PCF : lutte des places à gauche12/04/20232023Journal/medias/journalnumero/images/2023/04/2854.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

PCF : lutte des places à gauche

Le PCF a tenu son 39e congrès du 7 au 10 avril à Marseille. Fabien Roussel, réélu à sa tête, s’est fait remarquer en déclarant que « la Nupes est dépassée » et qu’il faut rassembler la gauche jusqu’à Bernard Cazeneuve, l’ex-Premier ministre de Hollande.

Il n’y a pas à s’étonner de la main tendue à un politicien qui a refusé l’alignement du PS derrière la Nupes initiée par Mélenchon et qui se démarque du spectacle radical joué par les députés LFI au Parlement.

D’un côté, même si ce n’est guère que par son nom, le Parti communiste français reste associé à la lutte des classes et à la contestation du capitalisme. Malgré ses déboires électoraux successifs et la perte des municipalités qu’il a dirigées pendant des décennies, il conserve un réseau militant dans certains quartiers populaires et parmi les travailleurs, un réseau que n’ont pas les autres partis de la gauche gouvernementale. Il continue d’attirer à lui des femmes et des hommes, y compris des jeunes, pour qui « la lutte des classes est toujours une réalité », pour reprendre les termes d’un sondage qu’il a commandé.

Mais, de l’autre côté, la politique des dirigeants du PCF, depuis des décennies – en fait depuis les années 1930, où il a cessé d’être un parti révolutionnaire pour devenir un gardien de l’ordre social –, a toujours consisté à apporter leur soutien à un politicien bourgeois présentable en vue d’obtenir des ministères. Blum, De Gaulle, Mitterrand, Jospin : la liste est longue et le spectre politique très large. Quand le PCF avait une influence presque hégémonique dans la classe ouvrière, sa capacité à encadrer les travailleurs était le principal argument de ses dirigeants pour monnayer des postes de ministres. Leur participation au pouvoir s’est accompagnée de leur complicité dans les coups portés aux travailleurs, comme sous Mitterrand qui a mis en œuvre le blocage des salaires et laissé supprimer des centaines de milliers d’emplois, puis sous Jospin qui a privatisé en masse. Cette politique a fait chuter les voix du PCF, partir ses militants et baisser son influence, sans que ses dirigeants changent vraiment de politique.

Quand l’ex-sénateur ­Mélenchon a rompu avec le PS, les dirigeants du PCF, sous l’égide de Pierre Laurent, l’ont aidé à créer le Front de gauche, lancé lors des élections européennes de 2009. En 2017 après la création de La France insoumise (LFI), ils ont mis le dévouement de leurs militants au service de sa campagne présidentielle. Mais, à trop suivre Mélenchon, le PCF risquait de disparaître. En 2020, pour conserver des municipalités, il avait besoin d’alliances avec le PS. En 2022, pour sauvegarder l’existence indépendante de son appareil, Fabien Roussel a choisi de se présenter à la présidentielle. Puis, pour faire réélire ses députés, il a pris part à la Nupes, l’alliance électorale proposée par LFI pour les élections législatives de juin 2022. Aujourd’hui, pour ne pas tout parier sur l’alliance avec LFI, Fabien Roussel tend la main aux dissidents du PS, hostiles à Olivier Faure et à la Nupes.

Sur le fond, tous ces politiciens sont bonnet blanc et blanc bonnet, selon une vieille formule du PCF. Sur le terrain du nationalisme ou du protectionnisme, les différences entre Roussel, Mélenchon ou Ruffin sont indiscernables. Sur le terrain de la sécurité, Roussel, qui est allé manifester derrière la police, aux côtés de Darmanin et Bardella en mai 2021, doit apprécier Cazeneuve, ancien ministre de l’Intérieur.

Depuis des années, la politique du PCF se résume ainsi à ses tentatives de sauvegarder ses positions électorales face aux pressions de ses alliés, tout en se présentant toujours comme candidat à être un parti de gouvernement. Cela signifie en tout cas être « toujours prêt » à faire passer sous la table les revendications des travailleurs, comme on l’a vu quand le PCF a eu des ministres sous Mitterrand comme sous Jospin.

Ce n’est pas au PCF, pas plus dans sa version Roussel que dans les précédentes, que les militants ouvriers et les jeunes, attirés par le langage « lutte de classe », la référence au communisme et l’envie de combattre le capitalisme, trouveront une réponse à leurs aspirations.

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