Le Pdg de TotalFinaElf plaide sa cause : Le cynisme d'un grand patron05/10/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/10/une-1733.gif.445x577_q85_box-0%2C11%2C166%2C227_crop_detail.jpg

Leur société

Le Pdg de TotalFinaElf plaide sa cause : Le cynisme d'un grand patron

Le quotidien Le Monde a offert une tribune dans son édition de 2 octobre au PDG de TotalFinaElf, Thierry Desmarest, pour lui permettre de plaider sa cause, dix jours seulement après l'explosion de Toulouse et alors que les blessés se comptent encore par centaines, en plus des 29 morts. Desmarest en a semble-t-il été tellement fier qu'il a fait distribuer le texte de cette tribune au moins dans certaines usines du groupe.

À qui s'adresse ce titre de l'article : "Notre responsabilité d'industriel" ? A ses ouvriers morts pour le profit, à la population ? Ou plutôt à ses actionnaires, à ses compères les autres grands patrons, et aux gouvernants ?

Certes le PDG de TotalFinaElf déclare : "Notre compassion, notre solidarité vont aux victimes et à leurs familles". Mais très vite, il passe aux louanges de l'entreprise pour dire : "Cet événement nous rappelle cruellement que la chimie est un métier dangereux et que le risque zéro n'existe pas".

Finie la "responsabilité" de cette entreprise classée dans les dix plus riches de la planète. Et Desmarest qui prend les lecteurs pour des demeurés, donne sa version du "monde merveilleux" du capitalisme, qui ferait figure de mauvaise animation chez Disney. Les patrons avec leurs usines n'auraient comme seul but que de "contribuer au progrès et au bien-être collectif" ? Ça se saurait ! Quant aux risques, en somme, ils font partie de la vie, en particulier dans la chimie !

Mais ce que ne dit pas Desmarest c'est que les consignes connues de sécurité ont été régulièrement bafouées sur ordre d'en haut et pour faire des économies à l'usine de Toulouse et dans toutes les usines du groupe aujourd'hui encore. Les risques liés au stockage étaient parfaitement connus avant l'explosion puisque à l'usine de Rouen où le même produit, le nitrate d'ammonium, est fabriqué, les ordres étaient donnés de ne jamais rien stocker même les rebuts, et que les produits fabriqués devaient être entourés de couvertures antiexplosives.

Quand le PDG ose ajouter : "La priorité absolue que notre entreprise accorde à la sécurité est une exigence aujourd'hui encore renforcée", il ment sciemment. Dans l'usine que son groupe possède à Villiers-Saint-Paul dans l'Oise, classée Seveso 2, des produits toxiques sont rejetés régulièrement dans l'atmosphère, faute des installations adaptées qui nécessiteraient des investissements ; le service de surveillance permanente des pompiers professionnels a été démantelé, toujours pour des raisons d'économies. Enfin dans le cadre des procédés de fabrication les mesures de sécurité sont tellement insuffisantes que les services de l'État ont donné injonction (sous 3 ans !) que des travaux soient fait pour assurer une sécurité minimum pour un produit hautement explosif et mortel en cas d'inhalation.

La "priorité absolue" de l'entreprise TotalFinaElf a été mise en évidence avec les navires poubelles que la société faisait appareiller au risque de polluer des centaines de kilomètres de côtes. D'ailleurs les habitants de ces zones sinistrées pourraient venir témoigner sur les promesses tout aussi mensongères de l'auteur en ce qui concerne la "compensation des dommages" qu'il a le culot d'évoquer comme allant de soi.

Mais le but véritable de l'article transparaît à la fin, il s'agit d'un appel aux pouvoirs publics et à ses compères, les autres patrons, pour serrer les rangs : "Sur la sécurité des sites de chimie, nous somme certes les premiers opérateurs en France, mais nous ne sommes pas le seul, et nous ne pourrons donc efficacement répondre seul aux questions qui se posent aujourd'hui". Et pour ceux qui n'aurait pas compris Desmarest conclut : "Nous voulons parvenir à une plateforme de propositions avec un plan d'action précis, proposant des solutions concrètes, qui se devront de préserver les équilibres entre sécurité et impératifs économiques et sociaux". En clair ce grand patron rappelle aux dirigeants politiques qu'ils sont là pour préserver le système, ses "équilibres", et ses usines à faire des profits, fût-ce au risque de la vie des travailleurs et de la population.

Il n'y avait rien d'autre à attendre du patron de ce trust multimilliardaire, tant il est vrai que pour tout ce monde-là, pendant la catastrophe, l'exploitation continue... ailleurs !

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