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- Lutte ouvrière n°1700
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SKF - Saint-Cyr-sur-Loire (région de Tours) : Cinq jours de grève
SKF, à Saint-Cyr-sur-Loire près de Tours, emploie 1 500 salariés dont quelque 200 intérimaires à la production de roulements à billes. En 1993 la direction de cette usine avait défrayé la chronique lorsqu'elle avait licencié plusieurs dizaines de salariés, anciens pour la plupart, en les renvoyant sur-le-champ chez eux en taxi.
Depuis, les effectifs ont rajeuni mais l'exploitation s'est considérablement intensifiée. C'est ce qui a été à l'origine du coup de colère qui a conduit les ouvriers de production à se mettre en grève pendant cinq jours début février.
Lors des négociations salariales annuelles fin janvier, la direction avait lâché 3 % d'augmentation, avec un plancher de 300 F. Les patrons se croyaient certainement quittes. Pourtant on a vite vu, à l'occasion des réunions d'information organisées par les syndicats, que le mécontentement n'était nullement désamorcé par ces 300 F.
C'est qu'au-delà de la question des salaires, un ras-le-bol s'est accumulé du fait de la détérioration continue des conditions de travail dans les ateliers. Ras le bol d'être traités comme des chiens par certains chefs, ras le bol de devoir toujours en faire plus alors qu'on n'a souvent même pas l'outillage nécessaire. Ras le bol de ne même pas pouvoir prendre quand on le souhaite nos jours de congé ou les jours de modulation, même ceux qui sont en principe à notre disposition dans l'accord des 35 heures. Ras le bol enfin de voir les jeunes collègues intérimaires que l'on forme et que l'on intègre parmi nous être jetés du jour au lendemain (voire d'une heure à l'autre) à la porte comme des malpropres !
Jeudi 1er février, la CGT appelait à 14 heures les équipes à un débrayage pour faire entendre notre colère à la direction. Peu habitué à se faire dire ses quatre vérités, le directeur piqua alors sa crise, lançant élégamment à la cantonade : " S'il y en a qui sont trop cons pour rester à SKF alors que c'est si mal, qu'ils aillent voir ailleurs ! ". Une demi-heure après, la grève était votée à la quasi-unanimité, avec l'objectif d'obtenir l'embauche des intérimaires, le départ des anciens en PRP à 55 ans, la renégociation de l'accord des 35 heures (signé il y a deux ans par FO et CFDT) et l'alignement de la prime d'équipe sur celle que reçoivent les autres établissements du groupe. La grève allait durer cinq jours, et être suivie par l'immense majorité du personnel de production.
Pour le directeur, ça ne pouvait être qu'un coup fourré de la CGT, stimulée par sa récente progression aux élections professionnelles ! Et puis, disait-il, pas question de négocier sous la pression. Comme si la pression, nous ne la subissions pas tous les jours, à l'atelier.
Lundi 5 février, il acceptait tout de même de rencontrer les syndicats, et annonçait l'embauche dans l'année de 40 intérimaires au lieu des 20 prévus. Des discussions avec les syndicats auront lieu sur d'éventuels aménagements à l'accord RTT. Une dizaine de départs supplémentaires en préretraite sont accordés. Enfin une série de réunions par secteur auront lieu en présence des syndicalistes et de l'encadrement, pour tenter d'améliorer les relations.
Sur ce dernier point, l'essentiel dépendra bien sûr de notre capacité à nous faire respecter, et on compte bien que la solidarité forgée dans la grève nous y aidera.
Le 6 février la reprise a été décidée après que la CGT a organisé un vote à bulletins secrets. Les dirigeants du syndicat avaient annoncé qu'en dessous de 70 % de partisans de la continuation, ils proposeraient l'arrêt de la grève, ce qu'ils firent, puisque la proposition de continuer n'obtint que 64 %.
Chez les grévistes, l'état d'esprit était mitigé lors de la reprise : un peu amers de reprendre alors qu'une majorité de grévistes étaient prêts à continuer, mais contents d'avoir osé tenir tête aux patrons.