Ce numéro de Lutte de Classe est tout entier consacré aux élections législatives qui ont eu lieu le 16 mars et à la campagne électorale qui les a précédées.

Les trois principales organisations trotskystes, le Parti Communiste Internationaliste qui anime le Mouvement pour un Parti des Travailleurs, la Ligue Communiste Révolutionnaire et Lutte Ouvrière ont présenté des candidats dans ces élections.

Ce sont les campagnes menées respectivement par ces trois organisations que nous présentons ici. Et pour ce faire, plus que des commentaires, il nous a semblé préférable de rassembler un certain nombre de documents, professions de foi, discours, tracts, articles de journaux.

La sélection des textes, non seulement de Lutte Ouvrière, mais aussi de la LCR et du MPPT, a bien entendu été faite par nous-mêmes. Elle est sinon objective, du moins honnête et reflète ce qu'on a pu voir publiquement des campagnes de la LCR et du MPPT, comme de Lutte Ouvrière elle-même.

Il nous semble que la juxtaposition de ces différents textes permet de dégager le style et le contenu des campagnes électorales menées par chacune de ces organisations, et bien sûr, les différences qui les ont séparées ou opposées. Par delà d'ailleurs la campagne électorale, ce sont les divergences politiques de ces organisations qui se réclament toutes trois du trotskysme, qui apparaissent ici. La campagne électorale, comme il est normal, ne fait que les mettre en évidence ; mais elle n'en est ni la cause ni le seul cadre.

Nous donnons, bien entendu, les résultats complets pour chacune des trois organisations. Ils sont faibles pour les trois et il faudrait se garder d'en tirer des conclusions définitives, autre que le fait incontestable de la faiblesse de toute l'extrême gauche sur le plan électoral.

Cependant en ce qui concerne les résultats de Lutte Ouvrière il faut remarquer que le pourcentage obtenu par nos listes, 1,21 % aux législatives, un peu plus aux régionales, 1,59 %, est du même ordre, et même légèrement supérieur, à celui que nos candidats avaient obtenu il y a cinq ans aux précédentes élections législatives, 1,11 %. Alors que par rapport à 1981, toute la gauche recule nous nous maintenons, bien qu'à un niveau très faible. Il faut cependant noter aussi que par rapport à d'autres élections, présidentielles ou européennes, c'est un pourcentage qui est nettement plus faible que celui que nous avons généralement obtenu, au-dessus de 2 %. Tout ce que nous pouvons en conclure donc c'est que Lutte Ouvrière réussit à garder, mais pas à augmenter pour le moment, un petit électorat qui lui reste fidèle dans les périodes de montée électorale de la gauche comme dans ses périodes de recul.

Il nous faut remarquer aussi que, bien que cela porte sur des chiffres faibles, il y a une différence significative entre le nombre de voix obtenues par les listes Lutte Ouvrière d'une part et celle du MPPT et de la LCR d'autre part. En gros, le double de celui-là et quatre fois plus que celle-ci. Il nous semble qu'on peut au moins en tirer la conclusion que la politique défendue et exprimée par Lutte Ouvrière a touché et su exprimer les sentiments d'une fraction tout de même notablement plus large de travailleurs que celles défendues par les deux autres organisations trotskystes. Cette conclusion s'impose d'autant plus que les résultats de ces dernières élections ne font que corroborer ceux des élections précédentes, législatives, présidentielles ou européennes, chaque fois qu'une comparaison a été possible entre les résultats des trois organisations.

Cela nous semble d'autant plus probant que la campagne de Lutte Ouvrière n'a été dirigée ni vers les milieux réformistes et social-démocrates comme celle du MPPT ni vers les milieux gauchistes petits-bourgeois, régionalistes, écologistes ou anti-racistes, comme a tenté de le faire la LCR. Comme on peut en juger par les textes publiés dans ce numéro : c'est aux travailleurs et aux travailleuses seuls que nous nous sommes adressés. C'est pour eux que Lutte Ouvrière a parlé de ce qu'elle pensait de la situation politique actuelle, c'est de leur point de vue qu'elle a jugé la gauche comme la droite, c'est dans l'intérêt de leur classe qu'elle a essayé de situer l'importance exacte de ces élections mais aussi de la période et des possibilités pour les travailleurs dans celle-ci. Bref, notre campagne a été celle de révolutionnaires prolétariens, qui ne cachent pas ce qu'ils sont, et s'adressent au prolétariat tout entier pour défendre auprès de lui les idées de lutte de classe et les intérêts à court ou à long terme de la classe ouvrière.

Et le fait que dans le contexte actuel, alors qu'il y a un déplacement vers la droite, et alors que les révolutionnaires n'ont évidemment aucune chance de remporter le moindre succès électoral, un certain nombre de travailleurs nous aient tout de même entendu, au point de nous le signifier en mettant un bulletin dans l'urne en faveur de nos listes, nous semble le fait positif de ces élections. Cela nous semble surtout le gage de l'avenir des idées et de la politique révolutionnaires prolétariennes.