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États-Unis - La classe ouvrière frappée de plein fouet par la crise
L'article ci-dessous, qui montre à quel point la classe ouvrière américaine est déjà frappée par la crise et surtout par la politique du patronat et du gouvernement qui veulent la lui faire payer, est une traduction d'un article publié par l'organisation trotskyste américaine Spark dans le numéro 62 de sa revue Class Struggle de mai-juin 2009.
Depuis le début de la crise économique, l'administration Bush puis l'administration Obama ont donné des milliards de dollars aux banques, compagnies financières et grandes entreprises, à l'occasion des multiples plans de sauvetage. Peu leur importe que ces mêmes entreprises soient à l'origine de la crise. Peu leur importe que, dans leur course folle au profit, elles se soient lancées dans une orgie sans précédent de spéculations et aient fait éclater des bulles financières de plus en plus grosses, qui avaient déjà aspiré les richesses durement créées par les travailleurs.
Aussi bien les administrations républicaines que démocrates ont prétendu la même chose : renflouer les grandes entreprises était vital pour ralentir et arrêter la chute de l'économie et sauver le maximum de gens de l'éventualité d'une dépression encore pire que la Grande dépression des années trente, avec chômage de masse, soupes populaires et la version actuelle des Hoovervilles (nom donné aux bidonvilles pendant la Grande dépression).
Des milliers de milliards de dollars plus tard, la chute de l'économie est de plus en plus sévère. Quant aux milliers de milliards de dollars des contribuables, ils constituent un très joli coussin au profit de la bourgeoisie et des titans de la finance pour qu'ils survivent mieux à la crise qu'ils ont eux-mêmes provoquée.
La situation des travailleurs est tout autre. Le gouvernement ne fait absolument rien pour les protéger des fléaux déchaînés par la crise : la crise immobilière, les suppressions d'emplois, les diminutions de salaire et d'allocations. Les politiciens taillent même dans la protection sociale fédérale, censée être le dernier recours contre l'indigence et la pire des misères, et cela juste au moment où elle est la plus nécessaire... prétendant que le déficit budgétaire grandissant ne leur laisse pas le choix.
La vérité, c'est que les politiciens puisent autant d'argent que possible dans les programmes sociaux, pour le remettre à la bourgeoisie !
Les patrons et les politiciens démocrates et républicains mènent une attaque concertée contre les travailleurs.
Les emplois frappés par la crise
L'attaque contre l'emploi a été une des plus dévastatrices, avec 5,1 millions d'emplois supprimés depuis le début de la récession en décembre 2007. De plus, le rythme des suppressions d'emplois s'accélère et avoisine les 650 000 par mois depuis octobre 2008.
Comme d'habitude, les patrons des entreprises du secteur secondaire, comprenant l'industrie des biens de consommation et le bâtiment, ont procédé aux licenciements les plus massifs, détruisant plus de 14 % des effectifs, soit plus de deux millions d'emplois. Les entreprises de service suppriment aussi des emplois, presque 3 %, les plus importantes suppressions que ce secteur ait connues en plus d'un demi-siècle. Le secteur financier a supprimé 233 000 emplois, un nouveau record.
Même les emplois servant traditionnellement de position de repli aux chômeurs, dans la vente au détail, les restaurants, les services après vente, l'intérim, deviennent rares. Les détaillants ont procédé aux plus importantes suppressions d'emplois depuis le début de la collecte des données par le gouvernement en 1939. Le secteur commercial, détaillants, vente en gros, transports et stockage, a supprimé plus d'un million d'emplois. Le secteur de l'intérim a supprimé 840 000 emplois, également un record.
Enfin, des emplois autrefois sûrs, dans les bureaux de poste, la santé et les administrations publiques, sont eux aussi supprimés.
Chaque fois qu'un patron supprime des emplois, il contribue à la baisse de la demande globale de produits et services, et conduit les patrons à supprimer encore plus d'emplois, créant le cercle vicieux qui transforme une récession en dépression.
Un indice montre à quel point la situation de l'emploi est devenue critique : pour la première fois depuis que les guerres d'Afghanistan et d'Irak se sont transformées en bourbier sanglant, il y après de six ans, les recruteurs militaires n'ont eu aucun mal à dépasser leurs quotas.
Autre indice : le secteur de l'agrobusiness signale pour la première fois n'avoir pas eu de mal à recruter des salariés agricoles. Les millions de travailleurs immigrés qui ont commencé à travailler dans ce pays comme main-d'oeuvre agricole, avaient fini par trouver de meilleurs salaires et de meilleures conditions dans le bâtiment, la restauration et l'industrie. Maintenant que ces emplois ont disparu, beaucoup d'immigrés sont forcés de retourner dans les champs, avec les mêmes conditions et les mêmes salaires de misère qu'autrefois.
Le manque d'emplois force aussi les immigrés à retourner dans leur pays, bien que la pauvreté qui les avait poussés à partir n'ait fait que s'aggraver.
Les hauts fonctionnaires américains sont forcés d'admettre que les chiffres du chômage sont mauvais. Bien significatif est ce commentaire de la présidente de l'Assemblée des conseillers économiques d'Obama, Christina Romer, le 9 mars dernier : « Le chômage aux États-Unis a atteint 8,1 % [en février], un chiffre terrible qui signifie pour des millions de familles américaines une tragédie destructrice. Mais, au pire moment de 1930, il atteignait presque 25 % ».
Certes, le chômage n'est certainement pas aussi important qu'au plus fort de la Grande dépression. Il n'a pas atteint les niveaux de 1933. Mais il pourrait avoir déjà atteint ceux de 1930 et de 1931, première phase de la dépression.
Le taux de chômage officiel de 8,1 % en février (en mars il a atteint 8,5 %) cité par Christina Romer est incomplet et trompeur. Même le gouvernement le reconnaît, puisque que le Bureau américain des statistiques du travail produit aussi un décompte plus large des chômeurs qui comprend en plus une partie de ceux qui ont renoncé à chercher un emploi, mais qui en désirent toujours un, et ceux qui travaillent à temps partiel non choisi et qui veulent un travail à temps plein. Si on fait l'addition, le chômage et le sous-emploi atteignent 16 % ou 25 millions de travailleurs fin mars. Ces chiffres-là, plus mauvais, reçoivent évidemment beaucoup moins de publicité.
Mais le chômage réel est encore pire. Si le taux de chômage était calculé comme il l'était avant que l'administration Clinton manipule la façon de le calculer en écartant du calcul des millions de chômeurs, il serait encore plus élevé. Quelques économistes, comme John Williams du Shadow Government Statistics [une équipe qui dénonce les manipulations des statistiques gouvernementales], estiment qu'en appliquant les critères précédents le taux de chômage a atteint 20 % en mars, soit un travailleur sur cinq.
Par ailleurs, des pans entiers de la classe ouvrière, écartés de l'emploi, n'apparaissent jamais dans les statistiques du gouvernement. Il s'agit de ceux qui ont pris leur retraite prématurément ou sont en invalidité parce que leur employeur les y a contraints. D'autres sont maintenant à leur compte, mais n'ont pas ou très peu de revenus, souvent ils travaillent au noir. Il y a aussi les 2,3 millions de gens (1 % de la population adulte) qui pourrissent dans les geôles et les prisons de ce pays, où, de loin, le taux d'emprisonnement est le plus élevé du monde. Et enfin, parquer les chômeurs dans l'armée, qui comprend aujourd'hui presque 1,5 million de membres, cache aussi l'extension réelle du chômage.
Ainsi, des dizaines de millions de gens capables et désireux de travailler sont exclus d'une façon ou d'une autre ; mais ils n'apparaissent nulle part dans les statistiques officielles. Ils sont invisibles pour le gouvernement, qui cache l'extension réelle de cette tragédie humaine et ce gaspillage de potentiel économique.
Faire plus de profits avec moins de travailleurs
L'augmentation du chômage est une des conséquences des efforts des patrons pour diminuer les coûts du travail, c'est-à-dire forcer moins de travailleurs à produire toujours plus.
Avec l'arrivée de la crise économique, les entreprises encore rentables ont réduit les emplois pour anticiper une baisse d'activité. En général, les entreprises américaines suppriment les emplois plus rapidement que l'économie ne se contracte. En conséquence, la productivité du travail a fait un bond de 3,2 % au dernier trimestre 2008 et elle a augmenté de 2,8 % pour l'année entière. « C'est beaucoup dans une économie en expansion. Dans une sévère récession, c'est pratiquement un miracle », commentait le Wall Street Journal du 5 février.
On n'a pratiquement jamais vu une telle augmentation de la productivité au milieu d'une contraction économique aussi sévère. Chute de la production, suppressions de services, énorme capacité excédentaire, fermetures d'entreprises, bouleversements dans la production et la distribution, tous ces dysfonctionnements aboutissent à un manque d'efficacité qui provoque traditionnellement une chute de la productivité pendant les récessions. L'augmentation de productivité lors de la récession actuelle ne peut avoir été imposée que grâce à une attaque impitoyable contre les travailleurs.
Il y a longtemps que les entreprises réussissent à produire plus avec moins de travailleurs. Dans le secteur industriel, de 1973 à 1975, l'augmentation moyenne annuelle de la productivité était de 2,7 %, un taux élevé. Puis de ce niveau déjà élevé, entre 1995 et 2007, la productivité a bondi de 4,1 % par an, un taux phénoménal. « La productivité dans l'industrie a augmenté d'environ un tiers depuis 2000 », selon un rapport du Bureau du budget du Congrès américain publié en décembre 2008. Dans le secteur des services, la productivité a aussi augmenté, mais pas aussi spectaculairement.
Tandis que les patrons jettent des millions de travailleurs à la rue, ils poussent ceux qui restent au travail à travailler de plus en plus dur.
Quand la crise frappe, la machine à supprimer des emplois met les bouchées doubles.
Les diminutions de salaire
Avec la menace de licenciements massifs suspendue au-dessus de la tête des travailleurs, les patrons en sont arrivés à diminuer carrément les salaires. Dans une enquête nationale parue fin janvier, le cabinet de ressources humaines, Watson Wyatt, indique que près de la moitié des 245 plus grands employeurs ont gelé ou diminué les salaires. Quelques grandes entreprises, dont FedEx, Hewlett Packard, Motorola, YCL Trucking, le New York Times et le Boston Globe, ont imposé des réductions de salaire générales.
Aujourd'hui, les baisses de salaire les plus importantes sont imposées aux 160 000 travailleurs de l'automobile qui sont encore chez General Motors, Chrysler et Ford. Au cours des deux dernières années, les compagnies automobiles ont déjà mis en place des salaires à deux vitesses, les salaires d'embauche représentant la moitié du salaire des travailleurs en activité. Maintenant, avec le soutien des gouvernements de Bush et d'Obama, les patrons de l'automobile essaient d'imposer aussi à l'ensemble de leurs salariés des salaires réduits. Les salaires des travailleurs de l'automobile étaient les plus élevés de l'industrie, mais on est en train de les abaisser à des niveaux comparables à ceux des employés des services.
Les patrons ont également procédé à des diminutions de salaire moins visibles, en supprimant le paiement de jours fériés, en réduisant les congés, en réduisant les temps de pauses, en changeant les règles de paiement des heures supplémentaires et des primes, en supprimant l'indexation des salaires sur les prix. D'autres patrons, chez Dell Computer, les casinos du Nevada, Honda Auto, Cisco Systems et le Seattle Times, ont imposé des jours non travaillés et non payés, au volontariat ou pas.
Ces journées de congés non payés ne sont pas une nouveauté au niveau gouvernemental. L'État du Michigan les a introduites il y plusieurs années. Mais au cours des derniers mois, une myriade d'organismes gouvernementaux les a mises en place, à commencer par l'État le plus vaste, celui de Californie. Il y a aussi des comtés, de celui de Ventura en Californie du Sud à celui de Nassau sur Long Island dans l'État de New York, qui imposent de tels congés. Les employeurs gouvernementaux ont également diminué le paiement des jours fériés, ont réduit les vacances, les temps de pause, etc.
Les salaires des travailleurs baissent depuis des décennies. Mesuré en dollars de 1982, le salaire horaire moyen des ouvriers américains du secteur privé a été abaissé à 8,27 dollars (6,36 euros) en 2008, 9 % de moins que le maximum atteint en 1973, il y a 35 ans. En limitant les augmentations de salaire, les patrons laissent l'inflation éroder petit à petit le pouvoir d'achat des travailleurs.
Cette érosion est bien pire que ce qu'indiquent les statistiques officielles puisqu'il est généralement reconnu que les statistiques gouvernementales sur l'inflation sous-estiment intentionnellement et systématiquement le taux réel d'inflation. Le milliardaire Bill Gross, qui gère des portefeuilles d'obligations, appelle les fausses statistiques sur l'inflation « une supercherie ». L'éditorialiste de Bloomberg News, John Wasik, les définit comme « un témoignage de l'art de la confusion économique ». Et Kevin Philips, le commentateur politique et économique, estime que la falsification des statistiques officielles de l'inflation fait économiser au gouvernement fédéral 250 milliards de dollars par an, en diminuant les réajustements liés à la hausse officielle des prix pour les pensions versées par le système fédéral de retraites et pour celles que l'État verse en tant qu'employeur.
Ainsi, même les travailleurs aisés, dont les contrats prévoient une meilleure indexation de leurs salaires sur les prix, sont tout de même volés par le biais de cette dissimulation de l'inflation.
La grosse différence dans la situation actuelle est que, pour la première fois depuis la Grande dépression, les patrons diminuent carrément les salaires à une grande échelle.
Les pensions sur le billot
Les patrons taillent aussi dans les autres rémunérations, y compris les pensions de retraite.
Déjà en 2006, avant le choc de la crise, la majorité des travailleurs, 57 %, n'avait aucun plan de retraite. 30 % seulement avaient un plan de retraite appelé « 401(k) », mais sans garantie quant au montant de la pension, le genre de plan de retraite que les patrons ont utilisé pour remplacer les retraites d'entreprises traditionnelles. Et seuls 13 % des travailleurs bénéficiaient encore de ces retraites d'entreprise traditionnelles qui seules garantissaient le montant mensuel de la pension.
Les plans 401(k) ont toujours été très suspects, étant donné que les patrons les ont utilisés comme prétexte pour se dégager de la responsabilité de verser des pensions de retraite à leurs salariés. L'argent que les travailleurs mettent dans ces plans 401(k) a toujours été placé sous le contrôle des patrons qui ont choisi des sociétés financières de Wall Street, des fonds communs de placement et des sociétés d'assurances pour gérer l'argent, et qui ont limité les choix de placements offerts aux salariés à des fonds coûteux et peu performants. Lors d'une audition au Congrès en février, le secteur des fonds communs de placement a été qualifié de « la plus grande opération de malversation de l'histoire ». Donner aux courtiers la charge de gérer les fonds mis dans les 401(k) revient à confier la garde du poulailler au renard.
En 2007, en moyenne, la valeur des placements dans les 401(k) ne représentait que 45 000 dollars par travailleur, guère plus qu'une année ou deux de retraite. Fin 2008, une bonne part s'était évaporée. En premier lieu, le flux d'épargne s'était en grande partie tari, quand quelques-unes des plus grandes entreprises américaines, dont Eastman Kodak, Motorola, FedEx, General Motors et Ford, ont cessé d'abonder les sommes mises par une partie ou par l'ensemble de leurs salariés. Même l'AARP (Association des personnes retraitées) l'a fait. Lorsque la Bourse s'est ensuite écroulée, elle a entraîné dans sa chute 50 % de la valeur des 401(k), environ mille milliards de dollars. Enfin, beaucoup de travailleurs à court d'argent ont « emprunté » une partie de l'argent placé sur leur compte en payant de fortes pénalités.
Les fonds de pension traditionnels en ont pris aussi un sérieux coup quand le marché financier a implosé l'année dernière, perdant près de cinq cents milliards de dollars. Leur niveau de capitalisation n'est désormais que de 75 % de la valeur de référence officielle. Bien sûr, les employeurs ne mettent jamais assez d'argent de côté pour tenir leurs engagements. Pour compenser en partie ce manque de financement, les patrons ont placé l'argent des retraites sur le marché des actions, des obligations, dans des actions non cotées, dans des fonds spéculatifs et le boom de l'immobilier. L'éclatement des bulles financières a révélé le véritable état des fonds de pension.
Parfois cette diminution des fonds de pension va plus loin que de simples pertes dans les placements. Par exemple, en une année, GM a puisé dans son fonds de pension 21 milliards de dollars. En plus de cela, le fonds a perdu 11,3 milliards sur ses placements. Cette perte totale de 32,4 milliards de dollars en un an signifie que le fonds de pension de GM est parti d'un surplus de 20 milliards de dollars fin 2007 pour arriver à 12,4 milliards de dollars de déficit fin 2008.
Quelques-unes des plus grandes entreprises du pays ont eu recours au dépôt de bilan pour se décharger de leur plan de pension sur l'organisme qui garantit le paiement des retraites des entreprises en faillite (Pension Benefit Guaranty Corporation). Le résultat est une diminution du montant des pensions des retraités et l'impossibilité de continuer à alimenter les plans pour la future retraite des salariés en activité. Certaines des plus grandes entreprises ont choisi cette solution depuis 2000 : United Airlines, Delta Air Lines, Bethlehem Steel, US Aiways, LTV Steel, National Steel, TWA, Weirton Steel et Kaiser Aluminium. D'autres entreprises, comme Verizon et IBM, ont exclu les nouveaux embauchés des plans de pension existant dans l'entreprise.
Les fonds de pension publics pour ceux qui travaillent pour le gouvernement sont pires. Selon le Centre des droits des retraités, le gouvernement fédéral et les gouvernements locaux ne mettent de côté que 20 % de ce qui serait nécessaire pour financer leurs engagements envers les retraités. Des placements très spéculatifs sont souvent faits pour compenser une partie de l'écart. Les officiels proclament qu'à la limite l'augmentation des impôts pourrait combler l'écart et permettre de payer les pensions. Mais, maintenant que ces placements se sont révélés désastreux, que les déficits publics montent en flèche, les États et les organismes locaux concernés crient qu'ils sont « fauchés », déchirant leurs promesses aux retraités et diminuant d'office les pensions. Ainsi, l'État du Wisconsin a annoncé qu'à partir de mai près de 500 000 retraités verraient leur pension diminuer d'au moins 2,1 %.
Une couverture médicale en lambeaux
L'année dernière, quatre millions de travailleurs de plus - c'est-à-dire, en moyenne, 14 000 par jour - ont perdu l'assurance médicale que leur proposait jusque-là leur entreprise. S'ils se sont retrouvés dans cette situation, c'était souvent à la suite de la perte de leur emploi. Inutile de dire que la plupart de ceux qui ont ensuite retrouvé du travail n'ont pas retrouvé en même temps une assurance médicale ou alors on leur en offre, au mieux, une au rabais.
Avant la crise, le système de santé des États-Unis était déjà dans un état désastreux. Les États-Unis sont le seul pays du monde industrialisé où la couverture médicale est laissée à l'initiative de l'employeur. En 2007, une cinquantaine de millions de personnes n'avaient pas de couverture médicale. C'était le cas d'un salarié sur cinq. En 2006-2007, 87 millions de personnes se sont retrouvées à un moment ou à un autre sans couverture médicale. Cela a pour conséquence que même celui qui retrouve un travail dans une entreprise proposant une couverture médicale ne sera pas assuré pour la ou les maladies déjà déclarées. D'autre part, ceux qui restent assurés par l'assurance médicale de leur ancien employeur doivent payer eux-mêmes une part de plus en plus grande des soins médicaux. En dix ans, les primes payées par les employés ont plus que doublé, atteignant une moyenne de 3 354 dollars en 2008 - sans compter les franchises et les forfaits qui ont augmenté encore plus vite.
Le plus frappant aujourd'hui, c'est peut-être la volonté affirmée de ne plus inclure d'assurance médicale dans les systèmes de retraite. Les constructeurs automobiles s'en sont déjà débarrassés pour leurs employés de bureau à la retraite. Et pour faire subir le même sort aux travailleurs syndiqués, ils ont créé des fonds appelés VEBA, gérés par le syndicat et chargés de financer la couverture maladie des ouvriers retraités. Les administrations des États et des villes envisagent des mesures similaires. Certaines d'entre elles l'ont déjà imposé à tous les embauchés de ces dernières années.
Le prétexte de toutes ces réductions de la couverture médicale et de l'augmentation de la part payée par les salariés est, bien sûr, « l'envolée des frais médicaux ».
Mais cette « envolée » est avant tout due à celle des profits des différents secteurs de la santé. Les soins médicaux sont devenus une importante source de profits pour les compagnies d'assurances, les compagnies pharmaceutiques, les hôpitaux et autres prestataires de soins. Les assureurs, par exemple, récupèrent environ 30 cents sur chaque dollar dépensé pour des frais médicaux. La bureaucratie pléthorique des compagnies d'assurances cherche par tous les moyens à réduire la part qui va aux soins proprement dits et à garder le reste pour elle.
Il existe bien un plan COBRA, destiné aux travailleurs licenciés qui souhaitent garder leur ancienne assurance-santé. Et dans son plan de relance, Obama a inclus une subvention temporaire équivalente à 65 % du coût de l'adhésion au plan COBRA. Mais cette subvention risque de ne pas suffire. En effet, la hausse soudaine du coût des primes COBRA signifie que très peu de travailleurs sans emploi pourront payer les quelques centaines de dollars par mois nécessaires. Ce plan ne bénéficiera finalement qu'à une minorité d'employés financièrement aisés et encore, pendant quelques mois seulement, puisque la subvention n'est garantie que jusqu'à la fin de l'année.
Démanteler ce qui reste de la protection sociale
S'il perd son emploi, un travailleur aura bien du mal à échapper à la pauvreté. Près des deux tiers de ceux qui sont officiellement comptabilisés comme chômeurs n'ont droit à aucune prestation de chômage. Ce sont les pires chiffres depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Selon les statistiques du ministère du Travail, ceux qui touchent une allocation-chômage reçoivent en moyenne 35 % de leur ancien salaire. En 2007, l'allocation-chômage hebdomadaire moyenne pour l'ensemble du pays était de 262 dollars, c'est-à-dire près de 10 % de moins que le seuil de pauvreté pour un couple avec un enfant, selon le Census Bureau (Institut national des statistiques). Et ces allocations sont imposables ! En général, les impôts fédéraux et d'État représentent en moyenne 11 % de la somme versée aux chômeurs.
Au fil des ans, les hommes politiques ont réduit les indemnités-chômage en même temps que les États diminuaient les contributions patronales servant à financer l'assurance-chômage. Selon une étude publiée en 2001 pour le NELP (Projet de loi sur l'emploi), les exonérations fiscales et la diminution des taux d'imposition se sont traduites, entre 1994 et 2000, par des rentrées inférieures de 47 milliards de dollars pour le système d'assurance-chômage. Alors que la récession se faisait déjà sentir depuis des mois, plusieurs États comme le Texas, le Dakota du Sud et Hawaï ont continué à réduire la contribution chômage du patronat. L'État de l'Oregon a réduit l'impôt patronal pour financer l'assurance-chômage en mars 2009 !
Conséquence : de nombreux fonds d'État pour l'indemnisation des chômeurs ont déjà des problèmes de trésorerie. À la fin de 2008, huit États (Californie, Michigan, Kentucky, New York, Caroline du Nord, Caroline du Sud et Ohio) n'avaient plus rien dans leurs caisses d'assurance-chômage et empruntaient au gouvernement central pour pouvoir continuer à verser des indemnités aux chômeurs. Selon le NELP, il en sera de même pour les fonds d'indemnisation des chômeurs de la majorité des États au cours de l'année 2009.
Alors qu'on estime à 700 000 le nombre de travailleurs qui auront épuisé leurs droits à une indemnisation-chômage d'ici la fin de l'année, le Congrès a voté un allongement de la durée d'indemnisation pour les États particulièrement touchés par le chômage. Mais ce sont là des mesurettes provisoires, bien insuffisantes si on les compare au niveau du chômage. C'est encore plus vrai si l'on garde à l'esprit que près des deux tiers de ceux qui perdent leur emploi n'ont droit à rien du tout.
Que deviennent ceux qui ont épuisé leurs droits ? Pour les femmes et les enfants, il y a l'aide aux personnes défavorisées (welfare). Mais si le chômage atteint des chiffres record, le nombre de bénéficiaires de l'aide aux personnes défavorisées est, lui, resté le même. Selon le New York Times du 1er février, 18 États ont même réduit le nombre de bénéficiaires en 2008. Dans l'ensemble du pays, le nombre de personnes qui touchent cette aide est à son niveau le plus bas depuis plus de quarante ans - ou peu s'en faut. Plus choquant encore, dans l'État du Michigan, qui possède le taux de chômage le plus élevé du pays, le gouvernement a réduit la liste de bénéficiaires de cette aide de 13 % en 2008 ! Celui du Rhode Island, qui arrive en seconde position pour ce qui est du taux de chômage, a réussi, lui, à réduire de 17 % le nombre de ceux qui touchent les secours de l'État.
Ces réductions sont la conséquence directe de la réforme du système d'aide aux plus défavorisés entreprise sous le gouvernement Clinton en 1996 et dont on voit aujourd'hui toute la perversité. Cette prétendue réforme a transformé un système qui, depuis la Grande dépression des années trente, était considéré comme un droit (c'est-à-dire que tous ceux qui remplissaient les conditions touchaient cette aide de plein droit) en un système répondant seulement à des situations dites d'urgence, d'une durée totale de cinq ans maximum au cours de la vie du bénéficiaire. Au fil des années, plus des trois quarts des femmes et des enfants qui en bénéficiaient ont été éjectés du système.
C'était un système bancal, qui laissait beaucoup à désirer. Mais il faisait office de filet de sécurité pour des millions de femmes et d'enfants qui, aujourd'hui, en sont totalement privés.
Medicaid, l'assurance-maladie des personnes les plus pauvres (y compris des salariés), est elle aussi de plus en plus réduite. Dans la foulée de l'élection de novembre 2008, le gouvernement Bush - avec l'assentiment du Congrès à majorité démocrate et de la future équipe gouvernementale d'Obama - a pris des décrets autorisant pour la première fois les États à demander le versement d'un forfait pour les consultations ou les soins pris en charge par Medicaid. L'expérience montre que, s'ils doivent payer un forfait de 5 ou de 7 dollars, ceux qui vivent dans la misère ne se procurent pas les soins qui leur sont nécessaires et parfois vitaux. L'État de Californie s'est rué dans la brèche ouverte par Bush et a supprimé nombre de prestations existantes.
Les professionnels de la santé ont été horrifiés par les réductions de Medicaid et des dépenses de santé publique. « C'est sans précédent », a déclaré Elaine Ryan, vice-présidente de l'Association américaine des retraités (AARP). « Le recul est tel qu'il est inévitable que des gens en meurent », a affirmé le docteur Andrew P. Wilper, un médecin qui a publié l'an dernier une étude sur la situation dramatique des adultes sans assurance-maladie.
Le fait que 35 millions de personnes - plus du double qu'en 2000 - touchent aujourd'hui des bons d'alimentation montre bien que la pauvreté progresse à grands pas aux États-Unis. D'autant que ces bons d'alimentation couvrent maintenant une moindre proportion des besoins nutritifs d'une famille qu'avant 1996, date de la réforme de l'administration Clinton.
Réduire le déficit en s'en prenant aux retraites et à la santé des vieux travailleurs
Fin février, le président Obama a proposé qu'une commission élabore un plan de réduction du « déficit » de l'État - en s'attaquant prioritairement... au système fédéral de retraites (Social Security) et au programme Medicare, l'assurance-maladie pour les personnes âgées ou handicapées, alors que le système des retraites est la seule institution fédérale à dégager chaque année des bénéfices et qu'elle devrait continuer à le faire dans les années qui viennent. Le budget du système de retraites, ce sont d'énormes sommes d'argent qui échappent encore au pillage. De toute évidence, le gouvernement en place a l'intention d'y puiser plus largement qu'aucun autre gouvernement avant lui, afin de réduire son déficit.
L'intention n'est pas nouvelle. De Reagan à George W. Bush en passant par Clinton, tous les présidents ont tenté de réduire les dépenses du système de retraites. Mais chaque fois, ils se sont heurtés à la réaction hostile de l'électorat. De fait, pour les hommes politiques américains, la réforme de ce système a toujours été perçue comme une bombe à retardement à laquelle il valait mieux ne pas toucher.
Cependant, bien qu'ils n'aient pas réformé ouvertement le budget des retraites, les trois derniers présidents ont quand même réussi à en réduire les dépenses de façon détournée - en « révisant » le calcul de l'indice des prix à la consommation. Ils ont volontairement sous-estimé le taux d'inflation pour réduire les sommes à débourser au titre des réajustements liés aux variations du coût de la vie (COLA). Selon les estimations de John Williams, un économiste dont le site (Shadow Statistics) dénonce les mensonges des statistiques officielles, ces manipulations successives font que les sommes déboursées aujourd'hui pour les pensions de retraites ne financent plus que la moitié des pensions versées dans les années soixante-dix. C'est l'une des raisons qui font que la moyenne des pensions de retraite fédérales n'est plus que de 13 864 dollars par an (10 665 euros) - moins que le salaire minimum fédéral. De toute évidence, les pensions versées aujourd'hui couvrent une partie bien moindre des dépenses des retraités qu'il y a une quarantaine d'années.
Or, cette pension est la seule source de revenus d'une grande majorité de personnes âgées. Il n'est donc pas surprenant que de plus en plus de personnes âgées cherchent aujourd'hui un travail. En 2008, la catégorie des salariés âgés de 55 ans et plus toujours au travail était la seule à avoir augmenté - de 880 000 personnes, alors que le nombre total d'emplois s'effondrait ! Mais c'est par nécessité que ces travailleurs ont repris une activité, non par choix ! Aujourd'hui, les anciens font concurrence aux jeunes pour les emplois chez McDonald's.
La terrible inflation des coûts des soins médicaux a aussi réduit la valeur des prestations financées par le système Medicare. En 2006, les dépenses de santé à la charge du malade étaient de 14,1 % du total des dépenses des ménages bénéficiant de Medicare, ce qui en faisait le poste le plus important de leur budget après le loyer. Un ménage sur quatre bénéficiant de Medicare consacre plus du quart de ses revenus aux dépenses de santé. Medicare est un énorme programme gouvernemental qui dépense des centaines de millions de dollars au profit de certaines des entreprises les plus prospères du pays. Il sert de vache à lait pour toutes les entreprises du secteur de la santé : depuis les compagnies d'assurances qui sont rémunérées en tant que gestionnaires du système jusqu'aux compagnies pharmaceutiques, en passant par les hôpitaux et les cliniques - au détriment des personnes prises en charge par Medicare.
La politique d'Obama, qui consiste à s'en prendre maintenant au système de retraite et à Medicare pour payer la note du sauvetage des banques par les gouvernements Bush et Obama peut être résumée ainsi : affamer les vieux pour sauver les banquiers.
Crédit bancaire : le gâteau et la cerise sur le gâteau
Les banquiers, c'est « Prends l'oseille et tire-toi ». Quand l'État est intervenu pour sauver le système de la banqueroute, les banquiers ont pris l'argent... et ont recommencé de plus belle. Après avoir récupéré des milliards de dollars provenant des poches des contribuables, les grandes banques se sont octroyées un deuxième cadeau aux dépens des consommateurs en augmentant le taux de leur crédit et leurs marges comme jamais auparavant.
La Fed, la banque centrale des États-Unis, a réduit le taux auquel elle prête aux banques à zéro. En même temps, elle a avancé l'argent nécessaire pour empêcher la faillite des grandes banques. La banque JPMorganChase, la deuxième plus grande émettrice de cartes bancaires, a touché 25 milliards de dollars pour éviter la banqueroute et a aussitôt augmenté les frais des clients dont elle a décidé qu'ils constituaient un « risque » pour elle. Le nouveau taux qu'elle applique à ses clients « prime plus » (les plus solvables) est désormais de 26,99 % avec un plafond à 29,99 %. Citibank, qui a reçu 50 milliards de dollars de l'État et 2,3 milliards de l'assureur AIG, a fait grimper son taux à 29,99 %. Bank of America, qui a touché 45 milliards de dollars de l'État, plus 12 milliards d'AIG, opère à un taux de 27,99 %. Les frais encourus pour les découverts sur les comptes qui alimentent les cartes de crédit ordinaires atteignent eux aussi des records.
C'est ainsi que les banques et les organismes de crédit continuent à s'enrichir. Les revenus réels des ménages chutant avec la hausse des prix, ces banques et ces organismes de crédit à la consommation ont inondé la population de dizaines de cartes de crédit assorties de frais et de taux usuraires - cartes de crédit revolving, prêts sur salaire, location-vente, et autres arnaques dignes de la pyramide de Ponzi de Madoff.
Les sociétés de crédit ont écrasé les ménages américains sous des montagnes de dettes qui sont passées en moyenne de 90 % du revenu disponible en 1995 à 103 % en 2000, puis à 140 % en 2006. En 2007, le service de la dette des ménages (c'est-à-dire le paiement de l'intérêt et du principal) atteignait en moyenne 14 % du revenu disponible, un record historique. Bon nombre de ménages consacraient 20 % de leurs revenus au service de leur dette.
Quant aux hypothèques, elles pesaient encore plus lourdement sur la situation financière des ménages. Le gigantesque secteur financier qui s'était acoquiné avec les grandes entreprises du bâtiment et les sociétés immobilières a été à l'origine d'une spéculation sans frein qui a fait monter les prix de l'immobilier et incité les gens qui voulaient simplement avoir un toit sur la tête à accepter des prêts hypothécaires rapportant des profits obscènes ou des montages financiers plus douteux les uns que les autres..
Quand les prix de l'immobilier se sont effondrés, beaucoup de gens ont constaté que la dette liée à leur emprunt hypothécaire était supérieure à la valeur de la maison ou de l'appartement qu'ils avaient acheté. Certains n'ont guère eu d'autre choix que de quitter les lieux et de renvoyer les clés de la maison par la poste à leur banquier. Mais la crise de l'immobilier n'a pas fini de faire des victimes. N'oublions pas tous ceux qui perdent leur emploi ou qui sont contraints de travailler pour un salaire moindre qu'avant.
De plus en plus de ménages sont contraints de quitter leur logement. L'an dernier, plus de 2,3 millions de propriétaires ont été sous le coup d'une procédure de saisie - une augmentation de 81 % par rapport à 2007. Quelque 860 000 biens ont été effectivement saisis par les sociétés de crédit, soit plus du double qu'en 2007, selon l'Association des sociétés de prêts hypothécaires. Et la situation ne fait que s'aggraver. Au cours des deux premiers mois de 2009, le nombre de saisies a encore augmenté de 30 %.
Les premières victimes de la crise immobilière ont été les millions de personnes qui avaient accepté les formules que leur proposaient les vautours de la finance : prêts « à haut risque » (subprime), « à risque » (Alt-A) ou « à option » (qui permettent de ne rembourser dans un premier temps que les intérêts de la dette). À ces victimes vient aujourd'hui s'ajouter un nombre croissant de ménages ayant contracté des hypothèques « classiques ». En février, les ventes résultant de la saisie de maisons hypothéquées par des emprunteurs considérés auparavant comme solvables ont fait un bond de 86 %.
La presse a relativement peu parlé d'un autre phénomène révélateur : un tiers de ceux qui ont dû quitter leur domicile étaient locataires d'un appartement dont le propriétaire venait de faire l'objet d'une saisie. Ces locataires payaient régulièrement leur loyer mensuel, mais ils ont quand même été jetés à la rue - sauf quand des shérifs élus, comme ceux de Chicago (Illinois) ou de Flint (Michigan) ont refusé de prêter la main à certaines de ces expulsions.
Les quartiers ouvriers sont sinistrés. On y voit de plus en plus de maisons vides et donc... de plus en plus de vermine, de maladies et de criminalité.
Les sans-abri du 21e siècle
Le nombre de sans-abri s'accroît. Le gouvernement estime à près d'un million (842 000) le nombre de personnes qui n'ont pas de toit. Les villages de tentes poussent comme des champignons à la limite des villes et dans les quartiers défavorisés. Dans certaines villes particulièrement touchées par ce phénomène, comme Detroit, le nombre de sans-abri oscille entre 1 et 2 % de la population. Ils squattent souvent les immeubles devenus vacants en raison de la crise de l'immobilier.
Des millions d'autres personnes ne sont pas comptabilisées comme sans-abri, bien qu'elles en soient réduites à s'entasser dans des appartements ou des maisons réaménagés pour accueillir le double d'occupants ou à s'installer dans des garages (pratique interdite par la loi). D'innombrables personnes vivent dans des camping-cars et autres véhicules installés sur la place de parking attenante à la maison de membres de la famille ou d'amis, ou garés dans la rue et changés régulièrement d'endroit.
Les soupes populaires et autres cantines ambulantes sont prises d'assaut par des familles entières, jeunes et vieux, à la recherche de quoi manger et ne peuvent parfois assurer la distribution de repas qu'une semaine sur quatre.
Des millions de personnes sont menacées de se retrouver sans-abri dans un pays où un logement sur neuf reste vacant. Voilà qui résume à la fois le gaspillage éhonté qui caractérise le capitalisme ainsi que la force avec laquelle la population a été écrasée.
Pour maintenir leurs profits, les capitalistes ont entrepris de faire payer la crise par la population en supprimant des emplois, en réduisant les salaires et les prestations sociales, en demandant aux hommes politiques de liquider ce qui reste de la protection sociale et en chassant de plus en plus de ménages de leur domicile. Cette politique n'est pas seulement source de pauvreté et de misère. Elle renforce encore le cercle vicieux inhérent au système : devant le rétrécissement de la demande, les capitalistes qui veulent maintenir leurs profits suppriment de nouveaux emplois et réduisent encore les salaires. Il en est de même des saisies : le phénomène se nourrit lui-même.
Hier, la soif de profits toujours plus importants a créé des bulles spéculatives qui ont fini par éclater et entraîner une crise générale. Aujourd'hui, la même course effrénée au profit fait que la crise se répand comme la peste et ne cesse de s'aggraver.
Les politiciens et les dirigeants des grandes entreprises qui affirment qu'ils ne veulent que le bien des travailleurs et que, s'ils leur demandent de faire des sacrifices à court terme, c'est pour sortir le système de la crise, mentent effrontément.
La classe ouvrière ne peut que se préparer à résister. C'est pour elle une question de survie.
18 avril 2009