La Poste - Paris 16 : Quatre jours de grève15/10/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/10/une-1631.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

La Poste - Paris 16 : Quatre jours de grève

Au bureau de poste du 16e arrondissement, où travaillent 800 personnes, non seulement la réduction du temps de travail ne devait créer aucun emploi, mais encore 40 emplois devaient être supprimés.

La direction n'avait pas ménagé ses efforts, tout au long du mois d'août, pour faire passer son projet, en nous tendant des carottes. Ainsi, à la distribution, qui représente le plus gros service, elle avait fait miroiter que les facteurs ne travailleraient plus que le matin, la distribution d'après-midi étant supprimée, et qu'ils disposeraient d'un lundi sur quatre de repos. Mais le vice du système est vite apparu : si la quantité de courrier restait inchangée, en travaillant théoriquement moins d'heures et en étant moins nombreux, les tournées quotidiennes allaient fatalement s'alourdir et s'allonger exagérément. Quant aux lundis, les facteurs se les " paieraient " eux-mêmes en n'étant que trois au lieu de quatre par quartier.

Les postiers n'ont pas été dupes et n'ont pas avalé les suppressions d'emplois, même à la sauce carotte.

Après plusieurs débrayages d'une heure et demie, la journée nationale d'action du 4 octobre organisée par la CGT a marqué le point de départ de la grève. Le lendemain, loin de s'arrêter, elle a pris de l'ampleur, le nombre de grévistes passant de 26 % à 60 %. Ce jour-là, plus de 200 travailleurs ont participé aux différentes AG qui se sont tenues dès 6 h 30 du matin.

Ce même jour, nous sommes partis en manifestation à une soixantaine à la direction postale de Paris Ouest, regroupant les bureaux des 7e, 15e et 16e arrondissements, où une délégation d'une trentaine de grévistes a été reçue. Affichant une attitude cassante, à toutes nos questions les directeurs opposèrent une seule réponse : " La nouvelle organisation est taillée pour faire passer le trafic ". Ils prétendirent que les suppressions d'emplois sur Paris n'étaient qu'un " redéploiement " d'effectifs vers la banlieue et la province. Mais ils auraient été bien en peine de citer un seul bureau où il y avait des créations d'emplois !

Les comptes rendus dans les assemblées générales du lendemain mercredi, encore plus suivies que la veille, ont confirmé les postiers dans l'idée que le direction était avant tout soucieuse d'augmenter la productivité. Le terme est synonyme, d'un côté, de conditions de travail pires pour nous, et de l'autre de chômage pour la population. Pour une loi qui était censée créer des emplois par milliers, l'Etat-patron, tout comme les entreprises privées, l'applique en supprimant des emplois.

La grève a été reconduite. Nous avons défilé en manifestation jusqu'à la mairie du 16e arrondissement, suscitant des coups de klaxon complices de chauffeurs de bus RATP et des approbations de la part de travailleurs de l'EDF et d'ouvriers de chantiers, ce qui, dans ce quartier bourgeois, faisait tout de même plaisir.

Le lendemain, le directeur intervint à l'issue des assemblées générales pour nous demander solennellement de reprendre le travail. Résultat : 100 grévistes dans la journée, et une nouvelle délégation auprès de la direction postale Paris Ouest.

Finalement, la grève a été suspendue jeudi 7 octobre après les assemblées générales, sans que la direction ait renoncé à ses projets. Seuls quelques reçus aux concours ont été affectés, et encore, de façon provisoire. Par contre, c'est le climat entre nous et la confiance qui ont changé. Ainsi, la séparation entre les services, y compris la coupure entre postiers travaillant dans les deux principaux bâtiments, distants de 500 mètres, s'est estompée au fil des assemblées générales. Celles-ci ont fini par être communes.

Nous sommes un bon nombre à être prêts à repartir avec les autres travailleurs qui comme nous subissent les mêmes mesures. Si, bien évidemment, personne n'est opposé à travailler 35 heures, personne parmi nous n'est d'accord pour des suppressions d'emplois.

Partager