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Leur société
Quand la vache folle réveille les sénateurs
"Sur les conditions d'utilisation des farines animales dans l'alimentation des animaux d'élevage et les conséquences qui en résultent pour la santé des consommateurs", en clair les risques de contamination du bétail par l'ESB (encéphalopathie spongiforme bovine) transmissible à l'homme chez qui elle provoque une variante de la maladie de Creutzfeldt-Jacob, les ministères français de l'Agriculture qui se sont succédé depuis 1994 dans les gouvernements de droite (Juppé et Balladur) puis de gauche (Jospin) ont "cherché constamment à empêcher ou à retarder l'édiction de mesures de précaution qui se sont avérées ensuite être des mesures de sécurité sanitaire". Qui parle ainsi sans sembler mâcher ses mots ? Une commission d'enquête du Sénat !
Elle met en évidence que, dès 1994, on savait qu'un sérieux danger de transmission de l'ESB à l'homme existait. Il a pourtant fallu attendre deux ans pour que des mesures imposant, sur le papier, le retrait de l'utilisation de carcasses animales dans la composition des farines alimentaires destinées au bétail soient envisagées.
Deux ans plus tard, en 1998, la direction de la répression des fraudes signalait encore que, sur 64 prélèvements d'aliments destinés aux bovins qu'elle avait fait effectuer seulement huit pouvaient être considérés comme conformes aux normes de sécurité et d'hygiène alimentaires animales. C'est-à-dire, celles dans la composition desquelles l'absence de farines d'origine animale a pu être constatée.
La plus élémentaire prudence aurait dû d'ailleurs mener dès la mise en évidence des risques, au début des années 90, à l'interdiction totale de ces farines pour l'alimentation du bétail. Non seulement ce ne fut pas le cas, mais ce n'est qu'au mois de novembre 2000 que cette mesure fut prise.
C'est la réaction des consommateurs, la chute brutale des ventes, qui contraignit le gouvernement à prendre cette mesure pour essayer de faire revenir la confiance et sauver les intérêts de qu'on appelle "la filière bovine", qui va de l'éleveur aux industriels de l'agro-alimentaire, en passant par les maquignons et leurs semblables.
Certes, ce rapport du Sénat, en pleine précampagne présidentielle, est un des multiples avatars de la petite guerre politicienne entre un gouvernement de gauche et un Sénat à majorité de droite. Surtout que les "sages" du Luxembourg sont restés sourds à ce scandale bien des années. Mais si cela permet de dire et rappeler encore l'attitude et les motivations des gouvernants, ce n'est jamais trop tard.