Brésil : ce que prépare l’extrême droite10/10/20182018Journal/medias/journalnumero/images/2018/10/2619.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Brésil : ce que prépare l’extrême droite

Au Brésil, le candidat d’extrême droite Bolsonaro, en recueillant 46 % des voix au premier tour des élections le 7 octobre, a dépassé tous les sondages. Il est en position d’être élu lors du second tour qui aura lieu le 28 octobre. De nombreux députés se réclamant de lui ont aussi été élus, ce qui lui permet d’espérer une majorité pour gouverner.

Cette percée de Bolsonaro témoigne de la crise que traverse le pays et de l’effondrement des partis qui ont été au pouvoir depuis la fin de la dictature militaire en 1985. Celui qui résiste le mieux reste le Parti des travailleurs (PT), dont le candidat, Haddad, accède au second tour, avec 29 % des voix. Même après avoir gouverné de 2003 à 2016 et en ayant été le plus compromis dans l’affaire de corruption Petrobras, le PT continue à bénéficier de la popularité à peu près intacte de Lula. Les autres grands partis du centre et de la droite ont tous gouverné, avec ou sans le PT, durant ces trois décennies et ont été les grands bénéficiaires de la corruption généralisée. Ils paient très cher l’impopularité qu’ils y ont gagnée et leurs candidats à la présidence obtiennent des résultats très faibles.

Bolsonaro est le produit de cette situation de discrédit d’une grande part des politiques traditionnels. Trente ans député, réélu sept fois sur les listes d’un parti confidentiel, il est resté longtemps un de ces députés incolores, soutiens de tous les gouvernements. Il a été capitaine dans l’armée, mais peu de temps et il y a longtemps ; et c’est un nostalgique de la dictature, même s’il n’avait que 9 ans quand elle a commencé. Il y a tout juste deux ans qu’il a commencé à se faire connaître du milieu politique par ses déclarations anti-PT et pro-dictature, et quelques mois seulement que ses propos misogynes et homophobes ont fait de lui une vedette.

En plus de n’avoir été jusqu’ici l’objet d’aucune enquête pour corruption, Bolsonaro doit son ascension récente au soutien des Églises évangélistes réactionnaires et corrompues, et à son langage radical contre l’insécurité. Répétant sans arrêt que « un bon bandit, c’est un bandit mort », il déclare qu’il va libéraliser la possession d’armes. Mais les armes courent déjà les rues et les champs, faisant chaque année près de 70 000 victimes. Les gangs de Rio affrontent l’armée à la mitrailleuse lourde et les grands propriétaires terriens font abattre tous ceux qui leur résistent. Bolsonaro n’a aucun remède à cette situation, mais va légitimer un peu plus la violence de la police, qui depuis toujours s’exerce en toute impunité contre les pauvres et en particulier contre les jeunes Noirs.

Bolsonaro ne risque guère non plus de réduire la corruption, car il veut libérer de toute contrainte les patrons corrupteurs, et les députés qui se rallient à lui ne sont pas d’un coup devenus plus vertueux. Une partie de ses électeurs veulent sans doute croire à un homme nouveau, hors système, qui les sauvera de la corruption, des partis traditionnels déconsidérés, de la crise économique, du chômage, de l’insécurité. Mais rien de tout cela ne sortira de sa hotte.

En revanche contre les travailleurs, le programme du candidat d’extrême droite est plus précis et prêt à être appliqué, avec la réforme des retraites et toute liberté donnée aux patrons. Il s’agit de faire payer à la classe ouvrière la crise qui atteint maintenant le pays, la baisse des investissements et des exportations, le chômage, le déficit des caisses publiques, la faillite de la santé et de l’éducation.

Ce programme était déjà celui de tous les anciens partis, mais Bolsonaro promet de le faire appliquer dans toute sa brutalité, en faisant sans doute un usage plus large du gourdin. Les travailleurs, les couches pauvres de la population brésilienne, doivent se préparer à rendre coup pour coup.

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