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Face à la crise de l'économie capitaliste
13 novembre 2008
Au-delà de ses différentes manifestations, successives ou simultanées - crise de l'immobilier, crise des matières premières, crise bancaire, krach boursier, ralentissement de la production elle-même - il s'agit bien d'une seule et même grave crise de l'économie capitaliste, la plus grave sans doute depuis la crise commencée par le krach boursier de 1929 et prolongée par la grande dépression.
Depuis l'aggravation brutale de la crise financière, le 15 septembre 2008, marquée par la faillite de la banque Lehman Brothers, un des piliers de Wall Street, des économistes doués surtout pour prévoir le passé accusent pêle-mêle la dérégulation, la déréglementation, le libéralisme, la mondialisation, l'absence de contrôle sur le système financier, comme raisons de la crise.
Tout cela a joué son rôle et explique tel ou tel aspect des enchaînements qui ont conduit à la crise financière actuelle et à la forme qu'elle a prise, mais pas sa raison fondamentale : l'économie capitaliste ne peut pas fonctionner sans crises. « Tant que le capitalisme n'aura pas été brisé par une révolution prolétarienne, il vivra les mêmes périodes de hausse et de baisse, il connaîtra les mêmes cycles. » (L'alternance entre) « les crises et les améliorations sont propres au capitalisme dès le jour de sa naissance ; elles l'accompagneront jusqu'à sa tombe », écrivait Trotsky, commentant la crise de 1920-1921. En ajoutant que « pendant les périodes de développement rapide du capitalisme, les crises sont courtes et ont un caractère superficiel », alors que « pendant les périodes de décadence les crises durent longtemps et les relèvements sont momentanés, superficiels et basés sur la spéculation. »
L'émergence de l'impérialisme, il y a plus d'un siècle, avec ses trusts enserrant toute la planète de leurs tentacules, et la complexification de l'activité économique au fil du temps ont rendu la périodicité des cycles économiques plus aléatoire, ont multiplié les modalités de déclenchement des crises et ont aggravé leurs dégâts, mais ne les ont pas rendues moins inéluctables. Les crises constituent des phases essentielles de la reproduction capitaliste. C'est à travers les crises précisément que l'économie de marché, mue par la concurrence aveugle, rétablit les équilibres entre la production et la consommation solvable, entre les différents secteurs de l'économie, notamment celui des moyens de production et celui des biens de consommation, entre les différentes entreprises qui réalisent les phases successives du processus de production. Ce sont les crises qui expriment la baisse du taux de profit résultant de la saturation du marché. Ce sont elles qui, en détruisant une partie du capital productif, en élaguant les entreprises non rentables, créent les conditions du redémarrage d'un nouveau cycle où le taux de profit se remet à augmenter, les investissements reprennent, ainsi que les embauches.
L'annonce d'injections massives de liquidités dans le système financier par les banques centrales américaine et européennes, le 9 août 2007, ainsi que celle par la BNP Paribas de suspendre la cotation de trois de ses fonds spécialisés dans les titres liés à l'immobilier, révélaient que la crise du crédit immobilier américain se transformait en crise financière. Celle-ci n'est pas une de ces crises « courtes et superficielles ». Le krach de l'immobilier américain a été autant le facteur déclenchant de la crise financière que son révélateur. La crise financière elle-même est la dernière en date d'une succession de crises financières ou boursières qui se sont succédé depuis les années quatre-vingt au rythme d'une crise tous les trois ans (1982 : crise mexicaine ; 1987 : krach boursier ; 1990 : krach des « junk bonds » (obligations pourries) et faillite des caisses d'épargne américaines ; 1994 : krach des obligations américaines ; 1997 : crise financière de l'Asie du Sud-Est ; 1998 : crise financière en Russie et au Brésil ; 2001-2003 : éclatement de la bulle Internet, sans parler de la crise durable du système financier japonais).
Ce qui distingue la crise financière actuelle des crises financières précédentes, c'est sa gravité, son extension planétaire et le fait d'avoir ébranlé le système bancaire mondial dans son ensemble.
Cette fréquence des crises financières ou boursières, plus ou moins graves, avec plus ou moins de répercussions sur la production, est en elle-même l'indication que la crise actuelle n'est pas le simple aboutissement d'un cycle isolé. Elle est en réalité la phase aiguë d'une longue crise rampante, commencée au début des années soixante-dix, qui s'est annoncée d'abord par une crise du système monétaire, pour se poursuivre par le premier choc pétrolier en 1973, avant d'aboutir en 1974-1975 à une première crise de surproduction et à un recul de la production dans tous les pays industriels. Pour la première fois depuis la fin de la guerre mondiale, une récession qui se propageait à l'échelle de la planète montrait que les capacités de production se heurtaient aux limites du marché solvable. Le recul de 2,2 % du produit national brut des seuls États-Unis représentait l'équivalent du PNB total d'un pays comme la Turquie et deux fois celui du Portugal.
Plus significatif encore que le recul du PNB, qui mélange productions créatrices de valeur à des services qui ne le sont pas, était le recul de la production manufacturière. Il frappa tous les pays industriels. Sur l'année 1975, il fut de 7 % aux États-Unis, 8 % en France, 15 % au Japon. Ce fut la première explosion du chômage.
Depuis la récession de 1974-1975, l'économie capitaliste a connu plusieurs périodes d'expansion entrecoupées de récessions. Mais elle n'a plus jamais retrouvé le niveau de croissance de la période antérieure. L'économie capitaliste mondiale n'est jamais sortie de sa longue crise rampante.
La classe capitaliste a retrouvé, vers le début des années quatre-vingt-dix le niveau de profit d'avant la crise. Mais elle n'y est pas parvenue grâce à un nouveau dynamisme, de nouveaux élargissements du marché solvable, entraînant de nouveaux investissements productifs. Ce fut en menant la guerre à la classe ouvrière, en aggravant l'exploitation, en bloquant les salaires, en intensifiant le rythme du travail, en s'appuyant sur la crainte du chômage pour réduire de manière drastique la part des salariés dans le revenu national de chaque pays. En France, pour l'ensemble des entreprises, la part des salaires bruts, y compris cotisations sociales des employeurs, s'est fortement réduite, passant de 73,2 % en 1982 à 63,4 % en 1998.
Mais - et c'est la marque distinctive de cette longue période de décadence du capitalisme -, même une fois que le taux de profit a été rétabli, les entreprises capitalistes n'ont été que très peu attirées vers les investissements productifs, et de plus en plus vers les placements financiers. Cette évolution, et ses multiples conséquences, que l'on résume sous l'expression « financiarisation croissante de l'économie », dessine la physionomie du fonctionnement actuel de l'économie capitaliste. Elle a mis en place tous les ingrédients de la crise financière actuelle.
Il n'y a pas besoin de chercher du côté de la psychologie collective de la classe exploiteuse cette propension à préférer les placements financiers aux investissements productifs. Sa méfiance à l'égard de l'avenir de son économie repose sur des bases matérielles. En réduisant la part des salariés, les entreprises ont certes rétabli leurs profits. Mais elles ont réduit par là même la consommation populaire.
Non seulement le rétablissement des profits élevés n'a pas résulté d'un élargissement du marché mais, au contraire, les moyens par lesquels ils ont été obtenus au détriment de la masse salariale ont contribué à réduire la consommation solvable, c'est-à-dire ont aggravé la cause fondamentale de la crise.
Le recours au crédit pour élargir la demande solvable est un procédé aussi ancien que le capitalisme. Mais jamais cela ne s'est pratiqué à une échelle aussi élevée qu'au cours du dernier quart de siècle. Les dépenses d'armement, ce grand classique de l'économie capitaliste, et le crédit, c'est-à-dire l'endettement, ont été les deux mamelles de la croissance dans toutes les phases d'expansion des trente dernières années.
L'expression « croissance » elle-même reflète la vision bourgeoise de la réalité, et non la réalité elle-même. Il était habituel d'affirmer par exemple que la croissance des États-Unis ou encore celle de l'Espagne étaient tirées par l'immobilier. Mais dans la mesure statistique de cette croissance étaient comptabilisés non seulement les chantiers ouverts et les logements construits, c'est-à-dire la production de biens matériels, mais aussi le renchérissement du foncier ou les hausses de prix résultant de la spéculation immobilière. Les comptabilités nationales et les statistiques ont toujours mélangé production matérielle et finance, croissance réelle et croissance financière. La phase dite de croissance précédant l'actuel effondrement a été celle du profit des entreprises, celle du prix des actions en Bourse, celle surtout du volume et de la rentabilité des produits financiers. Mais ce n'était une période de croissance ni pour la masse salariale dans son ensemble, en fort recul au contraire, ni pour les salaires individuels, au mieux stagnants, ni pour l'emploi, fluctuant au gré des manipulations statistiques. Le caractère mensonger de ces statistiques de classe ne pouvait que dissimuler l'écart qui se creusait entre la croissance du capital et le recul du pouvoir d'achat des classes populaires, à la base précisément de la crise.
C'est après la deuxième grande récession, celle de 1982, plus forte encore que celle de 1975, que se sont mis en place les mécanismes qui allaient accélérer la financiarisation de l'économie, en même temps que porter l'endettement à des sommets sans précédent. Pour freiner l'inflation, les États ont moins fait appel à la planche à billets et ont recouru plus massivement à l'emprunt. Les États y ont trouvé leur compte : émettre des titres de dette publique - bons du trésor, obligations d'État de différentes sortes, etc., - leur a donné les moyens de combler le déficit. Le grand capital y a aussi trouvé son compte. L'appel des États à l'emprunt public lui a permis de se placer avantageusement plutôt que de s'investir dans la production.
Quelques chiffres résument cette évolution. La dette publique des États-Unis, qui était de 305 milliards de dollars en 1963, 370 milliards en 1970, juste avant la crise, est passée à 907 milliards dix ans après, en 1980, à 3 233 milliards en 1990, à 5 674 milliards en 2000. Elle est, au début du mois d'octobre 2008, de 10 024 milliards de dollars ! (Chiffres donnés par le site Internet officiel du gouvernement américain ; il semblerait qu'ils mesurent le seul endettement de l'État fédéral, sans compter celui des États et, à plus forte raison, celui des collectivités locales).
Même évolution pour les dettes des particuliers américains. Elles ont littéralement explosé, passant de 580 milliards de dollars en 2000 à 1 250 milliards en 2005.
Un fonctionnement économique tiré en avant par le crédit et par l'endettement est une économie qui aggrave les inégalités à l'intérieur des pays comme entre pays. On ne prête qu'aux riches, cela est vrai pour les particuliers comme pour les États (encore que, l'affaire des « subprimes » le prouve, les banques sont dans certaines circonstances disposées à prêter même aux pauvres, si cela permet de les gruger).
Les États-Unis sont l'État le plus endetté du monde, en tout cas par le montant absolu, sinon relatif, de sa dette. Une fraction importante de la population mondiale, celle des pays pauvres, est en revanche écartée de ce circuit du crédit tout en en subissant les conséquences. C'est aux masses misérables des pays pauvres que leurs gouvernements font payer les dettes et les intérêts des crédits contractés pour les dépenses d'armement et les réalisations de prestige.
C'est dans les pays pauvres que la financiarisation croissante de l'économie montre ses conséquences le plus directement dévastatrices. Comme partout ailleurs, les capitaux à la recherche de placements rentables ne sont nullement intéressés à développer la production et, par conséquent, à investir, mais ils veulent tirer le maximum de profits des installations et des productions existantes et élaguer le reste. Mais, étant donné la faiblesse des équipements déjà existants, cela signifie la régression. Le capital financier parvient à piller les pays pauvres par le biais de l'endettement sans même laisser les quelques traces matérielles susceptibles d'être utiles à la population - routes, chemins de fer, équipements de base - que même le colonialisme avait laissées derrière lui.
Les banques et le crédit jouent un rôle irremplaçable dans l'économie capitaliste. C'est grâce aux banques et au crédit que la reproduction capitaliste se déroule sans discontinuité et que les entreprises industrielles ne sont pas obligées d'attendre que les marchandises qu'elles produisent soient vendues pour commencer un nouveau cycle de production. En mettant l'argent à la disposition des entreprises, les banques contribuent à le transformer en capital productif. L'intérêt prélevé sur la plus-value est la rémunération de cette fonction.
Mais l'hypertrophie de cette fonction a l'effet contraire. Au lieu de faciliter la transformation du capital-argent en capital productif, elle détourne au contraire le capital de la production pour l'orienter vers les opérations financières qui semblent posséder la merveilleuse faculté de fabriquer de l'argent directement avec de l'argent, sans passer par la phase vulgaire de la production.
Dans la crise rampante de trente ans, le rôle accru de la finance a été dans un premier temps un effet de la crise elle-même. Les capitaux qui, en raison de la saturation des marchés, ne pouvaient pas se transformer en investissements productifs, ont cherché d'autres placements rémunérateurs. Depuis le recyclage des « pétro-dollars », ces sommes colossales accumulées entre les mains des trusts pétroliers et, accessoirement, de quelques émirs du pétrole à la suite de la première vague de hausses des prix en 1973, et que leurs possesseurs n'avaient pas l'intention d'investir en forages ou en raffineries, la masse des capitaux en quête de placements qui rapportent n'a pas cessé de croître.
De sous-produit de la crise, ce rôle croissant de la finance en est devenu un des facteurs de prolongation. Le fonctionnement qui s'est mis en place privilégie le profit financier à court terme par rapport aux investissements productifs à long terme.
Cela semblait tenir du miracle : malgré une économie poussive, en faible croissance, les placements financiers rapportaient de plus en plus gros. Aux « grands classiques », comme les placements spéculatifs en Bourse, les prêts aux États, la spéculation sur les taux de change entre devises ou l'immobilier, sont venues s'ajouter bien d'autres opérations, inexistantes auparavant. Avec la croissance des masses financières, a émergé une nouvelle industrie, « l'industrie financière », dont la fonction est de gérer ces quantités croissantes de capital-argent, leur inventer des « produits financiers » et les marchés sur lesquels ils se vendent et s'achètent. Rien que l'accouplement surréaliste de ces deux termes « industrie financière » est caractéristique de notre époque de capitalisme usuraire. Et, la fonction créant l'organe, a explosé le nombre des officines financières, les « fonds d'investissement » qui, abandonnant l'essentiel des activités bancaires classiques, se spécialisaient dans les placements d'autant plus rentables que risqués. Le mot même « investissement » perdait sa signification en rapport direct avec la production, pour désigner tous les placements d'argent, ceux qui contribuaient à la création réelle de valeur et de plus-value aussi bien que les plus fantaisistes qui ne créaient rien, voire détruisaient.
La déréglementation des années quatre-vingt n'a pas été à l'origine de l'emballement financier, mais elle l'a facilité et mondialisé. Elle a démoli les frontières entre organes du secteur financier lui-même (entre banques de dépôts et banques d'investissements, entre sociétés d'assurances et banques), ainsi qu'entre le secteur productif et le secteur financier.
Même les entreprises productives, en tout cas les plus puissantes, étaient d'autant plus attirées par les opérations financières que celles-ci rapportaient par moments plus de profit que l'activité productive elle-même.
Tout cela semblait repousser les effets de la crise. Cela en perturbait surtout le rôle régulateur. Dissimuler les crises n'est pas les supprimer. Remplacer les activités productives par ce que les activités de la finance ont de plus factice ne peut pas durer éternellement.
Les activités financières ne créent pas de valeur. Elles permettent seulement de s'approprier une part de la plus-value créée par l'exploitation dans le secteur productif. Ce qui signifie en clair que le capital financier ponctionne, directement ou par l'intermédiaire de l'État et de la dette publique, le capital industriel, « seul mode d'existence du capital dont la fonction ne consiste pas seulement en appropriation mais également en création de plus-value, autrement dit de surproduit » (Marx).
Le gonflement ininterrompu de la sphère financière depuis les années soixante-dix non seulement se nourrit de l'aggravation de l'exploitation de la classe ouvrière mais contribue à étouffer le développement économique.
En 1992, commença pourtant une période que les commentateurs enthousiastes ne tardèrent pas à baptiser « la plus longue période d'expansion de l'économie américaine depuis la guerre ». De fait, entre 1994 et 2000, le PIB (produit intérieur brut) des États-Unis s'est accru de 32 %. Comme ces années bénies, où même le chômage était en recul, étaient liées au développement des technologies nouvelles (ordinateurs, semi-conducteurs, réseaux, téléphones mobiles), on s'est mis à parler de « nouvelle économie ». Les investissements productifs eux-mêmes s'étaient mis à croître, entraînant un accroissement de la productivité. Même pendant cette période cependant, le taux de croissance du PIB américain était resté inférieur à celui des années soixante. Quant à la reprise des investissements, elle s'était limitée pour ainsi dire exclusivement au secteur des nouvelles technologies qui, même aux États-Unis, représentait moins d'un dixième de l'activité économique. Ailleurs, dans les industries traditionnelles, les investissements continuaient à stagner, voire, d'après certaines études ultérieures, reculaient par rapport à la décennie précédente. Quelle importance, puisque les profits augmentaient, les cours de la Bourse, surtout celui du Nasdaq, spécialisé dans les valeurs technologiques, s'envolaient et que le niveau bas des taux d'intérêt multipliaient les fusions d'entreprises ! C'est à cette époque que le président de la banque centrale américaine parla « d'exubérance irrationnelle des marchés ».
Le marché des ordinateurs et autres téléphones portables, malgré son dynamisme pendant quelques années, ne fut pas assez vaste cependant pour absorber les énormes quantités de capital-argent accumulées et surtout pour les transformer en capital productif.
La « nouvelle économie » a surtout ouvert un nouveau champ à la spéculation boursière. Elle fut favorisée par la politique de crédit facile pratiquée par la banque centrale américaine. Celle-ci avait choisi d'abaisser son taux d'intérêt et de le maintenir bas. Or, c'est ce taux d'intérêt, c'est-à-dire le taux auquel les banques peuvent obtenir de l'argent frais, qui commande le coût de toute la hiérarchie des crédits. Le maintien d'un taux d'intérêt bas a conduit les banques et les institutions financières à accorder d'autant plus facilement du crédit qu'elles étaient sûres de se refinancer facilement et pour pas cher auprès de la banque centrale.
Ce taux d'intérêt bas pouvait passer pour une politique de crédit destinée à accompagner l'expansion de l'informatique. À une époque où le moindre fondateur de « start up » se prenait pour Bill Gates, obtenir un crédit facile passait pour une promesse de développement explosif de son affaire. La suite a montré rapidement que toutes ces « start up » n'étaient pas des Microsoft ou des Google à l'état embryonnaire.
En réalité, déjà à cette époque, les crédits accordés à l'informatique finançaient bien plus la spéculation que la production. Ils servaient surtout à se disputer les entreprises, à tort ou à raison prometteuses, dont les actions montaient en flèche. Signe d'une époque de spéculation intense, à un moment, la capitalisation boursière - c'est-à-dire le prix de la totalité de ses actions - d'Amazon.com, première librairie en ligne mais quasi inexistante encore, était du même ordre que celle de General Motors, avec ses dizaines d'usines et ses deux cent mille ouvriers !
Jusqu'à ce mois de mai 2000 où la bulle spéculative éclata, le krach Internet fit sombrer l'indice Nasdaq, emportant dans l'écroulement nombre de « start up » prometteuses et l'argent des gogos placé dans leurs actions.
L'expansion due au secteur informatique n'a pas été l'amorce d'une reprise générale. En revanche, après le krach de ce secteur, le gonflement de la finance a bénéficié d'un nouveau coup d'accélérateur. C'est que, dans ce contexte de menace de récession, à laquelle s'ajoutaient sur le plan politique les conséquences des attentats du 11 septembre 2001, pour préserver la liquidité du système financier et éviter ainsi les faillites en chaîne, la banque centrale américaine réagit en abaissant encore son taux d'intérêt. Le nouveau taux était à peine supérieur à 0 % en termes réels, c'est-à-dire compte tenu de l'inflation.
Cette politique a évité en effet que le krach d'Internet se transforme en crise financière brutale. Mais elle n'a fait que repousser les échéances. La crise financière, repoussée en 2001, est revenue en boomerang en 2007. Mais avec une puissance démultipliée par l'accroissement des masses financières et le nombre croissant des produits financiers de plus en plus artificiels et de plus en plus opaques même pour ceux qui les avaient élaborés.
La crise de la nouvelle économie peut être considérée comme la toute première phase de la crise financière d'aujourd'hui, ou sa répétition générale. Le début en tout cas d'un ensemble de comportements financiers qui ne pouvaient qu'aboutir à la débâcle d'aujourd'hui.
Puisque le taux d'intérêt bas de la banque centrale rendait le crédit facile, c'est-à-dire l'argent pas cher, pourquoi ne pas emprunter ? Aussi, banques comme entreprises industrielles empruntaient largement. La production ne pouvait pas absorber tout ce capital-argent ? Qu'à cela ne tienne ! « L'industrie financière » créa des produits de plus en plus sophistiqués. Elle mélangeait des crédits de natures différentes, notamment par la fameuse technique de « titrisation », crédits dont on finissait par ne plus savoir ce qu'ils contenaient. Peu importait ! Tant que l'acheteur avait la conviction, fondée ou pas, qu'il pourrait revendre les titres plus cher qu'il ne les avait achetés, la machinerie financière fonctionnait. Mais de façon de plus en plus détachée de la réalité de la production et surtout de la création de plus-value.
Pourtant, la finance et la production s'interpénétraient de plus en plus. Par le biais du financement des grandes opérations de fusions-acquisitions notamment. La stratégie des grandes entreprises n'étant pas d'élargir le marché, elle visait à augmenter leur part du marché existant, c'est-à-dire à en conquérir une part plus grande aux dépens de leurs concurrentes. D'où ces OPA, c'est-à-dire ces guerres déclenchées par des groupes industriels et financiers pour racheter des groupes rivaux. Ces opérations dont l'aboutissement était une concentration plus grande ont mobilisé, au long des années quatre-vingt-dix en particulier, non seulement l'argent des groupes en bagarre, mais aussi le crédit. Les groupes qui sortaient vainqueurs de ces OPA augmentaient leur profit à la mesure de la part de marché conquise, dans bien des cas même au-delà, lorsque la conquête leur donnait une position de monopole sur un marché. Mais ces OPA, en faisant appel au crédit soit pour attaquer, soit pour se défendre, contribuaient à accroître l'endettement des entreprises. Selon le journal économique Les Échos, aujourd'hui, les entreprises du CAC, hors banques, cumulent 250 milliards de dettes nettes. Une progression de 25 % dans les deux dernières années.
Ces concentrations surtout financières ne consistaient pas en une rationalisation de la production. Il n'en résultait nullement une augmentation des capacités productives. Une fois de plus, d'énormes sommes étaient mobilisées et rapportaient du profit pour les financiers sans qu'en résulte aucun avantage pour la production. En revanche, toutes ces opérations renforçaient la mainmise de la finance sur la production.
La technique des LBO, c'est-à-dire des opérations à effet de levier, constitue la merveille des merveilles pour les opérateurs financiers. L'expression aussi d'un capitalisme non seulement parasitaire mais autodestructeur. En substance, une LBO est une opération qui permet de racheter une entreprise avec très peu de capitaux propres, mais avec du crédit. L'objectif est clairement de rembourser l'emprunt en le prenant sur le capital de l'entreprise achetée. Quitte à la démonter, à vider sa trésorerie, à vendre les activités rentables et à se débarrasser du reste, à mettre à l'encan de la spéculation immobilière le terrain sur lequel elle était bâtie. Non seulement, le capital financier ne se transforme plus en capital productif, créateur de plus-value, mais il a pour finalité la destruction du capital productif.
Le capitalisme rentier de ce début de XXIe siècle a inventé une forme de suicide sophistiqué. Cependant, ce ne sont pas les banquiers ou les opérateurs financiers qui en meurent, mais la production, l'économie, c'est-à-dire la société.
Devant la débâcle financière actuelle, il est à la mode de mettre en accusation les fonds spéculatifs, en particulier les « hedge funds », ces officines spécialisées dans les spéculations les plus risquées. Mais une grande partie de ces officines sont des émanations de grandes banques ayant pignon sur rue et spéculent avec l'argent non seulement de riches particuliers, mais aussi de banques et d'entreprises.
La finance a sécrété des organes de plus en plus spécialisés. Ils ne font pas moins partie de la finance, comme la finance elle-même ne fait pas moins partie du grand capital. C'est le capitalisme lui-même qui devient de plus en plus usuraire et autodestructeur.
Bien que les acteurs de la scène financière et ceux de la scène productive soient les mêmes, il s'agit de deux fonctions différentes. Seule l'exploitation, c'est-à-dire l'appropriation par le capitaliste d'une partie de la valeur créée par les travailleurs dans la production, produit de la plus-value. L'activité financière permet seulement de ponctionner la plus-value produite par la production, par l'exploitation des travailleurs.
Pour un groupe capitaliste donné, peu importe d'où vient le profit. Lorsque la finance promet des placements plus avantageux que le profit industriel, va pour les placements financiers même si, lorsque ces comportements se généralisent, la classe capitaliste creuse sa propre tombe en freinant la création de plus-value.
Les préoccupations financières au détriment des préoccupations industrielles ont entraîné une multitude de modifications dans la gestion des entreprises industrielles elles-mêmes.
D'autant plus que, autre tendance de l'évolution économique, les groupes purement financiers, voire spécialisés dans la spéculation, occupaient une place de plus en plus importante dans l'actionnariat de nombre de grands groupes.
Soumises à la pression de la finance par ces deux biais, même les entreprises productives en ont épousé la logique.
Les dirigeants des entreprises ont été en conséquence poussés à avoir les yeux rivés sur l'évolution boursière. C'est cette évolution qui a conduit à des aberrations comme ces « restructurations » qui consistaient à se débarrasser d'une partie des travailleurs d'une entreprise pour faire monter en Bourse le prix de ses actions. C'est une aberration du point de vue des intérêts collectifs de la classe capitaliste. En réduisant le nombre des exploités, on réduit par la même occasion la plus-value globale. Mais, comme disait si bien Lénine, « les capitalistes sont prêts à vendre la corde pour les pendre ». Eh bien, pendant plusieurs années, ils ont vendu la corde qui est en train d'étrangler le système financier mondial ! C'est l'ex-PDG d'Alcatel, Serge Tchuruk, qui a formulé cela de la façon la plus absurde en parlant d'une « entreprise sans usines » ! Mais sans usines, c'est-à-dire sans travailleurs, il n'y a ni profit, ni profiteurs, et par conséquent, pas de Tchuruk ni ses semblables non plus.
On disait que la crise de 1929 avait éclaté dans un ciel serein. On ne peut certainement pas en dire autant de la crise financière actuelle. C'est une crise annoncée. Il était évident que cette fuite en avant du crédit facile, entraînant une spéculation de plus en plus vertigineuse, ne pouvait que conduire dans le mur. Beaucoup de gens l'ont dit, y compris nombre d'économistes de la bourgeoisie, prix Nobel compris. Constatant que la croissance du PNB était depuis des années de l'ordre de 3 à 4 % en France, alors que les capitaux pour être placés exigeaient du 15 à 20 %, un économiste français s'exclama, après coup il est vrai : « de l'arrogance de la finance est né le mensonge global à l'origine de la crise : la promesse d'une impossibilité arithmétique, celle de faire gagner à tous davantage que la moyenne des gains. ».
Mais rien n'a été fait pour arrêter cette course dans le mur, pour la bonne raison que rien ne pouvait être fait dans le cadre de cette économie dont le moteur fondamental est le profit. Au nom de quoi, un groupe, une entreprise ou un individu capitaliste arrêterait-il avant le dernier mouvement spéculatif qui rapporte encore un bénéfice ?
La crise financière d'aujourd'hui a été d'autant plus annoncée que dans l'immobilier s'est reproduit le même scénario que dans le secteur des « nouvelles technologies ». Les capitaux, attirés par les hausses de prix des logements, se sont rabattus massivement sur le secteur. Là encore, de conséquence des hausses de prix, la spéculation en est devenue un des moteurs. Le prix d'un logement a augmenté entre 1997 et 2006, d'après l'hebdomadaire britannique The Economist, de 100 % aux États-Unis, 127 % en France, 192 % au Royaume uni ... et jusqu'à 327 % en Afrique du Sud. Le crédit bon marché et néanmoins plein de pièges que la sphère financière a mis à la disposition de ceux qui avaient besoin de logements comme de ceux qui spéculaient sur ce besoin, a fait envoler les cours, aussi bien dans le secteur de la construction proprement dite que dans celui des prêts hypothécaires. Jusqu'à l'éclatement de la bulle immobilière en 2007.
Le facteur déclenchant de la crise financière a été la crise de l'immobilier aux États-Unis, et le vecteur de propagation, les titres qui contenaient une part du crédit hypothécaire américain.
Car toutes les grandes banques du monde en détenaient, de ces titres ! La dernière en date des estimations considère que le montant de la valeur nominale des titres pourris détenus par les seules banques européennes serait de 800 milliards !
La méfiance à l'égard de ces titres est devenue une méfiance à l'égard de tous les titres à risque. Or, ces titres à risque, précisément parce qu'ils étaient au centre de la croissance de la finance auparavant, étaient partout : les banques, les institutions financières, dans la trésorerie des entreprises, voire dans celle des collectivités locales.
Le montant total des « produits dérivés » est d'un tout autre montant que celui des seuls titres reconnus aujourd'hui comme pourris car contenant une part du crédit hypothécaire américain. Ce montant est estimé à 400 000 milliards de dollars. Par comparaison, la capitalisation boursière de toutes les grandes entreprises cotées dans n'importe quelle Bourse, c'est-à-dire le prix auquel on pourrait théoriquement les racheter toutes, n'est que de 60 000 miliards.
Si l'étincelle partie d'un secteur a mis le feu à toute la finance mondiale, c'est en raison des matériaux inflammables accumulés par toute l'évolution antérieure.
La suspicion généralisée à tous les titres s'est transformée en panique bancaire. Contrairement à la crise de 1929, ce ne sont pas les déposants et clients des banques qui ont paniqué, mais les banques elles-mêmes. Au point de donner un coup de frein brutal à toute transaction entre banques.
Mais, en raison du morcellement du système bancaire, sans transaction entre les banques, la distribution du crédit s'arrête (ou encore le crédit devient tellement cher que cela revient pratiquement au même).
L'économie capitaliste est arrivée à cette aberration qu'une crise financière, venant d'un excès de crédits, aboutit à assécher le crédit pour les entreprises de production.
Le krach boursier ne tarda pas à suivre la crise bancaire. Le lundi 21 janvier 2008 fut un « lundi noir » sur toutes les places boursières : la plus forte baisse depuis le 11 septembre 2001. D'autres journées, tout aussi noires, suivirent, jusqu'à ce mois d'octobre 2008 où, malgré quelques rebonds, c'est le mois entier qui allait être noir pour les Bourses. L'assèchement du crédit dû à la crise bancaire ne pouvait que freiner les opérations de la Bourse dans lesquelles le crédit joue un rôle important.
Mais il y avait aussi autre chose. La Bourse est aussi un thermomètre de l'économie capitaliste. Derrière la forme financière de la crise, pointait la crise de l'économie productive.
Plusieurs années de spéculation intense, tirée par la croissance des profits des entreprises, ont porté le cours des actions bien au-delà de leur prix normal.
Le niveau moyen du prix d'une action - notion tout à fait théorique car son prix varie au jour le jour en fonction de l'offre et de la demande - est lié au dividende, c'est-à-dire au revenu qu'elle est censée procurer à son détenteur. Mais la spéculation a porté le prix de l'action bien au-delà de ce prix moyen. L'éclatement de la bulle spéculative boursière a fait redescendre sur terre les cours de la Bourse. Pour nombre de grandes entreprises, le prix de leurs actions a chuté de 50 %, voire de 80 %. Après plusieurs semaines de baisse, le cours des actions ne s'est pas stabilisé. Ceci est le signe, non seulement que la spéculation continue, cette fois en jouant la baisse, mais aussi que la correction boursière n'est pas encore suffisante et qu'avec la récession, le grand capital s'attend à une baisse de la production et des profits dans les entreprises.
Depuis le mois de septembre 2008, la crise bancaire et la crise boursière se conjuguent. Les dirigeants des grands États impérialistes ont beau multiplier les conciliabules et, surtout, déverser des sommes fantastiques pour rétablir la confiance entre banques, ils n'y parviennent pas. L'ouverture de lignes de crédit pour permettre aux banques de se refinancer, ou la recapitalisation financée par les États, ne suffisent manifestement pas pour les pousser à redonner des crédits à l'économie. Autant dire qu'elles sont moins sensibles encore au discours moralisateur que leur distille un Sarkozy !
La presse économique est pleine de plaintes de patrons de PME faisant état non seulement du refus des banques de leur accorder de nouveaux crédits pour développer leur affaire, mais même de la suppression de leur découvert.
Les banques préfèrent manifestement utiliser les facilités que leur offrent les États à « saisir les opportunités », c'est-à-dire à racheter leurs semblables éclopées. Le mouvement de concentration dans la finance, largement entamé dès les premiers jours de la crise, se poursuivra d'autant plus qu'il est favorisé par les États.
Après la crise bancaire et la crise boursière, se dessine une nouvelle crise, celle du système monétaire. Le marché des changes entre monnaies est complètement déboussolé. Les cours des monnaies les unes par rapport aux autres ressemblent à la courbe de température d'un paludéen en crise grave. Les soubresauts des changes pèseront inévitablement sur le commerce international.
La zone euro en est, dans une certaine mesure, préservée, en tout cas pour ce qui est des relations commerciales entre pays faisant partie de la zone. Préservée jusqu'à quand ? Les aides apportées par chaque État à sa bourgeoisie aggravent inévitablement le déficit de chacun des budgets nationaux, mais pas au même rythme ni avec la même amplitude dans chaque cas. La défense de l'euro face au dollar, à la livre sterling ou au yen dépendra nécessairement des nations capitalistes les plus riches. Mais jusqu'à quel point accepteront-elles de payer pour les plus pauvres ?
En outre, les différents pays de la zone euro n'ont pas les mêmes structures d'importation et d'exportation vis-à-vis des États-Unis. Les variations du taux de change entre l'euro et le dollar, en hausse ou en baisse, n'ont pas les mêmes conséquences pour chacun des pays de la zone euro. Or, après une longue période de dépréciation du dollar par rapport à l'euro, voilà que la crise financière a inversé le mouvement.
C'est précisément par une crise monétaire qu'avait débuté, au début des années soixante dix, la longue crise rampante dont la crise actuelle constitue la phase la plus aiguë. La crise monétaire de l'époque a conduit à la disparition du système monétaire international mis en place au lendemain de la guerre à Bretton Woods. Ce système, avec ses taux fixes, les monnaies étant définies par rapport au dollar, et le dollar, par rapport à l'or, avait grandement facilité le développement du commerce international. Son effondrement puis son remplacement vers 1975 par un système de change flottant, c'est-à-dire variant en fonction de l'offre et de la demande, n'ont pas mis pour autant fin au règne du dollar ni en tant que principale monnaie des échanges internationaux, ni en tant que principale monnaie de réserve pour toutes les banques centrales. Mais ce nouveau système a ouvert des perspectives illimitées devant la spéculation monétaire, consistant à jouer sur les variations des taux de change, même sur de courtes périodes. Il a joué un rôle majeur dans la financiarisation de l'économie.
Même de légères variations des taux de change ont d'autant plus d'impact sur le système financier que les sommes accumulées en guise de réserve par les États et les banques centrales, principalement en dollars, sont devenues gigantesques. D'après Les Échos, elles atteignent aujourd'hui 7 100 milliards de dollars. Mais plus que la somme, c'est sa croissance exponentielle qui est significative. Elle est aujourd'hui cinq fois plus élevée qu'il y a dix ans et cent cinquante fois plus qu'il y a trente sept ans, lors de la suppression de la convertibilité du dollar en or ! Les réserves des banques centrales étant destinées en particulier à défendre les monnaies nationales, le gonflement de leur montant donne la mesure de la spéculation et par là même du parasitisme du capital financier.
Bien qu'il soit resté le pivot du système monétaire international, le dollar va mal depuis plusieurs années. Depuis le milieu des années quatre-vingt, de pays créditeur, les États-Unis sont devenus un pays débiteur. Leur dette extérieure atteint les 2 500 milliards de dollars, soit 20 % de leur produit intérieur . L'équilibre des comptes est obtenu depuis des années uniquement en raison des dépôts, en bons du Trésor américain, des réserves de pays extérieurs, principalement le Japon, la Chine et un certain nombre de pays producteurs de pétrole. Mais la croissance de l'endettement des États-Unis ne peut qu'attiser la méfiance à l'égard du dollar et peser dans le sens de la dépréciation de cette devise sur le marché des changes. Un marché des changes qui est en croissance vertigineuse depuis plusieurs années, non pas pour accompagner le commerce mondial, mais pour des opérations financières et pour des opérations spéculatives sur les monnaies (seules 3 % environ des sommes changées sur les marchés de changes correspondraient à des transactions commerciales)
La dépréciation du dollar a eu pendant plusieurs années pour conséquence la baisse de son taux de change par rapport à l'euro. En 2002, l'euro s'échangeait contre 86 cents, en fin 2007, contre 1,48 dollar. La devise américaine a été ainsi amputée de la moitié de sa valeur face à l'euro !
Mais la crise actuelle a inversé la tendance. Fin octobre 2008, l'euro ne valait plus que 1,23 dollar. On prévoit même un retour à la parité avant la fin de l'année.
Les dirigeants des pays industriels frappés par la crise n'ignorent pas les conséquences de la volatilité des changes sur le commerce international. Elle constitue un facteur majeur dans l'aggravation de la crise. Mais ils n'ont aucun moyen d'arrêter les mouvements spéculatifs, et ils ne veulent surtout pas s'en donner. Quant à mettre en place un nouveau système monétaire international, refaire un nouveau Bretton Woods, ils en parlent beaucoup, mais ils ne font qu'en parler. L'accord de Bretton Woods n'avait d'un accord que la forme. Il avait été dicté par les États-Unis aux puissances impérialistes anglaise, française, etc, affaiblies par la guerre et qui n'avaient alors d'autre choix que celui d'obéir. Affaiblis aujourd'hui eux-mêmes par la crise, il n'est pas dit que les États-Unis puissent, de la même manière, dicter leur volonté.
Le mouvement spéculatif qui renforce le dollar ne signifie pas un retour de confiance dans la devise américaine, mais une méfiance accrue à l'égard de l'euro. Au royaume des aveugles, les borgnes étant rois, par ces temps de tempêtes financières, les capitaux en quête de placements cherchent refuge du côté des bons du Trésor américain. À cela s'ajoutent les interventions des banques centrales qui ont placé leurs réserves en bons du Trésor américain. La Chine, par exemple, vient d'augmenter de 100 milliards de dollars son stock de dépôts en dollars. Toute dépréciation du dollar se traduit pourtant pour elle par l'envol en fumée d'une partie de ses réserves. Mais les deux pays sont enchaînés par les mêmes chaînes. C'est une des raisons pour lesquelles les commentaires qui voient dans les pays dits émergents - la Chine, l'Inde ou le Brésil - des havres de croissance à partir desquels l'économie mondiale pourrait rebondir, sont complètement stupides. Un écroulement du dollar, une fermeture brutale du marché américain devant les produits chinois ou encore le retrait des capitaux américains ou japonais, survenant séparément ou simultanément, ruineraient la croissance chinoise.
Après le krach de 1929, le retrait des capitaux américains a été le principal vecteur de transmission de la crise vers l'Allemagne. La même histoire risque de se répéter pour l'économie des pays d'Europe de l'Est, dont le système bancaire comme la grande distribution et le secteur industriel sont entièrement dominés par des grandes sociétés occidentales, surtout européennes. La Hongrie et l'Ukraine sont déjà au bord de la faillite, sauvées par des injections d'argent du FMI.
Les fonds de placements, et en particulier ceux spécialisés dans les spéculations les plus risquées, pris à contretemps par la spéculation et confrontés à de gros besoins de liquidités qu'ils ne trouvent pas auprès des banques, retirent déjà massivement leurs capitaux.
L'industrie automobile a été une des rares qui ne s'est pas contentée de racheter à prix d'ami des usines héritées du temps des Démocraties populaires, mais qui en a construit de nouvelles en Tchéquie, en Slovaquie, en Hongrie ou en Slovénie. La crise de cette industrie et le retrait de ses capitaux et de ses fabrications auraient dans ces pays semi-développés des conséquences plus dramatiques encore qu'en Occident.
La diminution de la demande prévisible de l'industrie, amplifiée par la spéculation, donne au prix des matières premières un caractère erratique. Après avoir atteint des sommets, le prix du pétrole brut s'est effondré des deux tiers en quelques semaines. Les classes démunies des pays pauvres qui avaient payé par la crise alimentaire les spéculations à la hausse, paieront pour les spéculations à la baisse, lorsque leur État cherchera à récupérer sur leur dos le manque à gagner sur leurs recettes venant du café, du riz ou des matières premières minérales.
La crise déborde déjà largement les seuls secteurs de l'immobilier et de la finance.
L'automobile est atteinte. À la baisse de la consommation finale, s'ajoutent les anticipations pessimistes des entreprises du secteur. Le recul de la production automobile se répercute sur les très nombreux sous-traitants et sur toute la chaîne des fournisseurs. Jusqu'à la sidérurgie, dont l'automobile est avec le bâtiment un des principaux clients, qui planifie déjà des réductions drastiques de sa production et des fermetures d'entreprises. Étant donné le rôle économique du secteur automobile, avec l'ensemble de ses sous-traitants et de ses fournisseurs, tout cela se traduira par un bond du chômage. Les journées de chômage technique s'ajouteront à la croissance du chômage pour réduire encore le pouvoir d'achat des classes populaires et aggraver encore la crise.
Les interventions des États ne vont pas dans le sens d'une « moralisation » des marchés financiers - que diable peut, d'ailleurs, signifier « moralisation de la finance » ? -, mais dans le sens exactement opposé. Les lignes de crédit débloquées pour sauver la mise aux financiers, les aider à la recapitalisation, non seulement sont une absolution pour les spéculations passées, mais aussi un encouragement pour les spéculations à venir.
Dans le même sens joue la réduction des taux d'intérêt des banques centrales sous prétexte d'encourager les banques à débloquer les crédits en direction des entreprises. Pour le moment, les facilités de crédit dont bénéficient les banques auprès des banques centrales ne les poussent pas à accorder du crédit aux entreprises de production, mais plutôt à épier leurs concurrentes mal en point afin de saisir les « opportunités », c'est-à-dire pour les racheter pour pas cher.
Les dirigeants politiques du monde capitaliste affolés promettent de réformer le système financier mondial. Mais, outre le fait que chacune des grandes puissances impérialistes qui a un tant soit peu droit à la parole en la matière voit cette réforme de sa fenêtre, celle de sa propre bourgeoisie, que peuvent-ils bien réformer ? La seule certitude est l'accroissement des interventions de l'État. Elles ont été immédiates. Dès le premier jour de la crise financière, les banques centrales ont ouvert le robinet du crédit. Elles ont invoqué la nécessité de surmonter la crise de confiance entre banques pour leur ouvrir des lignes de crédit afin de leur permettre de prêter à leur tour aux entreprises. Mais, exemple éloquent, rapporté par le Wall Street Journal, la banque Goldman Sachs par exemple, qui a reçu dix milliards de dollars, a trouvé les moyens de verser 11,8 milliards à ses propres dirigeants !
Étant donné la tendance des banques à détourner le crédit pour leur propres usages, sans le distribuer à l'industrie, ou si peu, il n'est pas impossible que les États soient poussés vers des formes diverses de nationalisation et la création d'une sorte de service public bancaire pour venir en aide aux capitalistes les plus estropiés par la crise. Il a bien fallu en passer par là dans l'intérêt de la bourgeoisie au lendemain de la guerre en France où toutes les banques de dépôts furent nationalisées.
Après les banques, c'est au tour des grandes entreprises de l'automobile de tendre la sébile. Des États-Unis aux pays d'Europe, il est de plus en plus question de « programmes ambitieux » pour relancer l'industrie. Une autre forme d'intervention de l'État pourrait être l'ouverture de chantiers de travaux publics. L'État n'a jamais cessé de contribuer aux profits capitalistes avec les deniers publics. Mais en temps de crise - comme en temps de guerre - les États prélèvent, plus encore qu'en temps normal, directement sur la population de quoi financer le profit capitaliste.
Depuis ses débuts, la longue crise rampante de l'économie capitaliste a conduit à une aggravation de la lutte des classes. Mais elle a été menée, tout au long, à sens unique. C'est la bourgeoisie qui a eu l'initiative. Elle a réussi à faire payer la crise par la classe ouvrière en s'appuyant en particulier sur une des conséquences de la crise, le chômage massif et la crainte de perdre son emploi. Elle a pu compter sur tous les partis pour mener la politique qu'elle voulait, y compris les partis qui avaient, de par leur passé, un lien avec la classe ouvrière.
Cette période de trente ans représente une longue période de régression, et pour la condition ouvrière et, plus généralement, pour la société. Il ne faut pas oublier que ce n'est pas seulement par la réduction continue de la masse salariale et l'écrasement brutal des conditions de travail que les entreprises ont augmenté leurs profits et que la classe capitaliste a maintenu la quantité globale de plus-value que se disputent les capitalistes par les opérations financières. Le gonflement de la finance s'est nourrie, aussi, de la diminution de la protection sociale, des ponctions colossales sur tout ce qui est utile à l'ensemble de la société, y compris aux plus déshérités. Des prélèvements de plus en plus importants sur ce qui aurait pu, aurait dû, aller aux hôpitaux, aux écoles, aux équipements collectifs, et qui ont servi à acquitter les services de la dette, c'est-à-dire à nourrir la sphère financière.
Qu'il soit seulement rappelé qu'aux États-Unis, le plus puissant et le plus riche pays capitaliste, près de 40 millions de personnes vivent dans une pauvreté effroyable ; et que ce pays, qui en est à dépenser la somme fantastique de 150 milliards de dollars pour sauver une seule entreprise d'assurance, AIG, n'est pas capable de mettre sur pied un système de santé permettant aux 40 millions de pauvres de se soigner correctement. Se poser la question : qui va payer la crise du capitalisme, est une fausse question, les classes laborieuses l'ont déjà payée, et largement.
Elles n'ont cependant pas fini de payer. L'aggravation de la crise ne peut qu'aggraver encore plus la guerre menée par la bourgeoisie. Le degré d'étatisme auquel elle se livrera, suivant la situation concrète des pays, en fonction surtout de la gravité de la crise, n'y changera rien. Les États n'interviendront pas pour soulager le sort des classes laborieuses, mais pour permettre à la bourgeoisie de sortir, au mieux, de la crise.
Les prestidigitateurs impuissants du FMI, de l'OMC, des banques centrales, ont beau fouiller dans la besace du passé pour retrouver la bonne réglementation ou le bon contrôle empêchant les catastrophes, les « sommets » des G4, G8 ou G20 ont beau se succéder, ils ne trouveront pas un bon système capable de réguler l'économie capitaliste.
En témoigne aussi le fait que tous les partis socialistes à la tête d'un gouvernement, flanqués d'un PC ou pas, ont mené la même politique, livrant au privé des services publics, favorisant le secteur financier par un endettement croissant de l'État, etc.
De plus en plus nombreuses sont les voix qui annoncent que l'économie de marché n'est parfaite qu'avec une certaine dose de contrôle et de réglementation, en rappelant les années cinquante et soixante. Mais elles ne parviennent pas à expliquer comment il se fait que c'est précisément pendant ces périodes réglementées que l'économie capitaliste a été grosse de la crise qui a éclaté au début des années soixante-dix. Pas plus qu'elles n'arrivent à expliquer comment et pourquoi ce système, dépeint après coup sous des couleurs si idylliques, a pu engendrer le laisser-faire généralisé et le libéralisme effréné, qu'il est à la mode de dénoncer aujourd'hui après les avoir encensés hier.
Il est tout à fait ridicule d'invoquer l'influence de tel économiste partisan du libéralisme ou la « politique ultra-libérale » de Reagan ou de Thatcher. Que l'arrivée à la tête des États-Unis d'un acteur de série B ait pu marquer à ce point l'évolution du capitalisme ces dernières années, est le signe que cela devait tout de même être dans l'air du temps, c'est-à-dire dans les aspirations et la volonté de la classe capitaliste, dont les dignitaires politiques ne sont que des serviteurs, et dans la logique de l'évolution du capitalisme lui-même.
La classe ouvrière n'est pas préparée pour le moment à l'intensification de la guerre que mènera la bourgeoisie. Les partis qui prétendent représenter ses intérêts - ils le prétendent d'ailleurs de moins en moins - l'ont trahie depuis longtemps. Ce n'est pas mieux pour les centrales syndicales. Et l'aggravation de la crise elle-même, la montée brutale du chômage à laquelle il faut s'attendre, ne poussent pas, dans un premier temps, à la combativité. Mais les coups reçus font aussi mûrir la combativité et la conscience. L'une comme l'autre peuvent changer brutalement. Que l'on se souvienne que, si la dépression des années trente a dans un premier temps surpris et désorienté les classes laborieuses, elle a par la suite conduit à des luttes de grande envergure.
La réaction de la classe ouvrière ne vint pas immédiatement. Les licenciements, l'accroissement brutal du chômage, les fermetures d'usines, les attaques de toutes sortes, dans un premier temps, surprirent et découragèrent les travailleurs.
Il fallut plusieurs années pour que la contre-offensive des travailleurs vienne. Mais elle vint, elle fut massive. Au milieu des années trente, elle ébranla des pays aussi divers que les États-Unis, l'Espagne ou la France. Des vagues de grèves eurent lieu également dans d'autres pays.
Pour l'Allemagne, la réaction vint trop tard. Par l'intermédiaire du régime hitlérien, la bourgeoisie parvint à briser la classe ouvrière de ce pays. Mais l'arrivée au pouvoir du nazisme, en faisant toucher du doigt la menace fasciste, contribua de manière décisive à la montée ouvrière en France ou en Espagne.
C'est en s'appuyant sur l'expérience de ces années de luttes ouvrières massives que Trotsky rédigea le Programme de transition destiné aux organisations de la Quatrième Internationale, en train de se constituer.
Au moment où le programme était publié, en 1938, la vague ouvrière était déjà en reflux, vaincue, détournée sur de fausses voies ou trahie. Alors que la Deuxième Guerre mondiale était déjà en marche, Trotsky le rédigea cependant, dans l'espoir que la guerre allait conduire, comme la guerre précédente, à des révoltes ouvrières.
Le programme était un outil pour une organisation révolutionnaire décidée à s'adresser à une classe ouvrière qui était déjà en lutte en lui proposant une série d'objectifs susceptibles de l'amener à contester concrètement la mainmise de la bourgeoisie sur les entreprises et sur les banques. Un programme visant à transformer des situations pré-révolutionnaires en situations révolutionnaires.
L'histoire de la crise actuelle n'est pas encore écrite et personne ne peut prédire comment, où et quand se produiront les explosions ouvrières face à l'offensive inéluctablement aggravée de la bourgeoisie. Personne ne peut même avoir la certitude qu'il se produira des luttes suffisamment amples, profondes et durables pour ébranler les bourgeoisies et leurs États.
Mais la raison d'être d'une organisation révolutionnaire est de se préparer à ces périodes-là, les seules où la lutte de classe peut bouleverser l'histoire. C'est pour une telle période que le Programme de transition a été écrit. C'est dans une telle situation, si elle se produit, qu'il gagnera sa signification.
L'évolution de la crise ramène au centre de l'actualité les objectifs partiels du Programme de transition : l'échelle mobile des salaires pour préserver le pouvoir d'achat, et la répartition du travail entre tous sans diminution des salaires pour se protéger contre le chômage qui monte.
Mais le passé a montré comment la bourgeoisie ou ses serviteurs politiques de gauche savent détourner ces deux revendications en les transformant, d'objectifs révolutionnaires d'un prolétariat agissant, en recettes de cuisine, pour le démobiliser. L'Italie a connu pendant longtemps un système d'indexation des salaires sur les prix. D'une certaine manière, la France aussi avec le smic. Quant à la répartition du travail entre tous, l'idée en a été pervertie pour devenir un argument pour le Parti Socialiste au moment des lois Aubry où la baisse de l'horaire de travail était censée créer de nouveaux emplois.
Aussi, ces revendications essentielles du Programme de transition ne gardent leur signification révolutionnaire que si elles sont liées à l'objectif du contrôle des travailleurs et de la population sur les banques et sur les entreprises. Le secret bancaire comme, plus généralement, le secret des affaires sont absolument indispensables aux capitalistes pour perpétrer leur pillage des biens de la société. La levée de ces secrets fait partie des objectifs prioritaires car elle constitue le premier pas vers le contrôle ouvrier de l'industrie.
Les objectifs sont aussi liés aux moyens, à la démocratie ouvrière dans les luttes, à la création de comités de grève ou de comités d'usine susceptibles de devenir des états-majors reconnus par tous les travailleurs, y compris les plus exploités qui se tiennent en temps normal à l'écart des syndicats comme de la politique.
La crise bancaire attire l'attention de l'opinion publique ouvrière non seulement sur la nécessité du contrôle mais aussi sur la question de qui contrôle. Le constat est évident que le contrôle des banques entre elles comme le contrôle par l'État ne sont des contrôles que du point de vue de la classe possédante et conduisent à la catastrophe. Il faut arracher le contrôle des banques aux grands financiers. Il faut non seulement nationaliser toutes les banques, et les nationaliser sans rachat, mais aussi les unifier et soumettre la banque d'État unique au contrôle des travailleurs et de la population afin qu'elle fonctionne dans l'intérêt de la société.
Ces objectifs non seulement n'ont rien de recettes magiques, mais ils ne trouveront véritablement leur signification que lorsque les masses exploitées s'en empareront. Il n'est, bien sûr, pas au pouvoir d'une petite organisation de susciter la réaction des masses ouvrières. Mais c'est dans les périodes où la classe ouvrière agit, et agit vraiment, que les petits groupes révolutionnaires peuvent grandir et, s'ils sont à la hauteur, jouer un rôle dans les événements.
Ce qui s'est passé dans les années trente montre que ce n'est pas la classe ouvrière qui a été défaillante face aux nécessités de l'époque. Si les révoltes ouvrières, des États-Unis à l'Espagne, en passant par la France, n'ont pas réussi à empêcher la bourgeoisie de faire prévaloir ses solutions contre la crise - le New Deal aux États-Unis, le fascisme en Allemagne et l'étatisme en France et finalement, la guerre mondiale -, c'est en raison de la politique menée par les organisations auxquelles la classe ouvrière faisait alors confiance.
Malgré son coût pour la société, l'organisation économique capitaliste ne disparaîtra pas toute seule. Elle ne disparaîtra que si une force sociale est capable de la faire disparaître.
Nous gardons la conviction que le prolétariat demeure la seule classe qui est porteuse de cette transformation sociale. L'actualité de la crise et le formidable gâchis de travail humain qu'elle révèle, en soulignent la nécessité. Nous ne savons pas plus aujourd'hui qu'il y a vingt ou cinquante ans par quelle voie, par quel cheminement, à travers quelles expériences collectives, le prolétariat accèdera à la conscience de son rôle historique en se donnant pour objectif le renversement révolutionnaire du règne de la bourgeoisie, la suppression de la propriété privée des moyens de production et la réorganisation de la production en fonction des besoins sous le contrôle démocratique de la collectivité.
Ce que nous savons, c'est que cette prise de conscience nécessite un parti ouvrier révolutionnaire. « La signification du programme, c'est le sens du Parti », disait Trotsky. Le parti ouvrier révolutionnaire a pour tâche de défendre et de propager ces objectifs révolutionnaires en toutes circonstances. Il doit surtout être capable par sa cohésion, par sa compréhension commune des événements, lorsque le prolétariat se mobilise de le conduire à leur réalisation.
Contribuer à cela dans la mesure de nos forces est notre raison d'être fondamentale.