Quincaillerie Decaup (Bordeaux) : Nous demandions des sous, la direction voulait nous donner des clous. nous lui avons rivé le sien !09/02/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/02/une-1700.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Quincaillerie Decaup (Bordeaux) : Nous demandions des sous, la direction voulait nous donner des clous. nous lui avons rivé le sien !

Depuis le 30 janvier, chez Decaup, un grossiste en quincaillerie et électricité dont l'entreprise est située dans la zone industrielle de Bordeaux-Nord, nous étions en grève pour les salaires. La grève vient de se terminer mardi 6 février.

Nous réclamions 250 F net d'augmentation mensuelle pour tous. Le PDG, qui qualifiait lui-même cette revendication de modeste, l'avait refusée. Parti d'une proposition initiale d'une augmentation de 0,5 % que les salariés n'avaient pas acceptée lors de la négociation salariale annuelle du début de l'année, il ne voulait pas aller au-delà de 180 F brut. Avec la proposition d'ajouter 50 F de plus au 1er juillet, si les résultats du premier semestre étaient bons.

Mais les 250 F net pour tous, nous y tenions. Sur cette entreprise de 135 personnes, la plupart des 50 travailleurs de la préparation des commandes ont un salaire qui avoisine les 7 500 F. Ce refus d'augmentation nous a d'autant plus révoltés que nous avions découvert, à la grande fureur du PDG, que l'entreprise avait versé des primes pouvant aller, en 1996, jusqu'à 60 000 F pour certains cadres.

La grève a été suivie par un tiers de l'effectif, mais elle a été très déterminée. Outre les 250 F pour chaque salarié, nous réclamions la suppression des augmentations individuelles, le paiement de nos journées de grève, la garantie écrite qu'aucun salarié ne subirait de pressions ou ne serait sanctionné aussi bien financièrement que dans l'évolution professionnelle.

Le PDG s'est adressé aux non-grévistes en prétendant qu'une augmentation de 250 F allait mettre en péril les primes d'intéressement et de participation. Nous avons fait remarquer que les augmentations de salaire sont acquises définitivement mais les primes sont aléatoires. Nous les appelions à réfléchir en travailleurs en leur posant la question : " Trouvez-vous votre salaire convenable ? Ne pensez-vous pas qu'il serait plus judicieux de participer à la défense de vos intérêts ? ".

Et nous avons fait appel à la solidarité des salariés des entreprises environnantes, distribuant un tract aux deux restaurants de la zone industrielle. Cette solidarité, les travailleurs de la CITEC, une entreprise de la zone qui était en lutte il y a un mois, nous l'ont manifestée par leurs visites fréquentes et par l'argent qu'ils ont collecté pour nous soutenir. Même des clients, des artisans venus chercher leur commande, ont mis la main à la poche.

Pour appuyer nos revendications, nous avons bloqué les quais d'expédition où sont embarqués les produits pour toute la France.

Au bout de cinq jours de grève, voyant que notre détermination ne faiblissait pas, le PDG de Decaup qui répétait que la " situation était ingérable ", qu'il ne comprenait plus et préférait " ne pas chercher pour l'instant les véritables raisons de ce blocage ", a fini par comprendre que le moral était de notre côté. A l'issue d'une négociation où il faisait la navette entre les actionnaires et les délégués du comité de grève, nous l'avons contraint à lâcher 210 F d'augmentation pour tous, mais nous n'avons pas réussi à obtenir le paiement de nos jours de grève. Quant à la garantie écrite qu'il n'y aurait ni sanction ni pression pour fait de grève, nous l'avons imposée au PDG qui nous avait écrit : " Cela signifierait que le salarié ayant participé à cette grève serait en quelque sorte protégé. Ce serait quand même le comble ". Et nous veillerons à ce qu'il respecte sa signature.

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