Les banques centrales et la crise financière : En attendant que la bulle crève13/01/20102010Journal/medias/journalnumero/images/2010/01/une2163.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Les banques centrales et la crise financière : En attendant que la bulle crève

Lundi 11 janvier les dirigeants des banques centrales des dix pays les plus riches du monde se sont réunis à Bâle, en Suisse, pour coordonner leurs politiques financières. Ils ont constaté une fois de plus que les milliers de milliards de crédits quasi gratuits que les banques centrales, c'est-à-dire en fait les États, ont accordés aux banques privées depuis septembre 2008 ont servi à ces dernières à spéculer. Parallèlement, dans un rapport publié en décembre, la Banque centrale européenne note que le crédit accordé aux entreprises non financières, entre autres à l'industrie, continue à se rétrécir. Pourquoi en effet les banquiers investiraient-ils dans la production, alors que la spéculation leur rapporte plus et plus vite ?

D'autant que, contrairement aux affirmations et aux pronostics des gouvernements, la crise de l'économie productive, celle qui fabrique vraiment quelque chose, est loin d'être terminée. D'après les chiffres publiés par l'Insee le 6 janvier, la production industrielle en France, après avoir stagné depuis 2005 autour de l'indice 100, avoir monté à l'indice 103 à la mi-2007 et descendu à 87 au 1er janvier 2009, reste, en novembre, en dessous de 90, restant donc en recul de plus de 10 % depuis le début de la crise ouverte en septembre 2008. En outre ce recul est encore plus marqué dans le secteur des biens d'équipement des entreprises, avec moins 17,8 % en un an, et moins 26 % pour le seul secteur des machines-outils. Pas d'investissement à long terme, pas d'immobilisation de capital, pas d'espoir que les consommateurs auront de quoi acheter des biens réels : les capitalistes préfèrent miser sur tout et n'importe quoi plutôt que sur le développement de l'économie productive.

Après que les États ont épongé leurs dettes et racheté leurs actifs pourris, les banques ont donc repris leurs spéculations. Malgré toutes les déclarations des gouvernements jurant que désormais la finance serait encadrée et qu'ils ne laisseraient plus la spéculation menacer la stabilité du système financier international, ce dernier se retrouve dans le même état qu'avant septembre 2009 : prêt à exploser.

Jean-Claude Trichet, président de la Banque centrale européenne, parlant au nom de l'ensemble de ses collègues, a recommandé aux banquiers d'être raisonnables, de ne pas exagérer sur les marchés spéculatifs dangereux, de prêter aux entreprises, de ne pas distribuer trop de dividendes à leurs actionnaires et de faire des économies car, a-t-il dit, le temps de l'argent facile finira un jour. Un jour peut-être, mais pas tout de suite. Une nouvelle émission des banques centrales en direction des banques privées, et aux mêmes taux, est d'ores et déjà prévue pour le 31 mars prochain.

Les dirigeants des banques centrales savent que les milliards qu'elles ont distribués, gonflés par la spéculation, risquent de faire sauter le système financier international, par l'explosion d'une « bulle spéculative », par la faillite d'un État insolvable, par la perte de confiance dans des monnaies si généreusement distribuées. Mais elles savent aussi que, si elles arrêtent de graisser le système en y introduisant sans cesse des crédits, celui-ci risque de se bloquer comme en septembre 2008. Le jeu de casino continue, car le croupier continue de distribuer gratuitement des grosses plaques aux joueurs.

L'impuissance et la servilité de ceux qui prétendent agir sur l'économie seraient seulement ridicules, si elles ne coûtaient pas si cher à toute la société.

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