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Etats-Unis - La montée de la droite, un produit de la crise et de la politique des Démocrates
Nous publions ci-dessous la traduction d'un article paru dans la revue Class Struggle n° 66 de mai-juin 2010 éditée par l'organisation trotskyste américaine The Spark. Cet article analyse l'évolution de la situation politique aux États-Unis plus d'un an après l'élection d'Obama. L'enthousiasme qui a accompagné son arrivée à la Maison Blanche a laissé la place aux vociférations haineuses de la droite et de l'extrême droite qui surfent démagogiquement sur le mécontentement suscité par la politique du président et du parti Démocrate.
Depuis le début de l'année, une extrême droite revigorée a fait irruption sur le devant de la scène politique avec un langage de plus en plus virulent. Sous le nom de mouvement Tea Party[fn]Référence à la Guerre d'Indépendance contre l'Angleterre[/fn], elle avait déjà, à l'automne dernier, organisé des manifestations contre les impôts, contre le déficit budgétaire croissant, avec quelques piques contre les grandes banques, et enfin contre la « campagne pour la réforme des soins de santé » des Démocrates. Dans les zones rurales, différentes versions de ce qu'on appelle le mouvement des « milices » ont fait campagne pour un programme paramilitaire « de survie », combiné à une propagande et des actions anti-immigrés. Une organisation de shérifs, appelée Oathkeepers, les Assermentés, a demandé aux responsables locaux de ne pas appliquer les mesures du gouvernement fédéral jugées « inconstitutionnelles » et d'organiser des milices locales pour les soutenir. Et de prétendus « citoyens souverains », c'est-à-dire des Blancs racistes qui se déclarent supérieurs aux Noirs et aux immigrants, ont proclamé aussi qu'ils n'étaient pas assujettis aux impôts fédéraux. Enfin, Sarah Palin[fn]Gouverneur de l'Alaska et ex-candidate à la vice-présidence dont le langage populiste d'extrême droite exprime les frustrations d'une partie de la population[/fn] est de retour dans les médias, et en est même partie prenante avec la séquence qu'elle anime sur Fox News[[Une chaîne de télévision nationale des plus réactionnaires]].
La situation contraste fortement avec celle de janvier 2009, lorsque les Démocrates se félicitaient de l'arrivée d'Obama à la Maison Blanche. Son slogan de campagne « changer » résonnait encore et les Démocrates avaient un solide contrôle du Congrès avec leur majorité qualifiée de 60 voix, nécessaire pour contrer les manœuvres d'obstruction au Sénat. On croyait l'extrême droite abattue, intimidée par l'avance des Démocrates.
Mais l'élection d'un Républicain pour remplacer le Démocrate Ted Kennedy décédé a montré à quel point, après une année de mandat Obama, les espoirs suscités par la vague démocrate s'étaient envolés.
En effet, le 19 janvier dernier, un an après l'investiture de Barack Obama et la prise de contrôle des deux chambres du Congrès par les Démocrates, Scott Brown, un Républicain inconnu, a remporté dans le Massachusetts l'élection partielle au siège du défunt Ted Kennedy. Bien sûr, ce n'était qu'une élection locale. Mais la défaite des Démocrates avait lieu dans un État où Obama avait gagné en 2008 avec une écrasante majorité de 62 % des voix contre 36 %. La perte la plus brutale s'est produite dans des zones qui avaient voté massivement démocrate en 2008. Le soutien au Républicain a été plus marqué dans les villes où le taux de chômage était le plus élevé. Et pire, du point de vue des Démocrates, un sondage réalisé pour l'AFL-CIO (la centrale syndicale)a montré que 49 % des syndiqués ont voté pour le Républicain, tandis que seulement 46 % ont voté pour le Démocrate. Après le vote du Massachusetts, Karen Ackerman, une dirigeante de l'AFL-CIO, a qualifié le vote du Massachusetts de « révolte de la classe ouvrière », et a ajouté : « De toute évidence, nous le prenons très au sérieux parce que, franchement, nous savons que les élections de l'année 2010 vont être très serrées. »
La situation économique dans laquelle la classe ouvrière et d'autres couches de la population laborieuse sont empêtrées n'a jamais été pire depuis la Grande Dépression, et est certainement pire qu'il y a un an, quand Obama est entré en fonction.
Bien sûr, comme les partisans d'Obama le font remarquer, ce n'est pas lui qui a causé la crise. Ni, d'ailleurs, George Bush.
Mais l'activité principale de l'administration Obama, tout comme celle de l'administration Bush auparavant, a visé à développer et à renforcer les bénéfices des capitalistes, au détriment de larges couches de la population, et en particulier de la classe ouvrière.
Sur toutes les questions fondamentales, le gouvernement des États-Unis a continué en 2009 à défendre les intérêts de classe de la bourgeoisie impérialiste, en passant presque sans heurt de l'administration républicaine à l'administration démocrate.
Les Démocrates, après avoir remporté une élection en promettant le changement, se sont servis de leur succès pour mener une politique qui se retourne contre eux.
Mener les guerres de Bush
Obama a continué de suivre le calendrier fixé par Bush pour le retrait des troupes d'Irak, en dépit de sa promesse électorale de rapatrier une brigade par mois. En fait, le premier grand retrait des troupes, leur évacuation des villes et leur repli dans les bases américaines, n'est pas encore achevé. Obama n'a pas non plus modifié le plan de l'administration Bush quant au maintien d'une importante force d'occupation américaine en Irak après le retrait de la totalité des troupes de combat, officiellement en août 2010. Elle se situerait entre 45 000 et 55 000 soldats.
En outre, plus les dates du retrait officiel se rapprochent, plus Obama a recours à des troupes embauchées par des entreprises privées, c'est-à-dire des mercenaires payés indirectement par le Pentagone. Il y a plusieurs mois, le New York Times a rapporté que le nombre de mercenaires dépassait déjà le nombre de soldats américains « officiels »en Irak.
En Afghanistan, Obama a doublé le nombre de troupes américaines en un an. Bien que les grands médias soient restés flous sur la question, Obama avait déjà clairement indiqué pendant la campagne électorale qu'il avait l'intention d'intensifier la guerre en Afghanistan. (En fait, Bush avait déjà commencé cette intensification avant son départ, mais discrètement). Alors qu'Obama prétend, de façon ambiguë, que les troupes américaines ne seront présentes qu'à court terme, son général en chef en Afghanistan, Stanley McChrystal, a prévenu le Congrès qu'il n'y aura pas de réduction d'effectifs en Afghanistan pendant au moins les quatre années à venir.
Non seulement la guerre s'étend en Afghanistan, mais aussi de l'Afghanistan vers le Pakistan, et même de façon sporadique vers le Yémen. Là, les Forces spéciales américaines, agissant en coulisses, ont plusieurs fois été appuyées par des attaques de missiles de croisière sur les zones hostiles au régime pro-américain du Yémen. Rien de tout cela n'a commencé avec Obama, mais il a fait siennes les guerres de Bush.
Poursuivre la chasse aux sorcières « terroristes » de Bush
L'administration Obama suit aussi directement les traces de son prédécesseur en agitant régulièrement la menace du terrorisme international pour rallier des soutiens aux interventions militaires des États-Unis. Elle est en train de mener une véritable chasse aux sorcières aux États-Unis.
Obama peut bien avoir annoncé la fermeture de Guantanamo, c'était devenu un véritable scandale international. Mais les États-Unis maintiennent encore des centaines de musulmans prisonniers, incarcérés pour des années sans aucune charge à leur encontre, et ont clairement l'intention de continuer à les détenir même quand Guantanamo sera effectivement fermé, s'il l'est.
L'administration Obama a peut-être satisfait les libéraux en publiant les notes des juristes de l'ère Bush justifiant l'usage de la torture par les forces américaines, avec les détails explicites sur les différentes méthodes utilisées. Mais le refus ultérieur de l'administration de sanctionner les juristes auteurs de ces notes sur la torture est parfaitement emblématique de la continuité de la politique des États-Unis, quel que soit celui qui occupe la Maison-Blanche, Démocrate ou Républicain.
Enfin, un nombre incalculable de musulmans de ce pays, jeunes et moins jeunes, ont été arrêtés et leurs familles menacées. Souvent on les a laissés pourrir en prison, puis contraints d'accepter le plaider coupable pour des délits mineurs ou des infractions aux règles d'immigration, sous la menace d'un procès entraînant la peine de mort, ou celle d'être renvoyés dans un pays où ils pouvaient s'attendre à un traitement encore pire. Obama n'a pas mis fin à cette chasse aux sorcières, ni arrêté les représailles contre des milliers de jeunes hommes dont le « crime » était d'être trop imprudents en exprimant leur opposition aux guerres des États-Unis.
Derrière tout cela, il y a les pouvoirs extraordinaires que Bush a imposés après le 11 septembre 2001 (le Patriot Act), pouvoirs qu'Obama a fait reconduire, quand ils sont venus à échéance en 2009.
Surenchérir sur les cadeaux de Bush aux grandes banques
Le renflouement des banques, commencé par Bush, a continué sous Obama, encore plus massivement. Au cours des quatre derniers mois du mandat de Bush, son administration a donné 350 milliards de dollars aux grandes banques grâce au TARP (Troubled Asset Relief Program, ou plan Paulson). Dans les trois mois suivant l'investiture d'Obama, le reste des fonds a été distribué.
Mais ce plan, pour lequel à la fois Bush et Obama ont fait campagne pour obtenir le vote du Congrès, n'a été qu'un premier acompte du gouvernement aux banques. Depuis septembre 2008, date de l'éclatement de la crise bancaire sur la place publique, plus de trente programmes différents ont été mis en place par le ministère des Finances ou la Réserve fédérale, la Fed, la banque centrale américaine, la plupart d'entre eux sans l'approbation du Congrès. L'administration Bush a lancé certains de ces programmes, mais l'administration Obama les a utilisés et en a augmenté le nombre.
Selon une liste publiée par Mother Jones[[Revue progressiste faite par des journalistes d'investigation indépendants]] en décembre 2009, le total des engagements pris par le gouvernement par le biais de ces programmes atteignait 14 400 milliards de dollars, financés moitié par la Réserve fédérale, moitié par le budget de l'État. Certains de ces 14 400 milliards ont pris la forme de dons purs et simples, ou de prêts, ou de « fonds mis à disposition », ou d'achats par la Fed ou l'État d'actifs pourris. Une partie des 14 400 milliards ont été remboursés, avec d'autres fonds gouvernementaux.
Il est clair que les banques n'ont pas de problème pour demander, puisque les postes de haut niveau de l'administration Obama sont remplis de gens issus directement des grandes banques et des grandes entreprises, à commencer par le ministre des Finances, Timothy Geithner, et Larry Summers, le chef du Conseil économique, suivis de dix hauts fonctionnaires au ministère des Finances, ainsi que des chefs de la Division exécutive de la SEC[[L'autorité censée contrôler les marchés financiers aux États-Unis]] et de la Commodity Futures Trading Commission. Cinq de ces fonctionnaires viennent directement de Goldman Sachs, trois de Citigroup.
Même si les 789 milliards de dollars du plan de relance d'Obama avaient été utilisés en totalité pour soulager la situation de la population, ce qui est bien loin d'être le cas, puisque la plus grande part en a été consacrée directement ou indirectement à gonfler les résultats de diverses grandes entreprises, c'est dérisoire par rapport à ce qui a été remis avec empressement aux grandes banques, elles-mêmes à l'origine des problèmes.
Rajouter aux sacrifices que Bush a imposés aux travailleurs de l'automobile
Obama a achevé de renflouer General Motors et Chrysler. Cela a servi de prétexte au gouvernement pour exiger que les travailleurs de l'automobile acceptent de gros sacrifices : réduction de la couverture médicale des retraités, diminutions et gel des salaires du personnel et diminution de moitié des salaires et des avantages sociaux des nouveaux embauchés. Ces exigences ont été imposées chez les trois constructeurs automobiles américains. Le groupe de travail sur l'automobile créé par Obama a utilisé la faillite comme une arme pour arracher des sacrifices supplémentaires aux travailleurs de General Motors et de Chrysler, le gel des salaires pourtant déjà réduits des nouveaux embauchés et un engagement à ne pas faire grève pendant six ans, avec une disposition prévoyant que les salaires et les avantages sociaux seraient fixés par un médiateur qui se baserait sur ceux versés par les concurrents les plus compétitifs, c'est-à-dire Toyota, Honda et Nissan aux États-Unis. Ainsi encouragés, Toyota et Honda ont saisi l'occasion de ce nivellement vers le bas et se sont empressés de diminuer les salaires dans certaines de leurs usines.
En demandant des sacrifices aux travailleurs de l'automobile, l'administration Obama a envoyé un message à tous les travailleurs. Ils devaient s'attendre à une nouvelle série de sacrifices. Et les différents États et municipalités, qui avaient déjà diminué les salaires en brandissant des déficits budgétaires croissants, ont été parmi les premiers employeurs à lancer une nouvelle offensive contre les travailleurs. De New York à la Californie, de Porto Rico au Michigan, les dirigeants ont utilisé divers prétextes, soit pour baisser d'office les salaires et avantages sociaux des employés, soit pour négocier ces baisses, bien souvent en menaçant de supprimer des emplois, emplois qu'ils supprimaient de toute façon par la suite.
Reprendre les projets de Bush contre les immigrés
Obama a poursuivi les attaques contre les immigrés menées durant les années Bush. Tout comme Bush, Obama promet de régulariser la situation des immigrants sans papiers - « l'année prochaine » peut-être - tout en expulsant dès maintenant des dizaines de milliers de ces immigrés, sous divers prétextes. Pendant la première année de son mandat, 387 000 immigrés en situation irrégulière ont été expulsés, un record. En outre, plus de 300 000 étrangers prétendument criminels ont été expulsés, une augmentation de 6 % par rapport à la dernière année Bush. Dans les premières semaines de 2010, les expulsions d'étrangers dits « criminels » ont augmenté de 40 % par rapport à 2009. Ceux qu'on appelle des « étrangers criminels » ne sont pas seulement ceux qui ont effectivement commis un crime, et qui représentent une très faible proportion des personnes expulsées, mais aussi tous ceux qui ont violé les lois sur l'immigration ou qui ont été arrêtés pour l'un des très nombreux délits classés comme « crimes » dans le cadre du système d'immigration.
Obama avait dénoncé comme « inhumaines » les rafles effectuées sur les lieux de travail sous Bush. Mais ce n'était que pour que son ICE[[Immigration and Customs Enforcement, la police des douanes et de l'immigration]] donne aux employeurs une liste des travailleurs dont les papiers ne sont pas en règle, avec l'ordre de les renvoyer. De toute évidence, l'ICE a ainsi été en mesure d'arrêter des travailleurs de façon systématique et sans attirer l'attention... mais pas de façon plus humaine !
En avril, Obama s'est expliqué sur les raisons pour lesquelles son gouvernement poursuit la politique répressive de son prédécesseur : « Quand le peuple américain ne croit pas que vous pouvez sécuriser les frontières, il est difficile de trouver un accord pour faire sortir de l'ombre les gens qui sont déjà ici et les mener vers la voie de la citoyenneté. » En d'autres termes, il faut blâmer « le peuple américain » pour l'ensemble des attitudes réactionnaires développées par des politiciens tant républicains que démocrates.
Attaquer aussi les enseignants et les écoles publiques
Obama a intensifié les efforts de Bush pour transformer des écoles publiques en établissements privés dont certains sont gérés par des sociétés d'éducation à but lucratif, certains par des institutions religieuses, d'autres par de grandes entreprises industrielles intéressées par des formations limitées destinées à leurs propres besoins, d'autres encore par des universités qui veulent en faire des laboratoires pour leurs recherches sur l'éducation ou la formation des nouveaux enseignants.
La prétendue réforme de Bush appelée « No Child Left Behind » (« Aucun enfant laissé au bord du chemin ») a donné aux districts scolaires locaux un prétexte pour se débarrasser des enseignants ayant le plus d'ancienneté, c'est-à-dire les mieux payés, en les remplaçant par des personnels jetables, à bas coût. Mais le programme d'Obama « Race to the Top » (« La course au sommet ») a aggravé ces attaques : au milieu d'une crise économique asséchant les ressources des écoles, le ministère de l'Éducation d'Obama a ouvertement déclaré qu'il refuserait les fonds fédéraux pour cette « course au sommet » aux systèmes scolaires locaux qui ne supprimeraient pas les avantages des enseignants liés à l'ancienneté et qui ne lieraient pas les salaires de ces derniers aux résultats des tests obtenus par les élèves.
Il est évident que les enfants ne peuvent que souffrir de telles mesures. Néanmoins, tout cela est dissimulé sous l'emballage cynique de leur intérêt, tout comme l'avaient été les prétendues réformes de l'éducation de Bush. Le véritable but de toutes ces mesures est de réduire les fonds publics dépensés pour les écoles publiques, libérant ainsi une plus grande part des budgets des États et des villes pour les grandes entreprises qui leur sucent déjà le sang dans tout le pays.
Accroître les bénéfices des géants des assurances, des laboratoires pharmaceutiques et des hôpitaux privés
La réforme démocrate du système de santé, feignant d'étendre l'assurance santé à ceux qui en sont privés, s'attaque en fait directement à eux dans le cadre d'une escroquerie complexe destinée à rapporter encore plus aux assurances et aux entreprises du secteur médical.
Cette prétendue réforme oblige les personnes qui n'ont pas de couverture médicale à en acheter une auprès de compagnies d'assurances privées. Ce sera une assurance trop chère pour la faible couverture fournie, et qui exigera des cotisations complémentaires élevées pour de vrais soins médicaux.
Les aides accordées aux personnes à faible revenu ne couvrent qu'une partie du coût des primes d'assurance, mais ne couvrent ni la franchise ni aucun des coûts laissés à la charge du malade. Les personnes qui ne peuvent pas se payer une assurance aujourd'hui la trouveront demain inabordable, même avec les aides. Mais si elles n'en souscrivent pas une, elles devront payer une amende importante qui augmentera chaque année.
Certains bénéficieront de Medicaid, la couverture médicale publique pour les pauvres, au moment même où les différents États et la réforme d'Obama elle-même en diminuent les fonds. Actuellement, les remboursements déjà très bas signifient que plus de la moitié des médecins refusent d'accepter un patient couvert par Medicaid.
Ceux qui ont aujourd'hui une assurance y perdront d'une manière ou d'une autre. Les régimes d'assurance relativement décents que certains travailleurs ont par leur employeur seront taxés. Les personnes couvertes par le programme Medicare, l'assurance publique pour les travailleurs âgés, découvriront que leur couverture médicale a diminué. Celles qui sont couvertes par Medicaid découvriront que leur couverture médicale déjà insuffisante s'est encore réduite. Les personnes qui se rendent dans des hôpitaux publics découvriront qu'ils sont fermés.
L'un des objectifs majeurs de la prétendue réforme est, en fait, de réduire les dépenses actuelles du gouvernement en matière de soins médicaux. Selon le CBO, le bureau de statistiques du Congrès, le gouvernement pourrait économiser plus de 400 milliards de dollars sur Medicare, plus de 100 milliards sur Medicaid, et environ 40 milliards sur les hôpitaux publics.
L'autre objectif majeur est de pousser davantage de clients vers les assurances privées, l'industrie pharmaceutique, les fournisseurs privés de soins médicaux et hospitaliers, et cela sans aucun contrôle sur leurs tarifs. Les laboratoires pharmaceutiques et les chaînes d'hôpitaux privés ont reçu d'Obama l'engagement très précis qu'il n'y aurait aucune tentative de réglementer leurs prix pendant les dix prochaines années. Les compagnies d'assurance ont reçu la promesse qu'aucune assurance médicale publique ne serait mise en place pour leur faire concurrence.
En fait, même pour son programme « phare » de politique intérieure, Obama a continué sur la voie que Bush avait tracée avec sa réforme de Medicare de 2003. Bush avait alors initié l'attaque sur le seul grand programme médical un peu collectif existant, Medicare, le faisant passer en partie dans le secteur privé, ce qui le rendait plus coûteux mais plus rentable pour le privé. Obama continue de saper les programmes médicaux publics, Medicare, Medicaid et les hôpitaux publics, au bénéfice du grand capital.
Une situation catastrophique
Pendant leur première année de gouvernement, les Démocrates ont imposé des politiques qui, d'une manière ou d'une autre, se sont attaquées à la classe ouvrière au profit des plus grands intérêts financiers du pays. Et cela dans une situation qui se dégradait de mois en mois.
La situation est vraiment devenue catastrophique. Au début de 2010, au moment de l'élection du Massachusetts, près de quinze millions de personnes étaient officiellement au chômage, auxquelles il faut ajouter près de neuf millions de salariés à temps partiel mais qui voudraient travailler à temps plein. Une vaste étude réalisée par la Northeastern University de Chicago constate que 30,2 millions de personnes étaient au chômage ou sous-employées à la fin de 2009. Depuis le crash de la fin de la Deuxième Guerre mondiale, les suppressions d'emplois n'ont jamais été aussi nombreuses et cela va durer. Près de neuf millions de personnes ont été au chômage pendant au moins la moitié de l'année, et beaucoup encore plus longtemps. Et un récent sondage Pew a révélé que 54 % des ménages avaient compté au moins une personne sans emploi dans le courant de l'année dernière.
Les pertes d'emploi sont concentrées de façon très disproportionnée chez les travailleurs aux revenus les plus faibles. Les ménages dont le revenu est inférieur à 12 500 dollars (10 000 euros) par an ont un taux de chômage de 30 %. Et le chômage est concentré de façon disproportionnée chez les travailleurs manuels. L'étude de la Northeastern University constate que, fin 2009, pour chaque offre d'emploi dans le bâtiment, il y avait 24 travailleurs du bâtiment au chômage. Pour chaque offre d'emploi dans le secteur de production des biens durables, il y avait 17 demandeurs d'emploi et dans celui des biens de consommation courante, 12. Et la course à une productivité de plus en plus grande se traduit par de plus en plus de suppressions d'emplois, même quand la production reprend un peu.
Tous les indicateurs reflètent les conséquences de ce chômage persistant. En 2008, pour la première fois en cinq ans, et de nouveau en 2009, l'armée a réussi à atteindre ses objectifs de recrutement. Avec un chômage des jeunes adultes particulièrement important, cela n'est pas surprenant. Et depuis le licenciement des travailleurs immigrés des entreprises de construction, où ils étaient très concentrés, il n'est pas non plus surprenant que les grandes entreprises agroalimentaires soient submergées de citadins prêts à se mettre au travail des champs. En fait, pour la première fois depuis des années, les champs ont attiré un nombre notable de non-immigrants. Enfin, les prisons sont pleines à craquer : aujourd'hui près d'un pour cent de la population adulte pourrit en prison, le taux le plus élevé d'incarcération dans le monde. Si on additionne tous les prisonniers et ceux qui sont sous contrôle judiciaire, 7,3 millions d'adultes sont dans l'étau du système judiciaire, soit 3,2 % de la population adulte, de loin le taux le plus élevé du monde, six fois plus élevé qu'en Grande-Bretagne ou en Chine, douze fois plus qu'au Japon.
Pour la première fois depuis la Grande Dépression, les entreprises diminuent ouvertement les salaires, en plus des habituelles réductions de salaires résultant de l'inflation. Beaucoup de ces diminutions de salaires ont pris la forme de jours chômés non payés. D'autres, plus nombreuses, ont pris la forme de salaires ou d'avantages sociaux à deux vitesses, comme dans l'automobile, où les salaires des nouveaux embauchés sont presque divisés par deux. Des réductions qui ne touchent pas directement les travailleurs les plus anciens, mais la moitié des 250 plus grands employeurs ont admis lors d'un récent sondage qu'ils avaient déjà réduit les salaires ou avantages sociaux des travailleurs en place ou qu'ils en avaient l'intention.
Pour payer beaucoup moins la nouvelle génération de travailleurs, les entreprises, les États, les villes et les conseils scolaires s'efforcent bien souvent de se débarrasser des travailleurs les plus âgés ayant trop d'ancienneté. Nous commençons tout juste à en voir le résultat : des travailleurs de 55 ou 60 ans qui avaient pris une retraite anticipée, appâtés par le paiement immédiat de la totalité de leur retraite à leur départ, et qui ont découvert après un an ou deux que leurs revenus étaient insuffisants pour subvenir à leurs besoins, tentent de revenir sur le marché du travail. Les travailleurs plus âgés, poussés par les défaillances du système fédéral des retraites, tentent de rentrer à nouveau sur le marché du travail. La quantité de gens âgés de 70 ans qui prennent les commandes chez McDonald's est un des rappels les plus choquants de la catastrophe humaine engendrée par cette crise.
La crise du logement continue de s'aggraver. Près d'un quart des propriétaires américains ayant une hypothèque sont « sous l'eau », autrement dit, ils doivent plus que la valeur de leur maison. Au Nevada, cette proportion dépasse cinquante pour cent, et les États de l'Arizona, de la Floride, de la Californie et du Michigan ne sont pas loin derrière. Selon Realty Trac, la base en ligne des saisies immobilières, 2,8 millions de foyers étaient sous le coup d'une procédure de saisie en 2009, soit plus du double qu'en 2007. Dans l'ensemble du pays, une maison ou un appartement sur neuf est vacant, après saisie ou en l'absence d'acheteurs, tandis que 3,5 millions de personnes ont probablement été sans abri à un moment ou l'autre de l'année. En fait, cette estimation des sans-abri provient de sondages effectués en 2007, avant que le pire de la crise n'arrive, et doit clairement sous-estimer le problème actuel.
Dans des villes industrielles comme Detroit, il n'est pas exagéré de dire que la situation générale est catastrophique. Lorsque les formulaires de demandes d'aide d'urgence ont été distribués en octobre dernier, plus de 100 000 personnes ont fait la queue pendant trois jours pour avoir une chance d'obtenir l'une des 3 400 allocations distribuées.
Une extrême droite revancharde
Dans cette situation de plus en plus grave, amplifiée par les politiques des Démocrates et des Républicains, les organisations d'extrême droite ont pratiquement été les seules forces organisées de quelque importance à s'exprimer. La plupart des mouvements récemment réapparus viennent des couches sociales qui soutiennent traditionnellement les causes réactionnaires de la droite, comme par exemple les campagnes contre l'avortement, la « décadence morale » ou le fédéralisme. Par ses dénonciations coléreuses et sa rhétorique populiste, l'extrême droite a été en mesure de toucher la colère couvant dans de grandes parties de la population, y compris de la classe ouvrière.
Il est significatif que la droite, et pas seulement ni même essentiellement le Parti Républicain, ait été en mesure de rassembler plusieurs manifestations importantes contre Obama, et contre sa réforme du système de santé, tandis qu'Obama, demandant vaguement un soutien, n'a rien réussi de comparable. Certes, Obama aurait pu rassembler beaucoup plus de monde, ne serait-ce qu'avec les appareils du parti Démocrate et des syndicats. Mais tout appel à venir soutenir la réforme du système de santé aurait pu ouvrir la porte à des discussions sur le contenu de la réforme en question.
La campagne de près d'un an des Démocrates pour la prétendue réforme du système de santé a offert une belle ouverture à l'extrême droite. Il y avait une certaine hostilité au projet de loi, et pas seulement parmi les crétins patriotes de la droite typique, qui prétendent que le système médical américain est le meilleur du monde ou parmi ceux à qui l'on a fait croire que les dépenses consacrées aux programmes sociaux avaient créé le déficit budgétaire. De nombreux travailleurs retraités dépendant de Medicare ont été très inquiets, et avec raison apparemment, craignant que le projet de loi ne contienne une réduction de leur couverture médicale. Beaucoup de ceux qui continuent aujourd'hui d'avoir une couverture médicale par leur employeur ont été pris de colère quand ils ont appris que cet avantage social pourrait être soumis à une taxe de 40 %. Et puis, il y avait tout simplement des soupçons de la part de ceux qui ne savaient pas ce que cachait la gigantesque pagaille provoquée au Congrès. Très peu de travailleurs semblent convaincus que la réforme permettra de résoudre le problème des soins médicaux pour tous, même si la plupart disent, y compris aux sondeurs, qu'ils croient que tout le monde devrait être couvert. Mais la réponse la plus fréquemment entendue pendant cette opération de longue haleine a été : Pourquoi Barack Obama s'occupe-il de cela maintenant ? Pourquoi le gouvernement ne se concentre-t-il pas sur les problèmes de l'emploi ?
L'extrême droite a pu miser sur cette inquiétude et cette suspicion, surtout parce que les syndicats, nombreux à avoir critiqué le projet de loi, n'ont jamais fait aucun effort pour aller dans les réunions publiques où le projet de loi a été discuté à l'automne dernier, ni pour organiser leur propres réunions sur la question. Ils auraient pu expliquer les multiples défauts du projet, dont ils étaient bien conscients. Mais ils ne l'ont pas fait. Ils ne voulaient pas critiquer ouvertement Obama et les Démocrates. Ils n'ont pas non plus défendu comme alternative la proposition pour laquelle un certain nombre d'entre eux avaient fait campagne pendant des années, celle d'un système public dans lequel le gouvernement perçoit les cotisations et rembourse les prestataires médicaux, éliminant ainsi les bénéfices des sociétés d'assurance et les frais administratifs excédentaires. Défendre leur propre programme aurait pu gêner Obama, qui défendait une réforme dans l'intérêt des grands groupes d'assurance, des laboratoires pharmaceutiques et des hôpitaux privés.
C'est ainsi que l'extrême droite a pu bénéficier de son opposition à cette réforme. Et elle se sert de cette ouverture pour détourner la colère populaire vers toute une série de causes réactionnaires : dénonçant les immigrants, jouant sur les attitudes racistes, attaquant les médecins qui pratiquent des avortements, etc., et, bien sûr, semant la confusion, par exemple, en dénonçant le renflouement des banques comme du socialisme ou prétendant que les déficits budgétaires énormes sont la conséquence de programmes sociaux ruineux.
Les Républicains, sentant une opportunité électorale, ont mis en place un front solide contre le projet de loi, espérant ainsi faire revivre leur base de fondamentalistes chrétiens qui avait été terrassée par les élections de 2008. Ils ont brandi la peur des « pannels de la mort »[[Des commissions qui choisiraient ceux qui pourraient bénéficier de certains soins]], dénoncé « la prise de contrôle de Medicare par le gouvernement » et le « tout-État » en général, et s'affichant comme le « parti du NON » !
Les Démocrates, pour ne pas être en reste, ont joué leurs propres cartes réactionnaires à l'occasion de ce projet de loi, interdisant l'utilisation des fonds publics pour les avortements ou pour couvrir les soins médicaux des sans-papiers. Obama, rien que pour conforter cette soumission écœurante à des préjugés réactionnaires, a émis un décret exigeant que les fonds publics ne soient pas utilisés pour les avortements. Et à plusieurs reprises, il s'est donné beaucoup de mal pour expliquer que les immigrants ne bénéficieraient d'aucune couverture médicale.
Si nous pouvons en juger par les récents sondages, les partisans des « Tea party » sont plus issus des classes moyennes que de la classe ouvrière ; ils ont un revenu légèrement supérieur à la moyenne, ils sont un peu plus susceptibles d'avoir un diplôme universitaire, et moins susceptibles d'avoir été licenciés, même s'ils ont peur de perdre leur emploi. En d'autres termes, ils appartiennent aux traditionnelles couches inférieures de la classe moyenne qui composent généralement les mouvements de droite, imprégnés d'idéologie individualiste.
Mais il n'y a pas que cela derrière la croissance de l'extrême droite. Le Parti démocrate a joué un grand rôle en poussant vers elle un certain nombre de travailleurs en colère. Nous sommes aujourd'hui confrontés à une situation presque classique : c'est que les Démocrates, c'est-à-dire ce qui passe pour la gauche dans ce pays sans gauche, se chargent d'imposer les sacrifices à la classe ouvrière et aux autres couches de la population, tandis que la droite met un masque populiste et s'adresse à la colère grandissante de la population, mais seulement pour tourner cette colère contre la classe ouvrière et contre les victimes de la société capitaliste.
La montée de l'extrême droite comporte un vrai danger potentiel pour la classe ouvrière. Les milices, pour la plupart de petits groupes d'hommes qui se baladent dans les bois avec leurs armes, ne sont certainement pas des troupes d'assaut. Mais cette montée de l'extrême droite s'est accompagnée d'une augmentation de la violence contre les victimes de la société, et d'abord, contre les immigrés. Dans le Sud-Ouest, en particulier, les immigrés se retrouvent dans la ligne de mire, et parfois littéralement, des forces de l'extrême droite, y compris celles organisées par les shérifs des petites villes qui s'impatientent devant la lenteur du gouvernement fédéral pour expulser les immigrés. Mais des attaques similaires sont venues de la police, par exemple dans les banlieues autour de Chicago où vivent maintenant un grand nombre d'immigrés.
Les femmes et le personnel médical à leur service ont également fait les frais de la violence, attaqués par des enragés, des moralistes autoproclamés anti-avortement qui prétendent « mener à bien l'œuvre de Dieu » pour empêcher la mort de, selon leurs propres termes, « celui qui n'est pas né ». En fait, depuis des décennies, les femmes ont été les principales cibles de ce fondamentalisme religieux américain.
Avec l'essor de l'extrême droite, la population noire a toutes les raisons d'être inquiète car l'histoire américaine est remplie de mouvements de colère des voyous de droite racistes visant les Noirs. Et cette leçon de l'histoire est confirmée par le racisme ouvert des discours de nombreux porte-parole de la droite aujourd'hui. Le fait que la critique contre Obama prenne une tournure ouvertement raciste et qu'elle s'exprime dans un langage débordant de menaces de violence contre sa personne fait que la population noire se sent menacée. Sur ce plan, la fidélité de la communauté noire à l'égard d'Obama pourrait bien se renforcer, même si un nombre important et croissant de travailleurs noirs en ont assez de sa politique.
Les syndicats, seules organisations de la classe ouvrière, se retrouvent invectivés par cette extrême droite pour toutes sortes de crimes : malheureusement, pas les crimes de leurs dirigeants qui imposent à leurs membres les sacrifices et le soutien aux Démocrates, mais pour les rares tentatives qu'ils font pour défendre le niveau de vie de leurs membres.
L'absence d'organisation de la classe ouvrière pour contrer le danger de l'extrême droite
La classe ouvrière, confrontée à cet essor d'un mouvement populiste d'extrême droite, est désarmée parce qu'elle ne possède pas d'organisation importante lui permettant vraiment d'exprimer sa colère, pas d'organisation qui l'appelle à se mobiliser pour se défendre et se battre pour ses propres intérêts.
Ce n'est certainement pas le rôle joué par les directions officielles des syndicats, qui ont travaillé au cours de cette période à défendre Obama, les gouverneurs et les maires démocrates, et à aider les patrons à extorquer de plus en plus de sacrifices aux travailleurs.
Ce n'est certainement pas non plus celui des organisations noires : l'objectif principal de la plupart d'entre elles a également été de soutenir Obama, alors même qu'Obama ignore ouvertement les problèmes soulevés par le racisme dans la société. Quand il s'attaque aux problèmes de l'appauvrissement plus important dans la population noire, il renforce les pires préjugés racistes, exhortant les Noirs à changer leur comportement et leurs habitudes, comme si leur comportement était la cause de leur pauvreté.
Et il ne fait aucun doute que les principales organisations d'immigrés et de femmes continuent de s'aligner derrière Obama, comme s'il n'y avait pas d'autre choix, même au beau milieu des attaques menées par son gouvernement.
Même l'extrême gauche, si minuscule soit-elle, s'est en partie rangée derrière Obama ou derrière l'aile traditionnellement la plus libérale du Parti démocrate comme celle de John Conyers : directement, comme le PC, ou indirectement ou implicitement, comme Against the Current et Labor Notes, qui relaient l'appel d'Obama aux « investissements verts », prônant les « investissements verts » comme solution au chômage dans l'industrie automobile alors qu' ils ne sont qu'un prétexte pour accorder des allégements fiscaux aux entreprises. Une partie de cette extrême gauche s'active à des tâches comme la réussite du dernier Forum social américain, qui noie la vraie catastrophe sociale produit du capitalisme dans un méli-mélo de questions à la mode, faisant disparaître les intérêts distincts de la classe ouvrière parmi ceux des autres couches de la société.
En ce qui concerne les syndicats, les seules organisations de la classe ouvrière - celle-ci n'a depuis longtemps aucune expression politique dans ce pays -, il est évident que la syndicalisation baisse, diminuant à nouveau l'année dernière de trois quarts de million. En fait, la baisse chez les travailleurs du privé a été plus importante que cela, et seulement légèrement compensée par une petite augmentation de la syndicalisation dans le secteur public. Pour la première fois dans l'histoire des États-Unis, il y a plus de syndiqués dans les administrations fédérales, provinciales, municipales et dans les conseils scolaires que dans l'industrie privée. Cela reflète simplement le fait que très peu de travailleurs du secteur privé sont syndiqués aujourd'hui. Même dans le secteur public, les nouveaux syndiqués viennent de petits segments de la population, comme les assistants d'enseignement dans les universités, ou sont le résultat d'accords avec les États et les villes pour collecter les cotisations de parties très marginales de la population active, par exemple, les femmes payées par les États du Michigan, de l'Illinois et de Californie pour assurer chez elles la garderie de quelques enfants.
Il est moins évident, mais pourtant visible, qu'il y a eu quelques signes de révolte dans certains syndicats contre de nouveaux sacrifices. C'est peut-être chez Ford qu'on a vu les plus sérieux, mais pas les seuls. Des enseignants en Californie et ailleurs ont ouvertement essayé de résister à certaines attaques. Des ouvriers de la ville de Detroit et de l'État du Michigan ont tenté de s'opposer à la révision de leur contrat pour ne pas accepter de nouveaux sacrifices. Certes, ce n'est pas beaucoup. Mais c'est dans l'organisation de son opposition aux attaques que la classe ouvrière peut commencer à montrer sa force, et que les militants de la classe ouvrière peuvent acquérir l'influence nécessaire pour mener des combats plus importants.
Une montée du militantisme et des luttes à l'intérieur de la classe ouvrière pourrait rapidement changer l'atmosphère du pays, qui semble aujourd'hui s'être déplacé si loin vers la droite.
Mais le problème fondamental aujourd'hui est et reste l'absence d'un parti ouvrier révolutionnaire ou d'une organisation révolutionnaire des travailleurs assez largement implantée dans la classe ouvrière pour être un peu connue. Ce qui fait désespérément défaut à la classe ouvrière, c'est de faire entendre sa propre voix politique.
Il semble probable que la situation va continuer d'évoluer vers la polarisation que nous avons connue cette année. Et cela rend d'autant plus fondamental de se concentrer sur la construction de cette organisation révolutionnaire des travailleurs. Dans le même temps, la situation elle-même peut ouvrir la porte à sa construction rapide, mais seulement si les militants actifs s'en chargent et la gardent comme objectif essentiel et primordial.
15 avril 2010