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Israël - Palestine : Le mauvais plan de Clinton
Les propositions de Clinton en vue d'un éventuel accord israélo-palestinien sont, pour l'heure en tout cas, restées lettres mortes. Sur le terrain, les affrontements continuent en Cisjordanie, à Gaza mais aussi sur la frontière entre Israël et le Liban. Pour la seule journée du 1er janvier, quatre Palestiniens sont morts : un enfant de onze ans, blessé la veille dans la ville d'Hébron, deux policiers tués par des soldats israéliens et un civil tué, lui, par des colons qui ont investi un village arabe près de Jérusalem. En Israël, l'explosion d'une voiture piégée a fait 54 blessés dans la ville de Nétanya située à trente kilomètres de Tel-Aviv. Depuis le début de la seconde Intifada, il y a eu officiellement plus de 350 morts, pour la plupart palestiniens.
Arafat s'est finalement rendu à Washington, le 2 janvier, pour rencontrer Clinton, afin d'obtenir des éclaircissements sur les propositions du président américain ; propositions qui par ailleurs n'ont pas été rendues publiques. Aux dires de ceux qui en connaissent la teneur, ces propositions sont peu différentes de celles qui avaient été discutées à Camp David, l'été dernier ; ce qui n'empêche pas certains d'ajouter intéressés, qu'elles seraient tout de même un peu plus favorables aux Palestiniens. Il faut voir comme.
Concernant tout d'abord le sort des colonies juives de Cisjordanie et de Gaza, Clinton prévoirait que 80 % des colons restent en place et qu'une partie des terres sur lesquelles ils se sont implantés soit tout bonnement annexée par Israël. Ces annexions concerneraient des territoires de Cisjordanie, puisque l'ensemble de la bande de Gaza passerait sous le contrôle total de l'Autorité palestinienne. En contrepartie, Israël devrait céder 1 à 3 % de son territoire situé à l'est de Gaza. Et au bout du compte, concernant la Cisjordanie, on en reviendrait à une des propositions faites par Barak à Camp David et qui aboutissait à couper littéralement la Cisjordanie en deux par l'annexion d'un territoire s'étendant de Jérusalem à la frontière jordanienne. Pour assurer la continuité territoriale entre les deux parties de la Cisjordanie ainsi coupée, il avait été prévu soit des ponts, soit des tunnels, restant sous contrôle israélien, et passant sur ou sous la zone annexée... Inutile de dire qu'une telle base de discussion pourrait convenir aux gouvernants israéliens.
A Camp David toujours, les discussions sur Jérusalem-Est, conquise en juin 1967 par Israël, avaient buté sur le sort que l'on réserverait à la vieille ville où se trouvent le Mur des lamentations ainsi que l'Esplanade des mosquées. Il n'était pas question pour le gouvernement israélien de céder sa souveraineté sur l'Esplanade qui surplombe le Mur des lamentations. Grande trouvaille de Clinton : les Palestiniens auraient le contrôle effectif sur l'Esplanade, tandis que les Israéliens obtiendraient celle du sous-sol où se situent les fondations du temple dont le Mur des lamentations n'est qu'une partie.
Les prétendues concessions ainsi faites aux Palestiniens (contrôle de toute la bande de Gaza et de l'Esplanade des mosquées), auraient bien sûr une contrepartie concernant le problème des réfugiés. Dans la logique de Clinton, les Palestiniens devraient ainsi renoncer de facto au droit au retour des réfugiés palestiniens qui, après la guerre de 1948 et dans les années qui ont suivi, furent chassés de leurs terres.
Lors de la rencontre de Camp David, les négociateurs palestiniens avaient amené bon nombre de documents concernant justement les biens et les avoirs perdus par les Palestiniens, en particulier la liste des 400 villages rasés par Israël de 1949 à 1953, avec les terres attenantes, le nombre des maisons des habitants des bourgs de Ramleh, Lyddah et Majdal où les Israéliens ont organisé l'expulsion des habitants en 1948 et 1950...
Exit tout cela! Sur cette importante question, Clinton s'est totalement rangé sur les positions israéliennes qui, à Camp David, spécifiaient que "le droit au retour des réfugiés palestiniens s'appliquera uniquement à l'Etat palestinien" et que "Israël facilitera, à son entière discrétion, pour des raisons humanitaires, l'entrée échelonnée de réfugiés palestiniens" dont le nombre, restreint, restait encore à définir.
De toute façon, la question des réfugiés ne peut actuellement être résolue par le régime israélien, non seulement pour des raisons nationales mais surtout pour des raisons sociales. L'arrivée de millions de pauvres serait un facteur de déstabilisation que ne pourrait tolérer l'Etat israélien. Alors, toutes ces familles palestiniennes qui depuis des décennies vivent dans des camps de toile, éparpillées dans plusieurs pays limitrophes, continueront à survivre de la sorte. Tout au plus auront-elles droit à quelques aumônes. C'est le maximum de ce que voudront bien faire ceux qui sont responsables de leur situation. Ce qui revient à dire qu'ils maintiendront aussi toutes les causes de conflit que connaît le régime.