La campagne électorale de Lutte Ouvrière01/04/19861986Lutte de Classe/medias/mensuelnumero/images/1986/04/121.jpg.484x700_q85_box-27%2C0%2C2451%2C3504_crop_detail.jpg

La campagne électorale de Lutte Ouvrière

Les candidatures Lutte Ouvrière

Lutte Ouvrière présentait des listes de candidats aux élections régionales ainsi qu'aux élections législatives dans trente-trois départements, comprenant l'ensemble des grands centres industriels du pays. Une listes Lutte Ouvrière-Ligue Communiste Révolutionnaire était en outre présente dans le Maine-et-Loire, tant aux régionales qu'aux législatives.

Ces trente-trois listes comportaient 40 % de candidates (42 % aux régionales), pourcentage qui se retrouvait au niveau des candidats en tête des listes (13 femmes sur 33). Dans une dizaine de départements, la proportion des femmes sur les listes Lutte Ouvrière atteignait ou dépassait 50 % (Paris, Nord, Indre-et-Loire, Ille-et-Vilaine, Cher, Côte-d'Or, Côtes-du-Nord, Somme, Oise, Territoire de Belfort).

L'âge moyen de nos candidats aux deux élections était de 35 ans.

La quasi-totalité de ces candidats étaient salariés :

- 29 %, des ouvriers de l'industrie.

- 42 %, des employés ou techniciens dans l'industrie ou les services (banques, assurances, Sécurité Sociale, PTT, hôpitaux...).

- 19 %, des enseignants.

- 5 % travaillaient dans les services sociaux, les municipalités.

Les candidats de Lutte Ouvrière qui n'étaient pas des salariés étaient essentiellement des mères de famille et des travailleurs en retraite ou au chômage ; quelques-uns étaient des étudiants et des agriculteurs.

Voilà les départements où Lutte Ouvrière était présente et les noms des travailleuses et travailleurs qui conduisaient ces listes.

ILE-DE-FRANCE

Notre camarade Arlette Laguiller, porte-parole de notre mouvement, conduisait les listes de candidats Lutte Ouvrière en Seine-Saint-Denis, aux législatives comme aux régionales.

PARIS (75) : Chantal CAUQUIL, 37 ans, employée d'assurances.

SEINE-ET-MARNE (77) : Annick MARSAULT, 37 ans, employée de banque.

YVELINES (78) : Daniel BENARD, 44 ans, mécanicien d'entretien.

ESSONNE (91) : Yves THORAVAL, 50 ans, technicien.

HAUTS-DE-SEINE (92) : Paul PALACIO, 42 ans, ouvrier métallurgiste.

VAL-DE-MARNE (94) : Serge FRANCESCHINA, 38 ans, ouvrier de fabrication chimie.

VAL-D'OISE (95) : Patrice CRUNIL, 32 ans, ouvrier fraiseur.

AUTRES RÉGIONS

BOUCHES-DU-RHÔNE (13) : Jean-Marie CLOREC, 34 ans, ouvrier chaudronnier.

CHARENTE (16) : Michel DEBOEUF, 36 ans, ouvrier métallurgiste.

CHER (18) . Colette CORDAT, 33 ans, infirmière.

CÔTE-D'OR (21) : Jacqueline LAMBERT, 44 ans, ouvrière.

CÔTES-DU-NORD (22) : Martial COLLET, 26 ans, ouvrier métallurgiste.

DOUBS (25) : Christian DRIANO, 35 ans, ouvrier ajusteur.

HAUTE-GARONNE (31) : Anne-Marie LAFLORENTIE, 37 ans, employée.

GIRONDE (33) : Jean-François MAS, 35 ans, ouvrier métallurgiste.

ILLE-ET-VILAINE (35) : Raymond MADEC, 36 ans, infirmier.

INDRE-ET-LOIRE (37) : Chantal SORNIN, 31 ans, employée SNCF.

ISÈRE (38) : Roland CALMEL, 41 ans, ouvrier dans la chimie.

LOIRE (42) : Sauveur CUADROS, 34 ans, monteur mécanicien.

LOIRE-ATLANTIQUE (44) : Marie-France BELIN, 42 ans, employée.

LOIRET (45) : Christiane HAUCHERE, 37 ans, employée aux chèques postaux.

MEURTHE-ET-MOSELLE (54) : Gérard NEIS, 29 ans, sidérurgiste.

NORD (59) : Nicole BAUDRIN, 33 ans, sage-femme.

OISE (60) : Roland SZPIRKO, 40 ans, ouvrier métallurgiste.

PUY-DE-DÔME (63) : Claude DUFOUR, 32 ans, ouvrier électricien.

BAS-RHIN (67) : Michel SERFATI, 32 ans, ouvrier.

RHÔNE (69) : Georges MESTRES, 35 ans, ouvrier métallurgiste.

SAÔNE-ET-LOIRE (71) : Marie-Thérèse DEROCHE, 34 ans, ouvrière.

SEINE-MARITIME (76) : Gisèle LAPEYRE, 35 ans, laborantine.

SOMME (80) : Freddy STEFANSKI, 29 ans, instituteur.

HAUTE-VIENNE (87) : Claudine ROUSSIE, 35 ans, infirmière.

TERRITOIRE-DE-BELFORT (90) : Gérard BELOT, 37 ans, ouvrier.

MAINE-ET-LOIRE

- Pour les législatives : Marie-Louise DUPAS, 36 ans, infirmière (LO).

- Pour les régionales : Didier TESTU, 33 ans, ouvrier métallurgiste (LCR).

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La profession de foi de la liste Lutte Ouvrière, conduite par Arlette laguiller en Seine-Saint-Denis, aux élections législatives

Travailleuses, travailleurs de la Seine-Saint-Denis,

Je n'ai pas souvent la possibilité de m'adresser à vous par l'intermédiaire de la radio, de la télévision ou même par écrit de cette façon, contrairement à tant d'hommes politiques qui n'ont pourtant rien à vous dire - il n'est que voir leurs affiches où ils ne savent mettre que leur portrait, pour s'en rendre compte.

Il est vrai que je ne suis qu'une simple employée de banque, « une dactylo », comme l'a écrit, croyant m'injurier, un journaliste du Figaro. Mais moi, voyez-vous, je suis fière d'être une simple travailleuse. Je suis fière de la classe sociale à laquelle j'appartiens, cette classe qui fait tout dans la société et fait à elle seule fonctionner toute l'économie. Ce n'est pas la plus riche ; la classe la plus riche est au contraire une classe parasite.

Je suis une travailleuse, mais une travailleuse qui croit fermement que les travailleurs doivent se défendre eux-mêmes. C'est pourquoi j'ai consacré toute ma vie, depuis l'âge de 16 ans où j'ai commencé à travailler, à défendre mes camarades de travail, à défendre tous les travailleurs, et donc à me défendre moi-même, aussi bien syndicalement que politiquement, car je crois fermement que les travailleurs doivent faire de la politique et pas la laisser faire, en leur nom, par d'autres, qui ne se servent de leur compétence que pour nous tromper.

C'est justement parce que je n'ai pas souvent la possibilité de m'adresser à vous aussi largement que je saisis l'occasion des échéances électorales pour le faire. Et si je me présente en Seine-Saint-Denis, c'est tout simplement parce que j'y ai ma famille, que j'y suis née et que j'y réside toujours.

Certains d'entre vous qui ont pu avoir l'occasion, à la radio ou à la télévision, d'entendre les rares minutes qui m'ont été octroyées, trouveront peut-être que je me répète.

Eh bien oui, malheureusement, les circonstances font que j'ai beaucoup à me répéter.

Vous vous souvenez peut-être que j'avais dit dès 1974 et que j'avais répété en 1981, que les travailleurs n'avaient rien à attendre des élections, même si ces élections portaient au pouvoir ces dirigeants de gauche qui disaient qu'ils allaient changer la vie, gouverner pour les travailleurs et faire payer les riches.

Qu'ont-ils fait de tous ces espoirs ? Rien, vous le savez bien. Au bout de cinq ans de gouvernement de gauche, la vie n'a pas plus changé qu'avec les gouvernements de droite. Les riches, au lieu de payer, se sont enrichis de façon insolente, au point qu'il faut réserver, paraît-il, deux mois à l'avance sa table dans les restaurants de luxe, au point que quand on est riche on a pu doubler sa fortune en spéculant à la bourse, en janvier dernier.

En face, les travailleurs, sans être forcément plus pauvres, n'ont pas vu les choses s'améliorer, au contraire. Le chômage se fait de plus en plus menaçant. L'instabilité est la règle, les contrats provisoires se sont multipliés. Pour le monde du travail, c'est l'insécurité. Avec la flexibilité, on ne saura même plus combien d'heures on va travailler et on sera payé.

Et le pire, c'est que ces cinq ans de gouvernement de gauche ont fait perdre l'espoir dans les idées de gauche. Nombre de travailleurs en viennent à penser qu'il faut laisser la bride sur le cou au patronat, pour qu'il fasse marcher les entreprises et créer ainsi des emplois.

Mais les entreprises marchent, ou plus exactement elles rapportent beaucoup. Elles produisent parfois moins, mais avec encore moins de travailleurs. C'est-à-dire que la marge bénéficiaire s'est accrue, même avec les vieilles entreprises. Et les profits ne sont pas réinvestis dans la production. Ils ne servent ni à créer des emplois, ni à créer de nouvelles entreprises. La bourgeoisie s'en sert pour spéculer, sur la monnaie ces dernières années, et puis maintenant sur les actions.

Toutes ces spéculations rapportent, mais elles sont improductives et ne créent pas d'emplois, au contraire, elles en suppriment. Dès qu'une entreprise annonce qu'elle va licencier, le cours de ses actions monte, car on sait que les profits vont augmenter. Et c'est à cela que passe l'argent des riches : à faire de l'argent facile, au détriment de tous, et sur le dos des travailleurs. Voilà ce que le gouvernement de gauche a fait pour se faire bien voir de la bourgeoisie et du patronat. Celui-ci ne lui en est pas reconnaissant pour autant, et s'il peut obtenir d'autres cadeaux de ses serviteurs patentés des partis de droite, après en avoir eu de ses candidats serviteurs des partis de gauche, il a tout intérêt au changement.

Voilà pourquoi je ne peux que répéter la même chose. Avant 1981, vous ne me croyiez peut-être pas, car personne, depuis plus de vingt ans, n'avait fait l'expérience de la gauche au pouvoir. Aujourd'hui, peut-être jugerez-vous que j'ai eu raison.

A quoi bon - direz-vous peut-être - avoir eu raison, si on ne peut rien changer ? Eh bien justement, je ne me présente pas pour vous dire : votez pour ma liste et je changerai les choses. Ni moi-même, ni aucun des candidats de Lutte Ouvrière, ne vous diront cela. Les hommes politiques qui vous disent qu'ils suffit de voter pour changer les choses vous trompent.

Moi, je vous dis : nous changerons les choses, à la condition de considérer les élections comme un droit, légitime, mais un simple droit de s'exprimer, par son bulletin de vote. Mais croire que son bulletin, à lui tout seul, va changer quoi que ce soit à notre situation, serait une erreur. Les élections, c'est dire ce qu'on pense, mais cela ne peut pas servir à faire ce qu'on veut. Car même si on arrive à changer le Parlement, comme on l'a fait en 1981, derrière, il y a d'autres barrières - que nous avons vues : le Sénat, le Conseil d'État, le Conseil Constitutionnel, et bien d'autres encore - qui ont fait barrage à chaque fois que le gouvernement faisait mine de réaliser même une toute petite partie de ses promesses. Et puis, derrière encore, il y a le pouvoir économique de la bourgeoisie, qui achète des hommes, des hauts fonctionnaires, et qui sait, elle, mener la lutte de classe à son profit pendant qu'elle paie des journalistes pour expliquer aux travailleurs qu'en ce qui les concerne, c'est dépassé.

Eh bien, moi, je vous dis que la lutte de classe n'est pas dépassée. Que c'est parce que les travailleurs ne s'en sont pas servis depuis cinq ans, que leur condition s'est aggravée. Parce que les travailleurs ont la force de faire sauter les verrous mis en place par la bourgeoisie. Un million de travailleurs en lutte sont infiniment plus efficaces pour faire céder les possédants, que dix millions de bulletins de vote.

Peut-être que cette expérience nous aura servis si elle nous fait toucher du doigt à tous, qu'il faudra, après le 16 mars, nous défendre tous ensemble, tous les travailleurs, que nous soyons socialistes, communistes, sans parti ou révolutionnaires. Il faudra nous unir contre le nouveau gouvernement. Car il est évident, c'est couru d'avance, que ce sera un gouvernement de droite. Même les socialistes ne comptent pas remporter la victoire : ils ne font que discuter de ce qui se passera entre le Président de la République et une majorité de droite.

Alors, il nous faudra bien nous défendre, contre la bourgeoisie et le patronat, imposer notre droit à l'existence et à une vie décente. Il faudra bien que nous prenions l'argent là où il se trouve : dans la poche des riches. Vous savez, les conquêtes de 1936 et celles de 1968, ce ne sont pas les élections qui les ont imposées, mais des grèves générales.

Alors, aujourd'hui, je vous dis, si vous voulez indiquer dans quel sens vous voulez que, demain, les militants socialistes, les militants communistes, les militants syndicalistes, vous défendent, ce n'est pas, bien sûr, en votant à droite que vous le ferez, nous le savons tous, mais ce n'est pas non plus en votant pour le Parti Socialiste ou le Parti Communiste.

Comment saura-t-on si votre bulletin veut dire que vous voulez qu'ils s'unissent pour organiser la défense du monde du travail, à partir des entreprises, ou si vous approuvez toute la politique du gouvernement de gauche ? A quoi ont servi, depuis cinq ans, les députés communistes ? A quoi ont servi les députés socialistes ? Que dans la future assemblée il y en ait un peu plus ou un peu moins, qu'est ce que ça changera, puisque de toute façon, la gauche ne sera pas majoritaire ?

Mais si vous voulez que votre vote ait un sens, qu'il soit compris, d'abord par l'ensemble des travailleurs, et qu'il soit aussi compris par l'ensemble des militants de la classe ouvrière, eh bien, servez-vous de votre bulletin pour indiquer quelle politique vous voulez qu'ils fassent.

C'est pourquoi je me présente, et vous demande de voter pour la liste de Lutte Ouvrière que je conduis. C'est le seul moyen de faire un vote de gauche, mais un vote de gauche qui ne puisse pas être interprété contre vous. C'est le geste le plus utile que vous pourrez faire avec votre bulletin de vote, le 16 mars. Car sinon ce bulletin ne pèsera pas le poids du papier sur lequel il est imprimé.

Travailleuses, travailleurs,

J'ignore si je vous ai convaincus de faire ce geste. Si oui et que vous votiez en assez grand nombre pour que je sois élue, je ne vous dis pas que je serai plus efficace qu'un député communiste ou socialiste mais je ne le serai pas moins. Mais en plus du geste politique significatif que vous aurez fait, vous m'aurez donné la possibilité de me faire entendre plus souvent et plus largement. Et si je ne vous ai pas convaincus, je souhaite de tout coeur que nous nous retrouvions tous ensemble, pour nous défendre en commun contre la droite, la bourgeoisie et le patronat.

De toute façon, merci de m'avoir lue jusqu'ici.

Je vous salue fraternellement et je suis persuadée que les travailleurs sauront, un jour, imposer un monde meilleur, sans haine et sans exploitation, fraternel et juste. C'est cela, pour moi, le communisme ou le socialisme. Et ce n'est pas l'image qui nous en est donnée aujourd'hui.

Arlette Laguiller

Textes des affiches Lutte Ouvrière apposées sur les panneaux officiels

Elections législatives

Travailleuses, travailleurs,

Vous êtes déçus, écoeurés, parce que le gouvernement socialiste, avec ou sans participation communiste, n'a pas amélioré les conditions de vie des travailleurs et des gens du peuple, au contraire. Il n'a pas fait payer les riches, il n'a fait que les aider à pressurer les pauvres. Il n'a pas contraint les possesseurs de capitaux à investir pour créer des emplois, il leur a donné de nouvelles facilités pour spéculer. Il n'a pas réalisé les idées de gauche, il les a reniées. Il a été dur envers les travailleurs, mais servile devant les riches possédants et lâche face à la droite. Alors, n'hésitez pas à exprimer ce que vous avez sur le coeur. Vous le pouvez, en votant pour la liste présentée par Lutte Ouvrière.

VOTEZ LUTTE OUVRIÈRE

Vous qui êtes ennemis de la droite, mais qui n'acceptez pas d'être dupés par la gauche gouvernementale, ne tombez pas dans le piège du « vote utile ». Aucun vote ne sera utile pour changer les choses et la vie, seule la lutte collective des travailleurs peut le faire. Et voter pour des partis qui soutiennent ou ont soutenu un gouvernement qui mène une politique de droite, ce n'est pas voter contre la droite. Travailleuses, travailleurs, Votez à gauche, mais sans donner un aval au Parti Socialiste ou au Parti Communiste. Votez pour des travailleuses et des travailleurs qui n'ont pas retourné leur veste ; qui disaient en 1981 qu'il ne fallait pas faire confiance à Mitterrand ; qui n'ont jamais soutenu ni le gouvernement, ni sa politique anti-ouvrière ; et qui n'ont pas plus accepté l'austérité de gauche que l'austérité de droite.

Avec Arlette Laguiller

VOTEZ POUR LA LISTE LUTTE OUVRIÈRE

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Elections régionales

Travailleuses, travailleurs,

Ces élections régionales sont, tout autant que les législatives, des élections politiques. Elles ne peuvent cependant pas plus que les législatives, changer la vie des travailleurs.

Mais de ce que vous ferez de votre bulletin de vote, tout le monde tirera des conclusions politiques qui, elles, pèseront sur la façon dont le monde du travail abordera l'après 16 mars.

J'étais la seule candidate de gauche à vous avoir prévenus, des élections présidentielles de 1974 à celles de 1981, que François Mitterrand était un faux homme de gauche. Le Parti Communiste a soutenu la candidature de Mitterrand, sans vous dire, contrairement à moi, que les travailleurs n'auraient rien à attendre du gouvernement qui sortirait de l'Union de la gauche.

Je suis une travailleuse et une femme de gauche, mais je vous avais dit cela, parce que parmi tous ces gens qui vous mentaient, il fallait bien que quelqu'un dise la vérité.

Depuis 1981, nous avons tous pu faire l'expérience d'un gouvernement qui dévalorise les idées de la gauche en faisant exactement la même politique que ses prédécesseurs de droite.

Ce n'est pas que je sois fière d'avoir eu raison, au contraire j'aurais préféré me tromper. Mais je vous dis aujourd'hui que nous, les travailleurs, nous ne devons pas voter à droite, bien sûr, mais que nous ne devons pas non plus voter pour ces hommes qui se disent de gauche et nous ont menti et trompés pendant cinq ans.

En votant pour eux, nous approuverions toutes les mesures anti-ouvrières qu'ils ont prises, et que leurs successeurs de droite n'auront plus qu'à continuer.

Oui, nous, les travailleuses et les travailleurs de ce pays, si nous sommes tous unis, socialistes, communistes, révolutionnaires, sans parti, pour nous défendre tous ensemble, nous pouvons changer notre sort, quelque soit le résultat du 16 mars.

C'est pour cela que je vous demande de voter pour les candidats présentés dans votre département par Lutte Ouvrière, pour affirmer que les travailleurs ne sont pas dupes de tous ces politiciens qui ont le pouvoir, certes, mais pas celui de tromper plus longtemps l'ensemble des travailleurs.

Arlette Laguiller

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Textes des affiches de la liste Lutte Ouvrière en Seine Saint Denis

Elections législatives

Travailleuses, travailleurs de la Seine-Saint-Denis,

Vous vous souvenez peut-être que j'avais dit dès 1974 et que j'avais répété en 1981, que les travailleurs n'avaient rien à attendre des élections, même si ces élections portaient au pouvoir ces dirigeants de gauche qui disaient qu'ils allaient changer la vie, gouverner pour les travailleurs et faire payer les riches.

Qu'ont-ils fait de tous ces espoirs ? Rien, vous le savez bien.

Avant 1981, vous ne me croyiez peut-être pas, car personne, depuis plus de vingt ans, n'avait fait l'expérience de la gauche au pouvoir. Aujourd'hui, peut-être jugerez-vous que, j'ai eu raison.

A quoi bon -direz-vous peut-être- avoir eu raison, si on ne peut rien changer ? Eh bien justement, je ne me présente pas pour vous dire : votez pour ma liste et je changerai les choses. Les hommes politiques qui vous disent qu'il suffit de voter pour changer les choses vous trompent.

Moi, je vous dis : nous changerons les choses, à la condition de considérer les élections comme un simple droit de s'exprimer. Mais croire que son bulletin, à lui tout seul, va changer quoi que ce soit à notre situation, serait une erreur. Car même si on arrive à changer le Parlement, comme on l'a fait en 1981, derrière, il y a d'autres barrières-que nous avons vues : le Sénat, le Conseil d'État, le Conseil Constitutionnel, et bien d'autres encore - qui ont fait barrage à chaque fois que le gouvernement faisait mine de réaliser même une toute petite partie de ses promesses. Et puis, derrière encore, il y a le pouvoir économique de la bourgeoisie, qui achète des hommes, des hauts fonctionnaires, et qui sait, elle, mener la lutte de classe à son profit pendant qu'elle paie des journalistes pour expliquer aux travailleurs qu'en ce qui les concerne, c'est dépassé.

Eh bien moi, je vous dis que la lutte de classe n'est pas dépassée. Que c'est parce que les travailleurs ne s'en sont pas servis depuis cinq ans, que leur condition s'est aggravée. Parce que les travailleurs ont la force de faire sauter les verrous mis en place par la bourgeoisie. Un million de travailleurs en lutte sont infiniment plus efficaces pour faire céder les possédants, que dix millions de bulletins de vote.

Alors, aujourd'hui, je vous dis, si vous voulez indiquer dans quel sens vous voulez que, demain, les militants socialistes, les militants communistes, les militants syndicalistes, vous défendent, ce n'est pas, bien sûr, en votant à droite que vous le ferez, nous le savons tous, mais ce n'est pas non plus en votant pour le Parti Socialiste ou le Parti Communiste.

Comment saura-t-on si votre bulletin veut dire que vous voulez qu'ils s'unissent pour organiser la défense du monde du travail, à partir des entreprises, ou si vous approuvez toute la politique du gouvernement de gauche ? A quoi ont servi, depuis cinq ans, les députés communistes ? A quoi ont servi les députés socialistes ? Que dans la future assemblée il y en ait un peu plus ou un peu moins, qu'est-ce que ça changera, puisque de toute façon, la gauche ne sera pas majoritaire ?

Mais si vous voulez que votre vote ait un sens, qu'il soit compris, d'abord par l'ensemble des travailleurs, et qu'il soit aussi compris par l'ensemble des militants de la classe ouvrière, eh bien, servez-vous de votre bulletin pour indiquer quelle politique vous voulez qu'ils fassent.

C'est pourquoi je me présente, et vous demande de voter pour la liste de Lutte Ouvrière que je conduis. C'est le seul moyen de faire un vote de gauche, mais un vote de gauche qui ne puisse pas être interprété contre vous. C'est le geste le plus utile que vous pourrez faire avec votre bulletin de vote, le 16 mars.

Arlette Laguiller

Élections régionales

Travailleuses, travailleurs de la Seine-Saint-Denis,

Ces élections régionales sont, tout autant que les législatives, des élections politiques. Elles ne peuvent cependant pas plus que les législatives, changer la vie des travailleurs.

J'étais la seule candidate de gauche à vous avoir prévenus, des élections présidentielles de 1974 à celles de 1981, que François Mitterrand était un faux homme de gauche. Le Parti Communiste a soutenu la candidature de Mitterrand, sans vous dire, contrairement à moi, que les travailleurs n'auraient rien à attendre du gouvernement qui sortirait de l'Union de la Gauche.

Bien que je sois une travailleuse et une femme de gauche, je vous avais dit cela, parce que parmi tous ces gens qui mentaient, il fallait bien que quelqu'un dise la vérité.

Depuis 1981, nous avons tous pu faire l'expérience d'un gouvernement qui dévalorise les idées de la gauche en faisant exactement la même politique que ses prédécesseurs de droite.

En 1981, beaucoup ont cru que la vie allait changer, qu'il suffisait de changer de gouvernement, de remplacer les politiciens de droite, qui depuis 20 ans géraient l'économie du pays au mieux des intérêts des patrons et des grands possédants, pour qu'enfin les espoirs des petites gens puissent être pris en compte, qu'il y ait plus de justice, moins d'inégalités.

Mais il y a aujourd'hui plus de chômeurs qu'avant, et plus de chômeurs en fin de droits, n'ayant pour vivre que la charité publique. Et cela dans le même temps où, l'on voit les spéculateurs en bourse s'enrichir, où la richesse s'étale, insolente, sûre d'elle-même face à l'inquiétude du monde du travail.

Non, avec les socialistes au gouvernement les choses ne se sont pas améliorées, elles se sont aggravées. Ce ne sont pas eux qui ont amené la crise, bien sûr, mais ils n'ont rien fait pour éviter qu'elle frappe d'abord les petites gens. Les cadeaux, ils les ont réservés aux industriels et aux banquiers.

Ce n'est pas que je sois fière d'avoir eu raison, au contraire, j'aurais préféré me tromper. Mais je vous dis aujourd'hui que nous, les travailleurs, nous ne devons pas voter à droite, bien sûr, mais que nous ne devons pas non plus voter pour ces hommes qui se disent de gauche et nous ont menti et trompés pendant cinq ans.

En votant pour eux, nous approuverions toutes les mesures anti-ouvrières qu'ils ont prises, et que leurs successeurs de droite n'auront plus qu'à continuer.

Non, on ne peut pas leur dire bravo. On ne peut pas repartir pour un tour avec la même politique.

Car enfin, que vont-ils pouvoir dire, après le 16 mars, les militants communistes ou socialistes ? Qu'il faudra que les travailleurs attendent deux ans, cinq ans, vingt ans, pour que la gauche revienne à nouveau pour faire mieux, espérons-le, que ce qu'elle a fait pendant cinq ans ?

Non, ils ne pourront pas dire cela. Et nous espérons au contraire que nous nous retrouverons ensemble, militants socialistes et militants communistes, et avec bien d'autres, à essayer de faire en sorte que les travailleurs reprennent des forces, reprennent confiance dans leur capacité à se défendre.

Oui, nous, les travailleuses et les travailleurs de ce pays, si nous sommes tous unis, socialistes, communistes, révolutionnaires, sans parti, pour nous défendre tous ensemble, nous pouvons changer notre sort, quel que soit le résultat du 16 mars.

C'est pour cela que je vous demande de voter pour la liste Lutte Ouvrière que je conduis en Seine-Saint-Denis, pour affirmer que vous n'êtes pas dupes de tous ces politiciens qui ont le pouvoir, certes, mais pas celui de tromper plus longtemps ensemble des travailleurs.

Arlette Laguiller

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