La spéculation se jette sur les États12/02/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/02/une2167.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

La spéculation se jette sur les États

« Déficits publics, recul de l'euro : l'inquiétude gagne les marchés financiers »... Répétée jour après jour dans les médias, cette présentation des choses n'en est pas moins fort tendancieuse. Et plutôt que l'éclairer, elle travestit la réalité : celle de spéculateurs internationaux qui se ruent sur la dette des États et qui, parce que cela leur rapporte gros, poussent à l'aggravation de la situation financière de ces États et à l'affaiblissement de l'euro.

En effet, depuis plusieurs mois, les marchés financiers, autrement dit les banques et institutions financières, se sont jetés sur une nouvelle proie : les États dont les déficits s'accroissent. Les déficits publics ont en effet explosé partout, du fait que les gouvernements ont choisi, après l'éclatement de la crise financière en 2008, de renflouer leurs banques et grandes entreprises à coups de milliards d'euros, de dollars, etc., d'argent public.

Ces dépenses fantastiques, destinées à sauver la mise de ceux-là mêmes dont la fièvre spéculative avait déjà provoqué la crise de 2008, ont vidé les caisses des États, et pas seulement en Grèce ou en Espagne. Du coup, les États se retournent contre leur propre peuple en lui présentant la note des cadeaux faits au grand capital, sous la forme de plans d'austérité, de baisse des salaires, de liquidation des services publics.

Mais, même avec des caisses vides, les gouvernements ont à approvisionner le budget de l'État. Alors, ils se tournent vers les marchés financiers pour en obtenir des crédits. Et cela tombe bien pour ces spéculateurs que la crise de 2008 a privés de certaines de leurs sources de gains les plus profitables. La dette accrue des États arrive à point nommé pour leur permettre d'encaisser de nouveaux et colossaux profits.

Avec quelle mise de départ ? Mais avec les sommes fantastiques que les États leur ont données ou celles que les banques centrales, sous prétexte de relancer l'économie, leur prêtent à un taux proche de zéro. Et comme les fonds spéculatifs prêtent ensuite cet argent aux États à des taux qui vont de 3 à 7 % et plus, leur profit est pratiquement d'autant. Bien sûr, plus les finances d'un pays sont dans le rouge, plus il aura des difficultés à obtenir des prêts, et plus le taux des crédits augmentera... comme les profits des bailleurs de fonds.

Il y a aussi les spéculateurs, ce sont souvent les mêmes, qui jouent sur les titres de la dette qu'émettent les États. Ces fonds spéculatifs payent demain des obligations publiques et bons du Trésor qu'ils ont achetés, et déjà revendus, hier. Bien sûr, plus la situation de cet État se dégradera dans l'intervalle, plus ses titres auront perdu de valeur, et plus forte sera la différence entre le prix d'achat et le prix de vente qu'empocheront les spéculateurs. En deux mois, certains ont ainsi réalisé 40 % de profit en misant sur une aggravation des finances publiques de la Grèce !

Alors, comment tous ces spéculateurs de haut vol pourraient-ils être inquiets ? Plus la situation s'aggrave, et ils s'y emploient, plus leurs profits s'accroissent. Et s'il faut pour cela pousser des États à la faillite, en jetant du même coup leurs populations dans la misère, peu leur importe : leurs profits d'abord, et après eux le déluge !

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