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La crise de l'économie capitaliste

La crise de l'économie capitaliste qui s'est manifestée dans un premier temps sous la forme d'une crise du système monétaire international, puis sous la forme d'un brutal renchérissement du prix de l'énergie, apparaît depuis la fin de 1974 comme une crise de surproduction généralisée. Après le « boom » de la production capitaliste en 1973, l'année 1974 a été l'année du tournant. L'année 1975 sera celle du recul général de la production.

Certes, l'économie de l'occident capitaliste n'a jamais réussi à éliminer les fluctuations cycliques, contrairement aux fanfaronnades des partisans du système capitaliste. Mais pendant les trente dernières années, les fluctuations économiques des différents pays capitalistes n'étaient pas simultanées ; par ailleurs, les récessions exprimaient plus souvent un ralentissement plus ou moins important dans la croissance qu'un recul de la production. Pour la première fois, depuis la guerre, l'ensemble du monde capitaliste est touché. Et il ne s'agit pas d'un simple ralentissement de la croissance, mais d'un recul général de la production.

La question reste ouverte de savoir si la première crise générale de l'économie capitaliste depuis la guerre se traduira par un effondrement aussi profond, suivi d'une dépression aussi longue, que la grande crise de 1929. Mais même si elle doit rester ce que les économistes appellent par euphémisme une « récession », le caractère général de cette "récession" marque un tournant dans l'économie capitaliste de l'après-guerre. La période de la croissance économique continue a pris fin. Il en résulte un certain nombre de conséquences aussi bien pour la classe capitaliste que pour la classe ouvrière.

 

1973-1974 : DU "BOOM" A L'EFFONDREMENT

En 1973, l'année même où le système monétaire international de l'après-guerre fut définitivement enterré, l'année de la "crise du pétrole", l'économie capitaliste mondiale a connu un emballement sans précédent depuis la guerre. Le produit national brut de l'ensemble des principaux pays capitalistes s'est acru de 6,75 % en une année, moyenne nettement supérieure à ce qui s'était vu depuis la guerre. Le comemrce mondial a connu un véritable bond : en l'espace d'une seule année, il s'est accru en volume de plus de 12 %.

Mais cet ultime emballement était tou à fait articiciel. Il était favorisé par un gonflement incontrolé des crédits, par la mise en circulation d'une quantité exceptionnellement élevée de moyens de paiement. Dans un climat spéculatif, les Etats - et l'Etat américain en premier lieu - comme les entreprises privées, ont accru dans des proportions colossales, tant la quantité de monnaies fiduciaires et scripturales en ciruclation, que le crédits. Les seuls "euro-dollars" - crédits incontrolés par les Etats accordés en dollards par des banques non-américaines - ont connu dans le courant de la seule anéne 1973, un gonflement de 50 % de leur volume !

Durant la deuxième partie de l'année 74, le tournant vers la dépression est amorcé au Japon, puis aux Etats-Unis et en Allemagne, sans cependant encore atteindre la France ni un certain nombre d'autres grands pays capitalistes. Sur l'ensemble de l'année 1974, la production industrielle marque cependant déjà un fléchissement en allemagne, aux états-unis, au japon et en Grande-bretagne. l'indice de la production industrielle, établi sur la base de la production de 1970, recule aux Etats-unis de 118 à 117 ; en Allemagne, de 114 à 112 ; au Japon, de 129 à 126. il en est de même pour le produit national brut. Cette notion de produit national est, certes, d'une valeur très relative, car y sont comptabilisés aussi bien des richesses réelles créées, que des services plus ou moins saisissables. La tendance est cependant significative : alors que le produit national brut des Etats-Unis par exemple s'est accru en 1973 de 5,9 %, de 2,2 % en 1974 - d'où un manque à gagner de 8,1 % ! - ce recul est encore plus impressionnant dans le cas du Japon, présenté pourtant il n'y a pas si longtemps, comme le prototype des miracles capitalistes. Après une progression de 10,2 % en 1973, le produit national brut japonais a en effet marqué un recul de 3,7 % en 1974. manque à gagner de près de 14 % donc !

Sur l'ensemble des plus importants pays capitalsites, l'année 1974 a été globalement une année de stagnation, avec une croissance de 0 %.

Le commerce mondial a, de son côté, marqué le pas. Il n'a certes pas encore amorcé en 1974 ce mouvement de recul qui sera le sien en 1975. Mais sa progression en volume est tombée des 12 % de l'année précente à 4,5 %.

 

1975, UNE ANNEE DE CRISE

Les tendances amorcées en 1974 se sont aggravées en 1975. Les pays comme la France ou l'Italie, qui avaient encore réussi à maintenir leur production en 1974, ont été touchés à leur tour. C'est ainsi que la production industrielle italienne du premier semestre 1975 a été de 12 % inférieure à celle de la même période en 1974. Recul de la production de l'ordre de 5 % en France au premier semestre, autant en Allemagne, 2,5 % en Hollande. En un mot, le recul est général. Aux Etats-Unis, il avait atteint, au cours des trois premiers mois de l'année, 11 %.

Signe autrement plsu directement sensible de la crise : l'accroissement brutal du chômage. En France, même d'après les chiffres officiels, le nombre de demandes d'emploi non satisfaites a augmenté de 86 % entre septembre 1974 et septembre 1975. Il y a plus d'un million de chômeurs en France, plus d'un million encore en Italie et en Allemagne, près de 8 millions, c'est-à-dire 8,3 % de la population active, aux Etats-Unis. Sur l'ensemble des pays industriels, le nombre total des chomeurs atteint officiellement 15 millions. Et il s'agit là du seul chômage total auquel s'ajoutent toutes les formes de chômage partiel.

L'année, certes, n'est pas encore finie, et le deuxième semestre apparaît en génral moins catastrophique que le premier. Nénamoins, d'après les prévisions de Fourcade, ministre de l'Economie et des Finances de la France, qui, dans ses discours publics, ne pêche pourtant pas par excès de pessimisme, le produit national brut de la France aura reculé, pour la première fois depuis 1945, de 2,5 % environ, celui de l'Allemagne de 4,5 % et celui des Etats-Unis de 4,7 %.

Ce que signifie ce recul ? Le journal économique Expansion considère que le « manque à produire » des pays occidentaux, obtenu en faisant la différence entre leur taux de croissance moyen depuis la guerre et le taux de recul de 1975, peut être chiffré à 450 milliards de dolalrs, soit près de 2 000 milliards de francs.

Un chiffre de ce genre ne peut être que très indiciatif. Il donne cependant une idée : c'est l'équivalent de la production annuelle totale de la France et de la Grande-Bretagne réunies ! Même si al crise devait se résorber rapidement, une telle perte gigantesque constitue une condamnation sans appel de l'économie capitaliste.

 

L'INLFATION ET LA CRISE

La crise actuelle qui, après sa phase monétaire initiale, apparaît clairement comme une crise de surproduction, concrétise la contradiction fondamentale de l’économie capitaliste entre la tendance au développement sans limite de la production et le caractère limité de la consommation solvable.
La crise, c’est-à-dire l’arrêt plus ou moins brutal de la croissance, seul moyen d’adapter après coup une production anarchique à une consommation solvable limitée, survient après une période de prospérité relative exceptionnellement longue. Les récessions n’ont pas manqué depuis la guerre, mais elles n’ont jamais pris un caractère général.
Bien des facteurs expliquent la longueur sans précédent de cette période. La croissance correspondant à la période de reconstruction de l’après-guerre a été relayée par la croissance de secteurs nouveaux ou produisant pour un marché nouvellement élargi. Dans le domaine des articles de consommation, en particulier semi-durables (télévisions, transistors, appareils ménagers, automobiles, etc.) comme dans le domaine des biens d’investissements (automatisation, etc.). Par ailleurs, la multiplication et la diversification des branches de production ont atténué les effets des cycles particuliers de chaque branche sur l’ensemble de l’économie, modifiant par là même la périodicité plus ou moins régulière des crises générales.
Mais surtout la raison principale de la longueur de la période de relative prospérité est d’une part le caractère massif de l’intervention de chaque État en faveur de sa classe capitaliste, et d’autre part le développement sans précédent du crédit privé (en particulier bancaire). Autrement dit, le marché de chaque pays était soutenu par l’État et par le système bancaire, au prix d’un formidable endettement public et privé, au prix d’une inflation permanente.
Par ailleurs, la longue période de croissance était également fondée sur une extension importante du marché mondial, du commerce international. Le cas de la France est à cet égard significatif. Pendant les cinq ans qui suivirent 1968, le marché des articles de consommation s’est élargi de 24 %, celui des moyens de production de 31 %, alors
que les exportations se sont accrues de 71 %.
Mais l’élargissement du commerce international lui-même était dans une large mesure fondé sur l’inflation mondiale, en particulier sur l’inflation du dollar. Pas seulement parce que la dépréciation du dollar, en renchérissant les produits américains, facilitait la pénétration de produits européens, japonais, etc... sur le marché américain.
Mais aussi et sans doute surtout parce que le commerce international lui-même était financé dans une large mesure par le crédit international en abondance, et avant tout par du crédit en dollar.
Du fait du rôle particulier du dollar dans le système monétaire mis en place au lendemain de la guerre, faisant que le dollar était à la fois la monnaie d’une nation et une monnaie internationale, les dollars jetés dans l’économie par l’État américain ou par le système bancaire contribuaient à inonder d’argent et de crédit non seulement le marché américain, mais aussi le marché international.
Mais la désagrégation du système monétaire et la crise actuelle viennent de montrer que la planche à billets et le crédit en abondance ne peuvent pallier le caractère limité du marché que d’une manière temporaire. Autrement dit, la combinaison des deux a simplement repoussé les échéances, mai elle ne pouvait pas empêcher qu’une crise générale survienne.


TOUJOURS LES MÊMES REMÈDES

Les États capitalistes n’ont cependant rien trouvé d’autre pour aider leur classe bourgeoise en difficulté que l’injection massive de l’argent de l’État dans l’économie, soit sous la forme de subventions de commandes directes aux entreprises, soit, lorsque le gouvernement se veut plus social, en aidant indirectement la production capitaliste par différentes formes d’aide à la consommation. Ces dépenses sont en partie financées par des impôts, mais bien plus généralement par la dette publique, c’est-à-dire par l’inflation, c’est-à-dire par la planche à billets.
C’est le procédé utilisé pour tenter de combattre la crise par tous les États capitalistes sans exception.
Comme on le sait, Giscard vient de jeter dans l’économie française 30 milliards de francs, financés par le seul déficit budgétaire. L’Allemagne a décidé un plan de relance de plus, portant sur 6 milliards de marks, à peu près à la même époque. L’Italie avait de son côté débloqué 4 500 milliards de lires pour aider ses capitalistes.
Ainsi donc, même les États qui, comme l’Allemagne, avaient axé leur politique économique sur la lutte contre l’inflation, quitte à ralentir la production, avaient choisi cette année de crise de jouer la carte de l’inflation. Le budget de tous les grands pays industriels est en déficit pour 1975, le record appartenant à la Grande-Bretagne. Pour les seuls États-Unis, le déficit budgétaire prévu est de 60 milliards de dollars. En clair, c’est cette somme que l’État américain jette sans contrepartie dans l’économie.
Soit dit en passant, les responsables de l’économie capitaliste ont un certain cynisme d’accuser les pays producteurs de pétrole d’être responsables de l’inflation, alors que l’excédent des recettes de tous les pays membres de l’O.P.E.P. – recettes touchées pour une richesse réelle livrée – est du même ordre que le déficit du seul État américain.
Les États capitalistes sont bien placés pour savoir où conduit cette politique de planche à billets à outrance. Mais ils n’ont pas le choix. Ils ne peuvent absolument pas se permettre de refuser d’aider par tous les moyens à leur disposition les secteurs menacés par la crise. Aucun État capitaliste ne peut se permettre de laisser la crise faire librement son oeuvre, c’est-à-dire pousser les prix industriels vers la baisse, et précipiter par là même l’élimination des entreprises les moins rentables. Pourtant, la crise est précisément ce purgatif, par l’intermédiaire duquel l’économie capitaliste se débarrasse périodiquement de ses secteurs les moins rentables et favorise la concentration des capitaux aux mains des plus puissants.
Contrairement aux crises précédentes, c’est la première fois donc que le recul de la production ne s’accompagne pas d’un recul ou du moins d’une stagnation des prix. L’inflation mondiale est, au contraire, plus forte en cette année de crise 1975, qu’elle ne l’a été pendant l’année du «boom» spéculatif en 1973.
Ces aides massives des États ne peuvent de surcroît pas renverser la tendance à la crise à elles seules. Les capitalistes n’auront pas tendance à relancer leur production tant qu’ils ne s’attendent pas à une amélioration telle de la situation qu’ils puissent escompter vendre leur production avec le profit moyen. Et même s’ils relancent quelque peu leur production – ne serait-ce que pour avoir un stock minimum – il n’est pas sûr que s’enclenche le mécanisme de la reprise.
Il existe d’énormes capacités de production inutilisées – aux États-Unis, l’appareil productif fonctionne à 65-70 % de sa capacité. Il existe également un grand nombre d’ouvriers en chômage partiel. Il en résulte que la production des articles de consommation – comme par exemple l’automobile qui semble reprendre un peu – peut augmenter, sans que cela se traduise par des investissements nouveaux, donc, par une demande à l’industrie produisant des équipements ; sans même que cela se traduise par des embauches supplémentaires.
L’intervention financière de l’État peut même accroître le risque d’une aggravation de la crise dans le futur, sans aucun effet sur l’économie dans l’immédiat, en poussant à la création de forces productives supplémentaires, alors même que la crise exprime précisément qu’il y a trop de forces productives par rapport à la capacité d’absorption du marché
capitaliste.
C’est ainsi par exemple qu’en France, l’État est engagé dans un vaste programme de financement des investissements dans la sidérurgie, alors même que les aciéries et les laminoirs travaillent en France à 60-70 % de leur capacité ; alors même que le prix de vente des produits des aciéries s’est effondré.
Ces aides étatiques non seulement ne peuvent pas grand chose contre la crise, mais risquent encore de l’aggraver. Mais en attendant elles aident les groupes capitalistes bénéficiaires à sauvegarder tant bien que mal leur profit, et c’est au fond l’essentiel de ce que ces groupes demandent à l’État.
Seulement l’argent nécessaire pour financer cette aide ne tombe pas du ciel. Il est prélevé, par le biais de l’inflation, sur le pouvoir d’achat des masses travailleuses.


L’IMPASSE MONÉTAIRE

La poursuite de la politique de subventions étatiques à l’économie capitaliste, qui avait conduit à l’effondrement du système monétaire international, ne peut bien évidemment que rendre plus fragiles encore les relations monétaires. Chaque État capitaliste tente de se parer des deux côtés : verser ce qu’il peut verser à son économie, donc alimenter
l’inflation ; mais en même temps, faire en sorte que l’inflation ne soit pas plus rapide chez soi que chez ses voisins, de manière à ne pas défavoriser son commerce extérieur. Le résultat d’une situation où chaque État poursuit avec plus ou moins de bonheur ses propres objectifs est l’anarchie complète.
Dans. le système de changes flottants qui est, aujourd’hui, à peu près général, la cote d’une monnaie varie continuellement. Même pas en fonction de la force ou la faiblesse relative de chaque monnaie par rapport aux autres, mais en fonction de l’anticipation que les spéculateurs en font. Or du fait de l’abondance internationale des monnaies et
des crédits, d’énormes quantités d’argent sont susceptibles de se déplacer d’un moment à t’autre, se changer d’une devise en une autre, et changer leurs cotes respectives. En réalité, la situation d’une monnaie par rapport à une autre n’a plus qu’un rapport lointain avec la réalité économique. Une monnaie sous-estimée par rapport à une autre un jour, peut être surestimée le lendemain, sans que cette évolution puisse être prévisible.
Le dollar par exemple était coté 3,85 F à son cours le plus bas en automne 1973. Vers mars 1974, il était coté 5,35 F En cette année 1975, le dollar était coté avant les vacances à 3,99 F, pour atteindre fin septembre 4,58 F !
Autrement dit, en l’espace de quelques mois, des fluctuations de l’ordre de 15 % et plus. On imagine les effets de telles fluctuations sur le commerce international : l’exportateur est incapable de prévoir à 15 % près le prix exact qu’il touchera pour sa marchandise.
L’instabilité monétaire ajoute donc ses effets à ceux du rétrécissement du marché et de la politique protectionniste des États pour ralentir le commerce international. Ce ralentissement se dessinait à la fin de 1974, il est devenu à quelques exceptions près général en début de 1975. D’effet il devient cause, et pèse d’autant plus sur les activités économiques d’un pays que celui-ci dépend davantage du marché mondial. C’est en particulier le cas des pays européens.
Il est à noter ici que si les balances des paiements des grands pays capitalistes ; pour la plupart fortement déficitaires en 1974 du fait en particulier du renchérissement du prix du pétrole, le sont nettement moins cette année, c’est en général parce que les importations ont été ralenties et non pas parce que les exportations ont été accrues de manière notable. C’est en particulier le cas de la France, qui a résorbé le déficit de son commerce extérieur en pesant sur les importations. Les interventions des États pour équilibrer leurs comptes avec l’extérieur sont allées dans le sens du protectionnisme, dans le sens d’un ralentissement des courants d’échanges.


CHANGEMENT DES RAPPORTS DE FORCES

La crise met définitivement fin aux velléités des puissances impérialistes de seconde zone, européennes ou japonaise, de contester l’hégémonie économique des États-Unis.
Ayant développé leur économie sur la base d’une énergie bon marché, favorisées sur le marché mondial par la dépréciation du dollar, les bourgeoisies européennes et japonaise pouvaient avoir l’illusion d’avoir comblé en partie l’énorme écart qui les séparait de la bourgeoisie américaine. En durcissant son attitude pour sauvegarder ses positions
malgré la crise, l’impérialisme américain remet les choses à leur place.
Parce que l’économie américaine dépend moins des importations de pétrole que ses concurrentes ; parce que le prix de l’énergie était dans le passé plus élevé aux États-Unis qu’ailleurs, la hausse du prix du pétrole qui a frappé de plein fouet les économies européennes, avantage les positions des États-Unis relativement à ses concurrents.
De surcroît, l’augmentation du prix du pétrole sur le marché mondial revalorise et rentabilise à la fois le pétrole américain, mais aussi les énergies de substitution dont il a le quasi monopole.
Ce changement de fond ajouté à l’utilisation du dollar comme arme économique font que les États-Unis sont en passe de retrouver les positions commerciales sur le marché international qui avaient été menacées auparavant. En reflet de cette situation, la balance commerciale américaine, largement déficitaire en 1972 et 1974, s’annonce largement excédentaire cette année. Changement obtenu. en partie, certes, en pesant de façon protectionniste sur les importations, mais aussi, et contrairement à la plupart des autres pays capitalistes, en développant, au détriment de ces derniers, les exportations américaines.
La crise n’a pas seulement accentué la domination de l’économie de l’impérialisme le plus puissant par rapport aux autres puissances impérialistes, mais a également renforcé la domination globale de l’impérialisme sur les pays du Tiers-Monde.
Le renchérissement du prix des produits manufacturés a détérioré de façon brutale les termes de l’échange entre pays développés et pays sous-développés. Les pays semi-développés qui, dans la situation de relative prospérité antérieure, cherchaient à prendre une position sur le marché mondial pour leurs produits industriels, voient leurs espoirs s’envoler devant l’intensification de la guerre commerciale. Et ce qui est encore plus dramatique, c’est que les principaux produits alimentaires sont également contrôlés par les puissances impérialistes et la hausse de leur prix sur le marché mondial
menace d’une famine particulièrement grave.
La crise n’a évidemment pas les mêmes conséquences catastrophiques sur l’économie de ces quelques pays sous-développés qui sont grands exportateurs des quelques matières premières devenues plus chères, comme le pétrole.
Cependant, si les classes dirigeantes de cas pays ont obtenu un accroissement important de leur part dans le partage mondial de la plus-value, il est illusoire de croire que les économies de ces pays peuvent s’engager sur la voie d’un développement harmonieux, permettant de mettre fin au retard sur les pays impérialistes. Un tel développement
nécessiterait un bouleversement révolutionnaire des structures économiques et sociales archaïques de ces pays, ce que les classes dirigeantes locales ne souhaitent pas, et surtout que l’impérialisme ne tolère.
Il est tout aussi illusoire de croire qu’une nouvelle puissance financière arabe serait née, et qu’elle serait susceptible de contester celle des grands pays impérialistes. La puissance financière des pays impérialistes repose sur une économie nationale puissante, même si cette puissance financière s’exerce parfois à l’échelle de la planète.
Avec des économies nationales sous-développées, l’Iran, l’Iraq ou autre Arabie Saoudite non seulement ne peuvent pas prétendre à une place dans la direction financière du monde capitaliste, mais n’ont pas d’autre choix que de reverser leur argent à la disposition des banques et des monopoles (en particulier pétroliers d’ailleurs) des grandes puissances impérialistes établies.


CONCENTRATIONS ET MALTHUSIANISME ÉCONOMIQUE

La crise renforcera inévitablement le mouvement de concentration des capitaux, en particulier au profit des grands monopoles, multinationaux ou non.
Ces groupes et ces monopoles tirent leur épingle du jeu face à la crise, en réduisant leur production – parfois au-delà du rétrécissement du marché – et en augmentant leurs prix de façon considérable.
Les grands trusts du pétrole ont donné l’exemple à titre en quelque sorte préventif. Les bénéfices des trusts pétroliers se sont accrus dans des proportions importantes précisément au moment d’un recul de la consommation mondiale du pétrole, recul qu’ils ont contribué à provoquer avant même que la crise se développe. Grâce à ces bénéfices, les trusts pétroliers ont accentué leur mainmise sur d’autres secteurs de l’énergie (mainmise
réalisée antérieurement) concentrant ainsi de nouveaux domaines sous l’autorité de leurs capitaux.
A une autre échelle, et d’une autre manière, les quelques groupes qui dominent en France l’industrie automobile ont réagi face au rétrécissement de leur marché non pas en abaissant leurs prix, mais au contraire en les augmentant de façon considérable. La loi de l’offre et de la demande, alibi du système capitaliste dans bien des cas, n’a pas cours pour les grands groupes.
La concentration des capitaux pendant la crise est encore favorisée par les États, dont les aides et les subventions sont destinées aux plus puissants des groupes capitalistes.


L'OFFENSIVE BOURGEOISE ET LE PROLÉTARIAT

Dans l’état actuel des choses, déjà, la crise s’est traduite par une offensive de la bourgeoisie contre les conditions de vie des travailleurs. L’accroissement du chômage, y compris les diverses formes de chômage partiel, comme l’aggravation de l’inflation traduisent cette offensive, destinée à tenter de sauvegarder le capital et la profit des capitalistes,
au détriment de la classe ouvrière.
Si la crise ne s’approfondit pas et ne s’allonge pas, les États bourgeois chercheront à atténuer quelque peu le poids de cette offensive pour éviter les réactions violentes de la part d’un prolétariat qui, malgré la nature et la politique de ses grandes organisations, n’a nulle part subi de défaites majeures et a gardé intactes ses forces dans tous les
grands pays capitalistes.
C’est ce but que visent toutes les mesures dites sociales ou d’aides diverses aux chômeurs etc., prises par les États capitalistes. Mais ces mesures ont nécessairement un caractère limité.
La prolongation et l’approfondissement de la crise ne peuvent que rendre l’offensive de la bourgeoisie plus brutale. Si les bourgeoisies les plus puissantes ont dans une certaine mesure la possibilité de sauvegarder leurs positions au détriment des bourgeoisies plus faibles, elles ne peuvent, les unes et les autres, sauvegarder globalement leurs profits qu’au détriment de la classe ouvrière.
Tout dépend maintenant de la combativité de la classe ouvrière, et de sa cohésion autour d’un programme de lutte. Avancer un tel programme et contribuer à forger cette unité, sera la tâche de toutes les organisations ouvrières dans l’ensemble du monde capitaliste touché par la crise.

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