Débat sur les 35 heures au parlement : Ce n'est ni au parlement, ni à Matignon, qu'on obtiendra satisfaction08/10/19991999Journal/medias/journalnumero/images/1999/10/une-1630.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

Débat sur les 35 heures au parlement : Ce n'est ni au parlement, ni à Matignon, qu'on obtiendra satisfaction

La discussion sur la deuxième loi sur les 35 heures a à peine commencé à l'Assemblée nationale qu'on peut malheureusement en prévoir l'issue. La droite et le patronat s'insurgent, criant à l'autoritarisme. Le patronat s'est même payé le luxe d'un rassemblement-spectacle à la Porte de Versailles, menaçant le gouvernement des pires mesures de rétorsion si le gouvernement n'assouplissait pas un projet, malléable à souhait, à leur avantage.

Martine Aubry et les socialistes s'efforcent de désamorcer les inquiétudes feintes du patronat, en redisant une fois de plus que cette loi n'est pas dirigée contre eux. Ce qu'on a aucune peine à croire.

Elle fait mine, dans le même temps, de prendre en compte les réticences, pas très vigoureuses d'ailleurs, de ses partenaires de la gauche plurielle, en déclarant que le projet n'est pas définitivement bouclé et qu'on peut même l'enrichir, tout en laissant entendre qu'il ne peut être question de remettre en cause la flexibilité, l'annualisation ; c'est-à-dire l'essentiel de ce qui fait problème pour les travailleurs.

Les Verts et surtout les dirigeants du PCF contestent, avant le vote, le projet en expliquant que la seconde loi sur les 35 heures est en régression sur la première comme dit Hue. Ce qui n'est pas peu dire quand on a vu le contenu de cette première loi, exclusivement dirigée contre les acquis des travailleurs, et ressentie comme telle par une bonne partie d'entre eux. Il n'est qu'à voir le nombre de grèves que la mise en place des accords sur les 35 heures a suscité, et suscite encore dans le pays. La deuxième loi Aubry est invotable en l'état, déclare le député du PCF, Maxime Gremetz, signalant qu'entre autres, elle n'imposait aucune contrainte au patronat en matière d'embauche. La première loi non plus, qui ne prévoit qu'une incitation financière, avec des résultats peu probants, malgré la générosité gouvernementale. Il y a fort à parier que la deuxième ne le soit pas plus.

Les déclarations de Jospin, d'abord sur France 2, puis à Strasbourg, sur l'attitude qu'il entend prendre à l'égard du patronat, comme d'ailleurs toute l'attitude du gouvernement socialiste depuis les deux ans et demi qu'il est en place, laissent prévoir ce qu'il en sera. A quoi bon donc faire semblant de s'interroger sur ce que sera le contenu de cette loi, en laissant planer l'incertitude, ce sera la loi qui devrait être votée par le Parlement, le 19 octobre prochain, afin de laisser le temps au PCF de faire la manifestation du 16 octobre pour qu'il reviennent à plus de sagesse, et de pondération, disent les commentateurs et les dirigeants socialistes. En fait en l'état on sait ce que sera cette loi, même " enrichie " par débat parlementaire.Ce sera un tremplin pour les patrons, avec subventions à la clé, pour qu'ils continuent à faire la loi, la leur, c'est-à-dire la loi du plus fort, avec d'autant plus de moyens qu'ils auront la caution d'un gouvernement dit de gauche. Même aménagée, retouchée, cette loi restera invotable pour qui se veut un représentant des intérêts du monde du travail.

Pourtant, la diminution du temps de travail est nécessaire et légitime. En premier lieu parce que les conditions de travail des salariés, loin de s'améliorer comme le progrès technologique le permettrait, ce sont au contaire considérablement dégradées ces dernières années. Et la première loi sur les 35 heures y a amplement aidé. Ensuite parce que ce serait la moindre des choses que la population laborieuse cesse d'être, une fois de plus, victime du progrès, et qu'elle en profite à son tour. Mais pour cela il ne suffira pas d'une loi, même rigoureuse, précise et contraignante à l'égard des exploiteurs. Car même si une telle loi était adoptée - et on n'en prend pas le chemin -, encore faudrait-il que la classe ouvrière en impose l'application, ce qui suppose que se crée un rapport de forces en sa faveur à l'échelle du pays.

La manifestation du 16 octobre prochain, pour ceux qui entendent y défendre cette perspective, peut être l'occasion de se faire entendre, et surtout d'être un premier pas vers le développement d'autres luttes qui contribuent au renversement de ce rapport de force, en faveur d'un rapport de force qui ne laisse plus les patrons et leurs défenseurs, faire leur loi.

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