Lire : "Le fils de Bakounine" de Sergio Atzeni09/06/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/06/une-1665.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

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Ce " fils de Bakounine ", c'est Tullio Saba, un mineur qui fut militant communiste en Sardaigne durant les années du fascisme et de l'après-guerre. Tullio est le fils d'un cordonnier de Guspini, un village sarde où tout le monde l'appelle Bakounine, depuis cette nuit où, après avoir bien bu, Antoni Saba a proclamé qu'il inviterait Bakounine et qu'ensemble, ils iraient brûler l'église.

Une suite de récits des différents personnages que Tullio a côtoyés dans sa vie compose ce roman : des gens qui l'ont aimé et estimé en tant que militant par exemple, et d'autres qui l'ont haï, comme le directeur de la mine ou le chef du personnel, ou encore un chef de la mine où il travailla pendant des années.

Toute une époque défile ainsi à travers les souvenirs évoqués : depuis le temps du grand-père de Tullio, où " dire esclave ou journalier revenait au même ", jusqu'aux années d'après-guerre au cours desquelles les mineurs sardes firent des grèves dures et qui se soldèrent par des échecs, en passant par le temps du fascisme où ce gardien de la mine, devenu chemise noire, allait chaque soir " distribuer l'huile de ricin ", armé parfois de son " manganello ", cette matraque utilisée par les fascistes dans leurs expéditions punitives. Le lecteur découvre les villages sardes avec leurs curés, prêts à voir dans chaque militant ouvrier un antéchrist, les petites gens et leurs préjugés et aussi les travailleurs, les mineurs, les militants communistes.

Tullio était de ceux-là. Il " savait beaucoup de choses qui n'étaient pas écrites dans les journaux et que la radio ne disait pas sur la guerre d'Espagne, sur le communisme russe ; il savait et il parlait, il racontait " se souvient un ancien qui travailla dans la même mine. Ce mineur ressent toujours la fierté qu'il éprouva avec d'autres camarades lorsqu'un jour qu'ils allaient renforcer une galerie profonde, ils découvrirent qu'un d'entre eux avait gravé un " Vive Staline ! ". Ils ne savaient pas que Staline était un dictateur, raconte-t-il, c'était encore avant la guerre, ils savaient seulement qu'il était le " chef d'un pays où il n'y avait pas de patrons et les mineurs gagnaient plus que les ingénieurs... où les mineurs allaient au concert et au théâtre ". C'est du moins ce que Tullio racontait.

Un peu toute la société sarde de ces années-là est peinte de cette façon originale et surtout très vivante.

Aline RETESSE

"Le fils de Bakounine", de Sergio Atzeni, Editions La Fosse aux Ours, 123 pages, 100 F.

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