Tous des capitalistes ?09/06/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/06/une-1665.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Tous des capitalistes ?

Les salariés seraient-ils en train de devenir progressivement propriétaires des entreprises ? Va-t-on voir bientôt des assemblées d'actionnaires en bleu de travail jeter par-dessus bord les patrons et leurs banquiers ? C'est ce que nous serinent journalistes, politiciens, de Fabius à Madelin (à l'unisson), qui voudraient nous faire croire que nous serions entrés dans une ère nouvelle et idyllique, qui se traduirait par la disparition du clivage entre exploiteurs et exploités.

Même les chiffres, pourtant tendancieux, contredisent ces discours. Selon une étude, les salariés ne détiendraient que 7 % du capital des entreprises. Mais ce score est relativisé par une autre étude, remise au gouvernement fin janvier, qui donne, elle, le chiffre de 2 %. Une partie du personnel des grandes entreprises récemment privatisées, à France Télécom ou ailleurs, a acheté des actions à des tarifs préférentiels. Mais même dans ces cas-là, cela ne représente pas grand-chose en capital, et absolument rien en ce qui concerne les droits d'intervention dans les décisions et la vie de l'entreprise. A la Caisse d'Epargne de Paris par exemple, 90 % du personnel possède des parts de l'entreprise, mais ne dispose que de 3,5 % du capital.

Mais il y a salariés et salariés. Car l'essentiel des actions distribuées revient aux grands patrons et aux hauts cadres. Sous forme de stock-options en particulier, les entreprises arrosent leurs dirigeants, et les sommes sont sans commune mesure avec les trois francs six sous mis de côté par les quelques salariés du bas de l'échelle qui réussissent à épargner.

C'est dans le cadre de ces discours que s'inscrit cette fameuse " épargne salariale " que Fabius se propose de développer. Ce projet a une double fonction : créer l'illusion que les travailleurs seraient les partenaires de leurs exploiteurs, partie prenante de la bonne marche (ou de la mauvaise) de l'entreprise dans laquelle ils se font exploiter. C'est une vieillerie, bien plus vieille encore que la formule " capital-travail " chère à De Gaulle et aux gaullistes. Et par la même occasion cela permettrait de fournir, grâce à cette épargne, des fonds qui serviraient au financement de ces entreprises, et éventuellement des activités des organismes chargés de collecter et de gérer ces fonds.

Bien que Fabius s'en soit défendu, ce qu'il propose ressemble aux " fonds de pensions " qui sont tant à la mode aujourd'hui, et qui visent à inciter les salariés, avant de les y contraindre, à rogner sur leurs seuls revenus réguliers, c'est-à-dire leurs salaires, afin de prendre en charge directement leurs frais de santé ou d'économiser pour leur retraite s'ils la veulent suffisante.

Ce tour de passe-passe est tout profit pour les capitalistes, qui seront les seuls gagnants de cette escroquerie fabiusienne.

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