Conférence de presse de Nathalie Arthaud19/12/20112011Lutte de Classe/medias/mensuelnumero/images/2011/12/140.png.484x700_q85_box-7%2C0%2C590%2C843_crop_detail.jpg

Conférence de presse de Nathalie Arthaud

lundi 5 décembre 2011

[...] Comme tous les ans, une large part de notre congrès a été consacrée à la situation économique et politique, aussi bien en France qu'à l'échelle internationale.

Nous avons discuté sur la base de quatre textes d'orientation qui ont été soumis au vote : un texte sur la crise de l'économie capitaliste mondiale, un sur la situation politique internationale, un sur la situation intérieure et un sur la campagne électorale.

À l'échelle internationale, si les dirigeants politiques se préoccupent surtout des conséquences de la crise économique pour les capitalistes et pour leurs affaires, la crise a des conséquences dramatiques sur les peuples à l'échelle du monde, ne serait-ce que parce que la spéculation sur les matières premières et les produits alimentaires se poursuit, et c'est cela qui nous intéresse, nous.

Nous nous sommes aussi longuement attardés sur la nouvelle situation créée au sein de l'Union européenne par la crise, pour constater que l'UE ressemble de plus en plus à un protectorat franco-allemand auquel les pays moins riches d'Europe sont soumis. Les dirigeants allemands mais aussi français imposent leurs conditions à des degrés divers aux autres pays de la zone euro. Ils se sont même comportés vis-à-vis de la Grèce comme s'ils étaient en pays conquis.

Pour parler de l'actualité récente, nous avons été frappés par les réactions antiallemandes où Montebourg rivalise de bêtise nationaliste avec Marine Le Pen. Nous avons constaté comment on ment grossièrement à l'opinion publique. Alors que la crise incombe entièrement au capitalisme et à ses profiteurs, on nous dit un jour que c'est de la faute des Grecs. Le lendemain c'est de la faute des Italiens, jusqu'à ce que Berlusconi soit viré, et là depuis quelques jours c'est au tour de l'Allemagne d'être désignée comme responsable ! C'est un concert de mensonges, destiné à protéger et à cacher les véritables responsables que sont les capitalistes de la finance et de l'industrie.

Nous avons bien sûr pris du temps pour discuter de la situation politique en France, marquée par l'élection présidentielle et par les législatives.

Sur les législatives nous avons d'ailleurs pris une décision : celle de présenter des candidats LO dans un maximum de circonscriptions, et si possible dans toutes celles de la métropole. Pour nous ces législatives seront le prolongement d'une campagne commencée avec la présidentielle. Ces deux élections constituent une seule et même campagne et nous y défendrons le même programme.

Cette campagne se déroule dans un climat pesant marqué par la crise. Et le moins que l'on puisse dire c'est qu'aucun gouvernement, ni Obama ni Sarkozy ni Merkel, ne sait comment faire pour mettre fin à la crise.

Sarkozy, qui il y a trois ans jurait qu'il allait mettre au pas la finance et refonder le capitalisme, court aujourd'hui après les marchés financiers qui dictent leur loi.

De notre côté, cette crise et l'affolement général qu'elle déclenche chez ceux qui se veulent « l'élite dirigeante » nous confortent dans nos convictions de communistes révolutionnaires.

La société capitaliste est une maison de fous, où les crises sont déclenchées parce qu'il y a trop d'argent à un pôle de la société, parce qu'il y a trop de production par rapport à ce que la population peut acheter ! Ce trop-plein de richesses va dans la finance, dans la spéculation, et finit par étouffer toute l'économie ! Le capitalisme est une économie qui s'étouffe dans sa propre graisse. Oui, il est nécessaire de changer toute l'organisation sociale, de la réorganiser de fond en comble sans les lois du marché et du profit, sur des bases communistes.

Tous nos raisonnements, toute notre politique découlent de cette certitude.

Et c'est de ces convictions que découle bien sûr le programme de lutte que je vais défendre dans cette campagne.

Dans cette crise, les banquiers et les capitalistes ont les moyens de se protéger. Pour préserver leurs profits, ils aggravent l'exploitation, ils licencient, renvoient les intérimaires, les CDD. Ils ferment des usines. Même quand ils font de l'argent : c'est le cas de PSA, de Renault, des banques, d'ArcelorMittal, du groupe de presse Hersant... Je ne vais pas en faire la liste, je risquerais d'en oublier. Mais voilà comment la bourgeoisie se protège des effets de la crise de son propre système, en faisant payer les travailleurs.

Il faut ajouter à cela que cette même bourgeoisie, ces mêmes capitalistes de l'industrie et de la finance peuvent, en plus, compter sur la protection de l'État. Dans son discours de Toulon, Sarkozy a osé dire aux travailleurs tombés dans le chômage, aux travailleurs réduits aux Restaurants du cœur qu'il les a protégés ! Mais si Sarkozy a été un protecteur, cela a été pour la bourgeoisie !

Depuis plus de trois ans, le gouvernement fait de l'assistanat en grand pour les capitalistes et pour les banquiers. Les plans de sauvetage, les mesures extraordinaires, c'était pour protéger les banquiers et les industriels. Ils ont chacun eu droit à des milliards de cadeaux et c'est ce qui a fait exploser le niveau de la dette. Tous les dirigeants politiques qui nous parlent de la dette parlent de la dette de l'État, mais c'est la dette de la bourgeoisie et c'est à elle qu'il faut demander de rembourser.

Alors, nous n'aurons de cesse de dénoncer les plans de rigueur du gouvernement, qui racle les fonds de tiroir des familles populaires, des travailleurs, des malades, des retraités pour leur faire payer la note à la place de la bourgeoisie.

Et puis je dirai aux travailleurs qu'il n'y a pas à se faire d'illusion dans cette élection : l'alternance politique ne changera rien à la situation des classes populaires. Tous les gouvernements qui se sont succédé, qu'ils soient de gauche ou de droite, ont toujours laissé les patrons faire ce qu'ils voulaient, quand ils ne prenaient pas fait et cause pour eux. Ils ont toujours cherché en priorité à protéger les affaires des capitalistes.

Même si un gouvernement de gauche succède au gouvernement de droite, les travailleurs resteront seuls confrontés à leurs problèmes, au chômage, aux licenciements.

Alors, je dirai dans cette campagne que, pour se protéger, les travailleurs ne peuvent compter sur personne. Ils ne peuvent compter que sur eux-mêmes, que sur leurs luttes. Voilà pourquoi je ne présente pas un programme électoral mais un programme de lutte, un programme pour les luttes à venir des travailleurs.

Nous sommes convaincus que ces luttes viendront. Les attaques du patronat, le cynisme des dirigeants finiront par les provoquer.

Mais se battre, manifester, faire grève, cela ne suffit pas, il faut encore savoir pour quoi se battre, pour quels buts, avec quelle politique.

Les responsables politiques ont mille et une façons de détourner la colère des travailleurs. Aujourd'hui on assiste à une vaste campagne qui conduit à accuser les Grecs, les Italiens, les Chinois toujours... Regardez comment en quelques jours l'ennemi allemand héréditaire est revenu sur le devant de la scène ! Regardez comment Sarkozy nous a laissé entendre qu'en gros, pour sauver la Sécurité sociale, il faut mettre les étrangers à la porte !

S'il y a des millions de personnes dans la rue, les mêmes inventeront n'importe quoi pour emmener les luttes vers des voies de garage. Ils feront tout pour sauver la mise à la bourgeoisie.

Les dirigeants politiques savent pertinemment que le problème est la rapacité des banquiers, leur irresponsabilité vis-à-vis de la société, mais ce n'est pas à eux qu'ils s'en prennent. Les banquiers spéculateurs et les banquiers vautours ne sont accusés de rien, eux !

La seule question qui vaut pour la majorité de la population et pour la société, c'est : comment empêcher les banquiers de nuire ? Mais on nous amuse avec des questions du genre : faut-il ou non sortir de l'euro, faut-il ou non plus de fédéralisme européen ? Chacun fait de la surenchère autour de la souveraineté, chacun embouche à sa façon la trompette nationaliste, mais ils sont tous d'accord pour laisser la direction des affaires au grand capital, qu'il soit français, allemand ou européen.

Contre ce concert de mensonges destiné à tromper les travailleurs, nous voulons défendre une politique de classe. Nous voulons indiquer les responsables, qui sont les patrons licencieurs, les capitalistes de l'industrie et de la finance, les exploiteurs.

Dans cette campagne, je dirai que les travailleurs n'ont pas à se préoccuper de toutes les discussions au sommet sur l'organisation européenne, ils n'ont pas à se soucier des négociations de marchands de tapis entre Merkel et Sarkozy, ils doivent se soucier de leurs affaires, mettre en avant leurs intérêts à eux et se battre pour leur droit à l'existence.

Les travailleurs doivent se battre pour ce qu'ils ont d'essentiel : leur emploi et leur salaire.

Dans le programme de lutte que je défendrai, le premier objectif est d'imposer l'interdiction des licenciements et la répartition du travail entre tous les bras disponibles sans diminution de salaire. Si les commandes et l'activité diminuent du fait de la crise, il faut forcer le patronat à répartir le travail entre les travailleurs, qu'il baisse les cadences, diminue les horaires, mais qu'il garde tous les travailleurs, tous les intérimaires, tous les CDD. Il faut lui imposer qu'il prenne sur ses profits pour assurer à tous un salaire. Et puis il faut imposer à l'État patron de répartir le travail qu'il y a dans les hôpitaux, dans les écoles, dans les bureaux de poste. Ce ne serait pas bien compliqué, puisque partout les salariés croulent sous la charge de travail.

Le travail, ce n'est pas ce qui manque, mais il faudra se battre pour qu'il y ait des embauches et que le travail soit effectivement réparti entre les travailleurs, avec bien sûr pour tous un salaire entier.

Le second objectif de ce programme est d'obtenir des augmentations des salaires et des pensions de retraite et d'imposer qu'ils soient indexés sur les prix. Sur les prix que nous mesurerons nous-mêmes, par en bas, au jour le jour, et pas sur l'inflation officiellement mesurée, qui sous-estime l'augmentation des prix pour les classes populaires.

Et nous continuerons de défendre un troisième objectif plus général - qui est la condition même de tous les autres - qui est d'imposer le contrôle des travailleurs et de la population sur les comptes des entreprises et des banques.

Parce que les capitalistes nous expliqueront qu'ils n'ont pas le choix, qu'ils sont forcés de licencier, qu'ils ne peuvent pas embaucher... que tout cela n'est pas possible parce qu'il y a la concurrence internationale et que cela les ruinerait. Alors, il faut que les travailleurs puissent tout connaître de l'argent qu'il y a dans les entreprises, à quoi il sert. Combien va aux travailleurs, combien va aux actionnaires ? Combien est versé aux banques, quelle marge est faite avec tel ou tel client...

Et pour cela il faut supprimer le secret des affaires et permettre aux travailleurs de dire ce qu'ils savent de ce qui se passe dans l'entreprise.

Les groupes capitalistes, les banquiers, sont trop irresponsables à l'égard de la société. Ils se préoccupent exclusivement de leurs profits privés, ils l'ont montré tout au long de la crise. Eh bien il ne faut pas les laisser prendre leurs décisions dans le secret des conseils d'administration, sans le moindre contrôle, sans même la moindre transparence.

Voilà la politique que je défendrai dans cette campagne, c'est un programme de lutte.

Au-delà de ces objectifs je veux insister sur le fait que, par ma candidature, nous tenons à assurer la présence dans cette élection d'un courant communiste révolutionnaire. Ce courant communiste a accompagné le mouvement ouvrier depuis toujours. Il a eu des hauts et des bas mais ce courant n'a pas disparu. Le PCF ne le représente plus depuis longtemps et, de surcroît, il a tenu dans cette élection à s'effacer derrière la candidature de Mélenchon. Eh bien, le courant communiste révolutionnaire existe toujours dans ce pays, il est représenté par notre parti et en temps de crise, de l'économie capitaliste, il représente pour les travailleurs et pour la société dans son ensemble la seule perspective positive.

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