L'accident nucléaire au japon : La logique meurtrière du capital08/10/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/10/une-1630.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

L'accident nucléaire au japon : La logique meurtrière du capital

Le 30 septembre, dans une usine de traitement de combustible nucléaire située à Tokaïmura, à 120 km de Tokyo, s'est produit le plus grave accident nucléaire que le Japon ait connu. Le bilan dont fait état le gouvernement japonais s'élèverait à 49 victimes. Trois employés directement irradiés étaient dans un état critique en début de semaine.

A l'origine de l'accident, il y aurait eu une erreur de manipulation. Une réaction en chaîne se serait déclenchée dans une cuve où l'on aurait mis une quantité de sels d'uranium huit fois supérieure à la quantité prévue. Du coup le niveau de radioactivité dans l'atmosphère autour des installations est monté à 4 000 fois celui des normes acceptées et les personnes exposées ont reçu en une heure 40 fois la quantité de radiations que reçoit naturellement un adulte en un an.

Erreur de manipulation et donc erreur humaine ? Peut-être. Mais comment s'en étonner quand on sait que les employés responsables de cette erreur, et qui y laisseront sans doute leur vie, étaient des embauchés tout récents à qui n'avait été donnée qu'une formation sommaire.

De toute façon là n'est pas le fond du problème. Il peut toujours y avoir erreur humaine et le rôle des mesures de sécurité est justement de les éviter quand c'est possible, et d'en limiter les conséquences quand elles se produisent. Or JOCO, la société privée propriétaire de l'usine, a reconnu avoir récemment réduit les mesures de sécurité entourant les procédures de fabrication. Ses responsables ont même admis avoir choisi de ne pas soumettre ces changements à l'approbation des autorités parce qu'ils étaient sûrs qu'elles ne donneraient pas leur feu vert. Qui plus est, sous prétexte qu'une réaction nucléaire dans les cuves d'enrichissement était improbable, JOCO avait choisi de faire l'économie d'installer le système de refroidissement d'urgence nécessaire pour limiter la réaction en cas d'accident.

D'après les spécialistes, ce type d'accident n'est pas fréquent, mais il s'est déjà produit une soixantaine de fois, notamment aux Etats-Unis et en ex-Union soviétique, dans les années 1960. Depuis, il est devenu plus rare, parce que mieux connu. Mais face à la volonté de JOCO de réduire les coûts, cette connaissance n'a servi à rien. De toute évidence, ce sont donc les conditions de travail et de sécurité qui sont en cause dans cette usine. Déjà, en 1997, 37 employés avaient été irradiés à la suite d'un incendie survenu sur le complexe.

Cet accident en rappelle bien sûr d'autres, moins graves sans doute, mais aux causes semblables : celui de Forbach-en-Moselle en novembre 1992, par exemple, où trois salariés furent gravement irradiés et brûlés après être rentrés sans protection dans un accélérateur de particules.

Au-delà des dangers particuliers du nucléaire, c'est la logique-même de la recherche du profit maximum qui est en cause. Des secteurs comme les travaux publics, les transports ou la sidérurgie connaissent chaque année nombre de victimes sans que cela apparaisse sous les feux de l'actualité. Mais toujours pour les mêmes raisons. Sous prétexte de réduire les coûts de production, il faut aller plus vite et aller aux moindres frais en rognant sur tout. Quels qu'en soient les risques pour les ouvriers, et parfois pour la population. C'est cela la logique du capitalisme que vient rappeler le drame de Tokaïmura.

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