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Dans les entreprises
La Poste – Chèques Bordeaux : Les postiers s’occupent de leur sécurité
Des incidents quasi quotidiens continuent d'émailler les travaux de rénovation de l'immeuble de La Poste situé en plein centre de Bordeaux. Après le gaz, l'amiante, etc. (voir LO n°1729 du 07/09/2001), ce sont maintenant deux départs de feu qui ont eu lieu mardi 25 septembre.
Le premier s'est déclenché vers 10 h dans la salle des facteurs. Sans l'intervention rapide d'un agent formé à ce type d'action, le feu aurait pu rapidement gagner les étages du centre de Chèques. La projection de particules en fusion provenant d'un découpage au chalumeau serait la cause de ce début d'incendie.
La CGT avait programmé depuis plusieurs jours un rassemblement à midi ce même mardi. Nous devions y discuter des problèmes de sécurité liés aux travaux. Ce sont plus de 300 personnes qui sont passées et les discussions allaient bon train. D'autant plus que la plupart des participants apprenaient là le départ de feu du matin alors qu'aucune alarme ni évacuation n'avait eu lieu.
En début d'après-midi, la direction locale sortait une note de service pour expliquer que "compte tenu de la brièveté de l'incident et de son faible impact, il est normal que les détecteurs de fumée n'aient pas déclenché l'alarme". Le directeur voulait minimiser sciemment l'incident mais, vers 14 h, un nouvel incident a contredit les explications de nos dirigeants.
Suite à des travaux d'oxydécoupage, des particules en fusion projetées dans de la laine de roche dégageaient un épais nuage de fumée, envahissant le 3e étage du centre des Chèques. A nouveau, aucune alarme ne s'est déclenchée et le service de sécurité n'est pas arrivé à la déclencher manuellement.
L'inquiétude et le sentiment d'insécurité étaient tels que le simple bouche à oreille suffit pour évacuer sans qu'aucun responsable n'en donne l'ordre. Le directeur n'appela à évacuer le centre que lorsqu'il s'aperçut que la majorité d'entre nous étions déjà dehors. Pour ce faire, il a utilisé un micro qui ne dessert pas tous les services, et des collègues qui n'ont rien entendu n'ont été évacués que bien plus tard par l'intervention des pompiers !
Ce sont l'absence d'alarme et les problèmes d'évacuation qui révoltaient la plupart d'entre nous. Sur les différents points de ralliement, l'idée de ne pas rentrer au travail quand on nous en donnerait I'ordre faisait son chemin. "C'est nous qui avons décidé de sortir, ce sera à nous de décider si on doit rentrer". Malgré l'heure tardive, nous nous sommes regroupés à plus de 300 devant l'entrée principale en attendant les explications du directeur. Après avoir menacé les syndicats de nous décompter une journée de grève, et après s'être fait confirmer qu'on n'était pas là qu'une poignée d'irréductibles, celui-ci est venu pour tenter de se justifier. Et comme, à la question, "Pourquoi les alarmes n'ont pas fonctionné ?" il n'avait aucune réponse, il dut s'esquiver sous les sifflets de l'assemblée. Le lendemain au petit matin, des essais d'alarme étaient rapidement faits pour nous confirmer que celle-ci remarchait bien. Très vite, une nouvelle note qui se voulait rassurante était distribuée par la direction pour nous donner quelques détails sur les incidents. Rien n'y était clair, sinon la conclusion de cette note qui avait de quoi nous révolter. Il était obligé d'avouer que "l'alarme était neutralisée depuis environ une semaine" !
Puis lors de deux réunions, la direction a tout fait pour minimiser la gravité de ces incidents ainsi que ses propres responsabilités. Elle a nié la présence de flammes à la Distribution. Elle est revenue sur ses explications écrites concernant l'absence totale d'alarmes : l'une d'elles aurait bien été débranchée volontairement mais l'autre, celle qui donne l'ordre d'évacuation, aurait été déconnectée accidentellement, et cela n'aurait été découvert qu'à la suite des incidents.
Au Comité d'Hygiène et de Sécurité (CHSCT) du jeudi 27, le chef de projet a vite voulu rejeter la plus grande partie des responsabilités sur les ouvriers du chantier qui ne respecteraient pas les règles de sécurité. Et pour faire bonne mesure, il nous a accusés aussi de ne pas être assez responsables de notre propre sécurité et de certaines négligences en la matière !
Si négligence il y a, c'est bien celle du conseil d'administration de La Poste qui a pris la décision de faire ces énormes travaux au beau milieu de plus de 1 500 postiers. A cela s'ajoute l'inconscience criminelle de la direction locale qui a laissé par exemple travailler des ouvriers en zone amiantée et qui débranche volontairement des alarmes. Alors tout cela démontre bien quel mépris celle-ci peut avoir des ouvriers du bâtiment comme de son propre personnel.
Nous sommes de plus en plus nombreux à en être persuadés et une nouvelle assemblée générale de plus de 150 personnes a décidé de prendre en charge sa propre sécurité, de ne rien laisser passer et de tout signaler. Des rassemblements devraient avoir lieu chaque semaine devant l'entrée principale afin d'y faire le point.