- Accueil
- Lutte ouvrière n°1715
- Embauches : Des embauches ? une campagne publicitaire, plutôt
Leur société
Embauches : Des embauches ? une campagne publicitaire, plutôt
Pour "positiver", pour contrer la mauvaise impression créée par les plans de licenciements qui sont à la Une de l'actualité, journalistes et responsables d'entreprises ont trouvé un nouveau leitmotiv : en France, on embauche par milliers. Les plans de licenciements de Danone, Marks et Spencer, Aventis, Valéo, Moulinex, Péchiney et Cie ne sont que des épisodes passagers, abusivement montés en épingle.
La réalité, selon eux, la "tendance économique de fond", serait les embauches massives.
Le quotidien Le Monde a ainsi publié dans son numéro du 17 mai une enquête menée auprès d'une quarantaine de grosses entreprises. Et les journalistes ont découvert et mettent en valeur de "spectaculaires plans de recrutement".
Ce qu'on nous présente, ce sont en effet des "plans", des "perspectives", des "objectifs", des prévisions d'embauches, pas des embauches déjà faites ou déjà décidées. La nuance est de taille. Bien malin qui pourrait dire ce qu'il en sera plus tard de ces "ambitions" proclamées.
Même en prenant pour argent comptant les chiffres publiés par Le Monde, les 37 entreprises interrogées envisageraient près de 80 000 embauches. Rapportées au total de leurs salariés, plus d'un million, cela ne représente que 8 %. La moitié de ces embauches (40 500) concernent des cadres. Les créations d'emplois nouveaux ne seraient que 32 000, un peu plus de 3 %. Mais rappelons que ce ne sont que des intentions !
Ces créations d'emplois ne font le plus souvent que compenser avec retard des années de gel des embauches, et surtout des années de plans dits sociaux successifs. Un recruteur d'IBM vitupère contre le gel des embauches : "C'est une horreur. On met un ou deux ans à s'en remettre." Un de ses collègues de L'Oréal se lamente : "Nous avons mis beaucoup de temps à récupérer du gel des embauches. C'est une génération de managers perdue."
Quant aux emplois créés, ils sont en majorité dans les services : distribution, banque en réseau, services informatiques. Cela confirme que l'industrie n'envisage guère d'embaucher et ne fait pas vraiment d'investissements productifs.
Et quels sont les salaires proposés, les conditions de travail ? Car ce n'est pas tout d'avoir du travail. Encore faut-il qu'il permette de vivre correctement. Mais là-dessus, on reste dans le vague.
Ce n'est pas comme pour les licenciements, dont les chiffres sont sans doute supérieurs à ceux des embauches envisagées. Mais pour eux, les fonds sont déjà provisionnés dans les budgets, on connaît les sites ou les services fermés, les postes supprimés. C'est que les suppressions d'emplois visent à augmenter le taux de profit, les dividendes, la valeur en Bourse des entreprises. Cela, c'est du sérieux, du palpable. Les embauches projetées, jusqu'à preuve du contraire, c'est surtout de la propagande en direction de l'opinion, c'est-à-dire du vent.