Grande-Bretagne : Des cartes d’identité contre le terrorisme ? Non, contre les pauvres !05/10/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/10/une-1733.gif.445x577_q85_box-0%2C11%2C166%2C227_crop_detail.jpg

Dans le monde

Grande-Bretagne : Des cartes d’identité contre le terrorisme ? Non, contre les pauvres !

En Grande-Bretagne, la carte d'identité est comme le monstre du Loch Ness. On en parle beaucoup et depuis longtemps, mais personne n'en a jamais vu. Périodiquement les gouvernements, de quelque obédience qu'ils soient, remettent la question sur le tapis lorsqu'ils parviennent à trouver un prétexte qu'ils jugent crédible. Et chaque fois, ils remballent leur projet devant le tollé que cela déclenche, dans tous les milieux d'ailleurs : aussi bien dans la classe ouvrière, qui se défie par expérience de toute extension des pouvoirs attribués à la police, que dans les couches aisées, qui y voient une ingérence de l'Etat dans leur sacro-sainte vie privée.

En fait il y a bien eu une période, celle de la Seconde Guerre mondiale, où un système de carte d'identité a été en vigueur, essentiellement d'ailleurs pour contrôler la main-d'oeuvre. Mais en 1953, le gouvernement conservateur, sous la pression de son électorat, l'a aboli. Et depuis, les tentatives répétées de réintroduire une carte d'identité, sous divers prétextes allant de la lutte contre le terrorisme en Irlande jusqu'à la lutte contre le hooliganisme dans les matchs de football, ont toujours capoté.

Cette fois, Blair a donc profité du grand cirque médiatique autour de l' offensive mondiale contre le terrorisme pour préconiser une carte d'identité pour tous. Mais une fois de plus, il lui a fallu reculer devant la levée de boucliers. Plus question d'en faire une carte dont le port serait obligatoire et qui pourrait être l'objet de contrôle par la police. Il s'agira d'une carte "volontaire". Mais elle sera obligatoire pour effectuer un certain nombre d'opérations : se faire soigner dans un hôpital ou par un médecin public, toucher des allocations sociales ou un versement de retraite, inscrire un enfant dans une école et prendre un nouvel emploi.

Il faut croire que le MI5, le service britannique chargé de la lutte antiterroriste, a enfin dressé le portrait-robot du terroriste type : nécessiteux ou retraité et en tout cas trop fauché pour aller se faire soigner ou mettre ses gosses à l'école dans le privé. Est-ce à dire que Blair et Bush mentiraient quand ils parlent des "milliards du terrorisme" ?

En fait de lutte contre le terrorisme, on voit bien où Blair veut en venir. Par exemple, interdire de faire un job à temps partiel sous un numéro de Sécurité sociale tout en touchant des allocations sociales sous un autre - "combine" devenue très répandue avec la diminution des emplois à plein temps et l'érosion rapide des allocations sociales au cours de la dernière décennie. Ou encore interdire aux travailleurs immigrés en situation irrégulière de se "perdre" dans la masse de la population.

Autant dire que, si cette carte d'identité devient réalité, les terroristes n'auront rien à craindre mais les plus pauvres, si.

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