L’écotaxe égratignera à peine les capitalistes05/01/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/01/une-1695.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

L’écotaxe égratignera à peine les capitalistes

Pour lutter contre les pollutions industrielles et notamment celles qui seraient responsables d'un éventuel "effet de serre", une TGAP (taxe générale sur les activités polluantes) dite Ecotaxe a été créée en 1999 (elle a rapporté 3,2 milliards) et elle devait être étendue. A l'origine, l'idée était de faire payer les patrons en fonction des rejets en carbone de leurs entreprises. Seulement, cette Ecotaxe aurait ainsi épargné l'électricité d'origine nucléaire, dangereuse par ses déchets, mais qui ne rejette pas de gaz polluants. Mais les Verts, Dominique Voynet en tête, ne l'entendaient pas de cette oreille, et l'on décida donc un projet taxant tous les utilisateurs d'énergie, qu'elle soit électrique ou autre, y compris d'ailleurs l'électricité d'origine hydraulique, cette dernière faisant pourtant partie des énergies dites "renouvelables" et non polluantes, chères aux verts. Bref, le projet n'était pas des mieux ficelés.

A quoi aurait dû servir cette Ecotaxe ? Logiquement à financer des mesures contre la pollution. Eh bien non! C'était l'époque, pas terminée d'ailleurs, où le gouvernement cherchait de l'argent pour financer les aides patronales versées en contrepartie des 35 heures. On décida donc d'affecter le produit de l'Ecotaxe à cet usage, en arguant vaguement que si l'on ne travaillait que 35 heures, cela se traduirait par des rejets moindres. En réalité, les 35 heures ont favorisé la flexibilité, et les machines auraient tendance à tourner davantage qu'avant.

Mais allait-on faire payer les patrons au moyen de l'Ecotaxe... pour leur redonner de l'argent dans le cadre des 35 heures ? Il y avait, du point de vue patronal en tout cas, un certain illogisme! C'est alors que commença l'entreprise de démolition du projet.

En 2002 l'Ecotaxe, si elle avait été étendue conformément au projet, aurait dû rapporter 12,5 milliards de francs. De l'avis du ministre des Finances Laurent Fabius c'était beaucoup trop. Le montant global de cette taxe fut donc baissé à 7 milliards de francs. Pour 2001, l'Ecotaxe qui devait être plafonnée à 0,5 % de la "valeur ajoutée" des entreprises fut ramenée pour les entreprises grosses consommatrices d'énergie, celles qui à priori polluent le plus, à 0,3 %. Pour alléger encore un peu les effets de cette taxe, ces entreprises devaient voir leurs charges fiscales diminuer en fonction de leur... engagement à veiller à réduire leur consommation. Le ministère des Finances devait même tenir compte des efforts en économie d'énergie réalisés par ces entreprises depuis 1992!

Pour parvenir à ces résultats si conformes aux intérêts patronaux, de nombreux députés - dont des députés socialistes - s'en sont fait les défenseurs zélés. Ils suivaient d'ailleurs l'exemple de Fabius lui-même qui, lorsqu'il était député, avait arraché de haute lutte une forte diminution de taxes sur les lessives phosphatées au profit de Rhodia, une filiale de Rhône-Poulenc situé au Grand-Quevilly dans sa circonscription. Puis ce fut le tour des sénateurs de mettre leur grain de sel, en supprimant quasiment toutes les mesures envisagées pour élargir l'Ecotaxe. Et, enfin de compte, le Conseil constitutionnel de son côté interdisait toute extension d'une taxe sur les activités polluantes, au nom de l'égalité de tous les patrons devant l'impôt car, avec le système prévu, on arrivait à ce que certaines entreprises plus polluantes que d'autres devaient payer moins de taxes!

Tout est bien qui finit bien pour le patronat ; à l'aube du nouveau millénaire, le gouvernement fait mine de se soucier de la pollution. Députés, sénateurs et conseillers constitutionnels de tous bords veillent au grain afin qu'il n'en coûte rien aux capitalistes. Les pouvoirs publics prendront l'argent à donner aux patrons dans le cadre des 35 heures ailleurs, quelque part dans les poches des contribuables. Et Dominique Voynet, très en colère à ce qu'il paraît, ne s'en accroche pas moins toujours à son maroquin ministériel.

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