Lire : Les vagabonds de la faim (de Tom Kromer)08/12/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/12/une-1691.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

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Lire : Les vagabonds de la faim (de Tom Kromer)

(Les Vagabonds de la faim de Tom Kromer, Christian Bourgois Editeur, 190 pages, 95 francs.)

Plus qu'un roman, ce livre est un récit et un témoignage sur la vie de l'auteur, transformé par la crise de 1929 en l'un de ces dizaines de milliers de «vagabonds de la faim», qui arpentaient les villes américaines à la recherche de quelques moyens de subsistance.

Tom Kromer était issu d'une famille ouvrière américaine. Son grand-père était mort victime d'un coup de grisou à la mine ; son père, emporté à 44 ans par un cancer, avait travaillé toute sa vie dans une verrerie. Tom lui-même, après avoir été ouvrier dans la même usine que son père pour financer ses études, puis correcteur, puis enseignant pendant deux ans, s'était retrouvé au chômage avec la crise. Il devint alors l'un de ces «stiffs», mendiants dont le livre raconte l'errance, la misère, le total dénuement, voire la déchéance, et la souffrance permanente de la faim.

Car en 1929, aux Etats-Unis, dans ce pays le plus riche du monde, des hommes et des femmes meurent littéralement de faim. Les «stiffs» sont réduits à mendier quelques cents, s'entendant le plus souvent opposer le méprisant «Va donc travailler, feignant !» alors que du travail, justement, il n'y en a pas. L'auteur raconte comment, au bout de quelques mois de cette vie-là, les «stiffs» n'ont même plus l'énergie de chercher et sont trop misérables, trop sales, pour être reçus quelque part. Les flics prennent souvent un plaisir sadique à les déloger à coups de pied du réduit qu'ils ont éventuellement déniché pour la nuit, voire à les cogner «pour leur apprendre»... Les missions évangéliques proposent des espèces de taudis avec un bol de soupe infâme et un lit plein de vermine, à condition que les «stiffs» acceptent de faire pénitence pendant des heures, à genoux, tremblants de froid, de faim et de sommeil.

L'auteur a réalisé là un ouvrage désespéré sur une période qu'il vécut personnellement et dont il sortit définitivement malade. Son livre donne une image crue et éloquente sur ce que subirent des dizaines de milliers de malheureux jetés sur le pavé des grandes villes américaines par la terrible crise de 1929.

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