Tests PCR : un pactole pour les laboratoires14/10/20202020Journal/medias/journalnumero/images/2020/10/2724.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Tests PCR : un pactole pour les laboratoires

Chaque semaine la Sécurité sociale dépense 70 millions d’euros pour les tests PCR du Covid-19. Facturés 73,59 euros en France, les mêmes tests coûtent en moyenne 59 euros en Italie, 50 euros en Allemagne et entre 30 et 40 euros en Espagne.

Si la stratégie de test des autorités sanitaires est chaotique pour la population, elle est ultra-efficace pour quelques grands laboratoires.

Au nom de l’urgence sanitaire et parce que la réalisation massive de tests est l’une des conditions de la lutte contre la propagation du Covid-19, le gouvernement a choisi de faire rembourser intégralement ces tests par la Sécurité sociale sans avoir besoin d’une ordonnance. Un tel choix semble aller dans le sens de l’intérêt collectif. Mais dans une société où tous les moyens de production sont privés, les intérêts des entreprises qui fabriquent les machines à tester, comme ceux des laboratoires d’analyses qui réalisent les prélèvements, l’emportent sur ceux de la collectivité.

Les machines à tester, des automates qui peuvent réaliser 1 500 tests par 24 heures et donnent le résultat en 45 minutes, sont fabriquées par une poignée de grands laboratoires, le suisse Roche, le français BioMérieux ou les américains Abbot ou Becton Dickinson. Ces machines coûtent entre 50 000 et 300 000 euros pièce. En prime, ces industriels ont le monopole des réactifs indispensables à leur fonctionnement et des consommables comme les tiges utilisées pour le prélèvement. Sans ces réactifs ad hoc, leur machine est inutilisable. Cette position de monopole a permis à BioMérieux d’augmenter son chiffre d’affaires de 70 % au premier semestre, tandis que celui de Roche augmentait de 60 %.

Ces machines existaient avant le Covid-19 car elles servent à tester d’autres maladies. Mais le faible remboursement par la Sécurité sociale n’encourageait pas les laboratoires à investir. Favoriser ces investissements est un autre argument avancé par le ministre de la Santé pour justifier le remboursement à 73,59 euros d’un test qui coûte 40 à 45 euros. Là encore, les lois de la jungle capitaliste favorisent les plus gros. Il y a en France 4 000 laboratoires d’analyses médicales, dont seulement 1 500 indépendants, les autres appartenant à des groupes comme Cerba (4 500 salariés), Synlab (20 000 salariés) ou Eurofins (35 000 salariés en Europe). Les plus gros ont les moyens d’investir dans des machines amorties en quelques semaines tandis que les petits, outre l’obstacle du coût, sont placés sur des listes d’attente par des fabricants submergés par la demande mondiale. Ceux-là ne peuvent pas répondre aux demandes des patients.

Il existe d’autres systèmes de tests, dits ouverts car ils peuvent fonctionner avec des réactifs et des consommables variés, sans payer une dîme à Roche ou BioMérieux. Ces machines sont moins rapides et moins productives mais elles existent dans de multiples laboratoires comme ceux des universités dédiés à la recherche ou dans les laboratoires vétérinaires habitués à tester des milliers d’animaux. Ceux-ci ont d’ailleurs pu réaliser des tests au plus fort de la première vague. Mais toute la politique de l’État a été conçue pour favoriser les grands laboratoires privés, dont les propriétaires ont leurs entrées dans les ministères. Un État exclusivement préoccupé par la lutte contre la pandémie aurait pu commander, réquisitionner ou même faire fabriquer lui-même, les machines à tester. Il aurait organisé leur livraison et leur mise en œuvre en fonction des besoins les plus urgents sans laisser le marché arbitrer. Tout l’inverse de la politique d’un État au service de la bourgeoisie.

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