depuis mardi 2 octobre pour l'équipe 1 et jeudi 4 octobre pour l'équipe 2, entre 60 et 100 travailleurs ont fait grève chaque jour pour réclamer des postes supplémentaires. Cela représente 10 à 20 % de l'effectif du Montage. Ce sont essentiellement des jeunes, surtout parmi ceux qui font grève toute la journée.

La production perturbée

Les grévistes étaient minoritaires, mais cela a suffi à perturber la production. Bien sûr, la direction a envoyé en masse des chefs, des techniciens, des ingénieurs pour remplacer les grévistes, parfois à trois par poste. Cela faisait la joie des grévistes, qui leur reprochaient de ne pas prendre de précautions pour éviter de rayer les voitures - comme les chefs le leur répètent à longueur d'année - et qui se payaient leur tête parce qu'ils ne tenaient pas la cadence : par exemple, jeudi 4 octobre, il manquait presque 700 voitures en fin de journée et, sur les 900 produites, une quinzaine seulement étaient vendables, toutes les autres devant passer en retouche.

En fait, la situation n'est pas nouvelle. Au retour des congés, avec la suppression de l'équipe de nuit de production, il ne restait plus sur l'usine que 330 intérimaires, au lieu des 1 350 présents en juin-juillet. Les travailleurs se sont retrouvés sur des postes très durs, sur lesquels les chefs avaient bloqué les intérimaires depuis des mois. En septembre, il ne s'est pratiquement pas passé une semaine sans un débrayage sur un tronçon ou sur un autre. La direction, à chaque fois, décidait de calmer le jeu en ajoutant provisoirement un travailleur pour effectuer une opération qui posait problème. Dans son jargon, elle appelle ce travailleur "un surcoût", ce qui en dit long sur l'optique dans laquelle elle se place ! Mais cela n'empêchait pas les ouvriers de crouler en permanence sous la charge de travail.

Cette fois-ci, le mouvement a démarré à l'assemblage des pédaliers Twingo. De onze postes avant les congés, il n'en restait plus que neuf à la rentrée. La direction justifiait la suppression d'un poste par une baisse de la vitesse de chaîne et l'autre par le fait que certaines opérations de câblage étaient reprises par un fournisseur. Pourtant, cette dernière tâche ne constituait qu'une partie du travail affecté au poste supprimé. De fait les neuf postes restants étaient plus chargés.

Des grévistes déterminés

Mardi 2 octobre après-midi, le chef d'atelier n'a trouvé à dire aux grévistes que : "Reprenez le travail... et je vais voir ce que je peux faire", ce qui, évidemment, les a motivés à continuer et à faire le tour de l'atelier. Le lendemain et jusqu'à la fin de la semaine, la grève a continué, les travailleurs choisissant deux d'entre eux par tronçon pour aller discuter avec la direction. Ces représentants, des jeunes ouvriers, n'ont pas mâché leurs mots, répondant aux responsables de la direction du tac au tac.

En fin de semaine, le chef de département a baissé d'un ton : il ne proclamait plus que, rajouter des postes, c'était nuire à l'avenir de l'entreprise. Il promettait de remplacer sur la chaîne des travailleurs âgés déclarés inaptes par le service médical pour s'en servir en renfort, leur faire effectuer quelques opérations et soulager les postes. Il laissait entendre qu'il demanderait du personnel supplémentaire sous prétexte de formation. Il a même fini par mettre toutes ses propositions par écrit, mais tout en continuant à déclarer qu'il n'avait pas le pouvoir d'embaucher. Tout cela n'a donc absolument pas convaincu les grévistes qui ont reconduit leur mouvement jusqu'au 9 octobre.

En conclusion du mouvement, la direction ne s'engage pas à rajouter des postes, mais elle promet des arrangements, par exemple mettre ponctuellement sur les postes les plus difficiles les quelques dizaines d'ouvriers hors chaîne quand le besoin s'en fera sentir. Elle paye de surcroît près de 50 % des heures de grève. L'ensemble des grévistes sont contents d'avoir su se faire entendre et considèrent que la direction a reculé.

Sur l'ensemble de l'usine, la grève était bien vue, même si elle n'a pas fait pas tache d'huile. Mais maintenant, d'autres projets de la direction risquent de mettre le feu aux poudres, en particulier son intention de ne pas verser une avance sur intéressement, très attendue par l'ensemble de l'usine, et sa volonté de bloquer la cinquième semaine de congés entre Noël et Jour de l'An, alors que jusqu'à présent cette semaine était prise de façon individuelle.

En tôlerie, la direction ne perd rien pour attendre

C'était un peu dans l'air, au Ferrage Clio : la direction avait l'intention de supprimer un poste aux capots, en rendant de ce fait le poste voisin particulièrement dur, car il récupérait presque toutes les opérations.

C'est lundi 1er octobre, au milieu de l'équipe d'après-midi, que le chef prévint les ouvriers de la suppression du poste. Aussitôt, ils se rassemblèrent à une quinzaine, très mécontents. La direction n'osa pas s'exécuter. Mais le lendemain matin le poste était effectivement supprimé et 25 travailleurs débrayaient. L'équipe d'après-midi fit de même, plus nombreuse. Ce ras-le-bol s'exprima un peu plus d'une journée pour une équipe, trois jours pour l'autre.

Pendant ce temps, les chefs qui goûtaient au travail productif faisaient grise mine, leur blouse blanche prenait des couleurs et leur dos se plaignait bien souvent.

Avec la direction, les discussions ont été menées bon train par les grévistes, l'air déconfit des responsables attisant leur sens de l'humour. Cependant, la direction n'a pas cédé. Il reste à voir si les grévistes, bien décidés à ne pas lui faire de cadeau, et la sympathie qu'ils rencontrent dans l'atelier, ne vont pas la faire réfléchir.

En peinture, ça a bougé aussi

C'est mercredi matin 30 octobre, dans le secteur Finition Clio, qu'un débrayage a eu lieu contre la suppression programmée de deux postes de contrôleurs-retoucheurs : ce qui se traduisait par faire 3 voitures à 6 au lieu de 8, plus une minute pour se détendre, se faire remplacer entre collègues pour aller aux toilettes ou faire une pause-cigarette. L'ensemble des travailleurs du secteur sont sortis dans l'allée, et des chefs ont dû les remplacer. Autant dire que, situés pas loin des sorties de fours, ils transpiraient copieusement !

Quelques travailleurs du Mastic, du Ponçage, de la cabine Laques et de la Finition Twingo sont également sortis : s'il n'y a pas de suppression de postes en ce moment, il y en a eu beaucoup en peu de mois. D'ailleurs, au Mastic Clio, la suppression de deux nouveaux postes est programmée.

Nous avons tourné dans l'atelier, suivis d'ombres en blouses blanches, puis réunion en salle de pause pour définir nos revendications, simples : pas de suppression de poste en Finition. La direction a bien vite reculé, et nous n'avons pas repris tant qu'elle ne nous avait pas payé notre débrayage - c'était sa faute, après tout.

Le lendemain, la production peinait, car nos remplaçants n'avaient pas vraiment assuré. On ne s'en plaignait pas, ce petit temps de calme après le débrayage ne gâtait rien... Le message passé à la direction - et reçu - nous confirme que c'est la bonne méthode pour traiter les futures velléités de suppressions de postes.

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