- Accueil
- Lutte de Classe n°41
- Deux conférences internationales
Deux conférences internationales
Ainsi que tous les ans, nous avons organisé dans le courant du mois d'octobre une conférence internationale ouverte aux organisations qui se réclament de la révolution prolétarienne. Elle était la septième conférence de ce genre. Huit organisations ont participé à cette conférence : Lotta Communista et Lotta di Classe (Italie), International Socialism et International Communist League (Grande Bretagne), Combat Ouvrier (Antilles), Spark (USA), Union Africaine des Travailleurs Communistes Internationalistes (émigration africaine en France) et Lutte Ouvrière.
Cinq sujets ont été débattus au cours de la conférence. Lutte Ouvrière a présenté trois rapports respectivement sur la situation politique en France, sur la situation en Espagne, enfin un bilan sur les événements au Portugal. Lotta Communista de son côté a présenté deux rapports, l'un consacré à la situation en Italie, l'autre intitulé « la situation internationale et le cycle des luttes de classes dans les métropoles impérialistes ».
La confrontation sur ces différents problèmes - confrontation qui a mis en lumière à la fois des divergences d'appréciation sur les situations en Espagne et au Portugal, et des divergences politiques sur l'attitude des révolutionnaires à l'égard des grands partis réformistes - a été suivie d'un tour de table à l'occasion duquel chaque organisation faisait un court bilan de son activité de l'année écoulée.
Lutte Ouvrière a été partie prenante dans l'organisation d'une autre conférence internationale, tenue dans le courant du mois de novembre ouverte aux organisations trotskystes.
Cette conférence fait suite à l'adresse au mouvement trotskyste signée par Lutte Ouvrière, Spark, Combat Ouvrier et l'UATCI. Dans cette adresse (cf Lutte de Classe n° 34 février 1976) les signataires invitaient toutes les organisations trotskystes reliées ou non à l'un des organismes internationaux existant, à une rencontre qui se donnerait pour but la mise en place d'un cadre de discussion et de travail en commun.
En lançant cette invitation, les signataires n'espéraient bien évidemment pas pouvoir réunir, par la grâce d'un seul appel et par on ne sait quel miracle, tous les courants du mouvement trotskyste international autour d'une même table. Mais ils tenaient avant tout à faire un geste politique en direction de l'ensemble du mouvement trotskyste. Ce dernier est divisé, émietté à l'échelle internationale comme à l'intérieur de la plupart des pays, entre plusieurs courants vivant des vies organisationnelles indépendantes et en général concurrentes. Non seulement il n'existe ni une organisation internationale dont les différents courants trotskystes acceptent la discipline, ni une direction internationale dont ils puissent accepter l'autorité, mais de plus les différents courants ignorent mutuellement, quand ils ne sont pas en état d'hostilité déclarée.
Les signataires estiment que, quelles que soient les divergences, il est à la fois possible et nécessaire pour les différents courants de confronter leurs expériences ainsi que leurs positions politiques et de faire ensemble tout ce qu'il est possible de faire ensemble. Cela est possible à condition d'avoir un certain sens des responsabilités non pas seulement à l'égard de son propre courant, mais envers l'ensemble du mouvement. Cela est nécessaire car quelque soit l'idée que l'on puisse se faire sur les voies de la reconstruction d'une direction internationale unique et reconnue par tous, il est évident que l'absence de relations, d'échanges et de confrontations ne peut que rendre la tâche plus difficile.
Les signataires tenaient donc à attirer l'attention du mouvement trotskyste sur ce problème, entamer le débat sur cette question. Ils ont en même temps fait la proposition concrète de mettre en place précisément un cadre organisationnel permanent permettant la discussion politique, la confrontation des expériences et la coopération.
Deux réunions exploratoires ont été tenues pour préparer la conférence, les quatre groupes signataires de l'adresse ayant voulu donner la possibilité à tous les groupes qui voulaient bien s'associer à l'initiative de pouvoir le faire. De sorte que la conférence, destinée à décider de la mise en place d'un cadre permanent, a été organisée par six groupes : CO, UATCI, Spark, LO, ICL, Lega Communista. Cette dernière a décidé, en cours de conférence, de décliner sa qualîté d'organisateur pour celle d'observateur.
Outre ces six groupes, ont participé également à la conférence, en observateurs : le GBLI (Italie), IKL (Autriche), Tendance Spartaciste Internationale et un représentant du Secrétariat Unifié.
Dans la première partie de la conférence, fut débattue et décidée la création d'un comité de liaison international. Cinq des organisations présentes en ont décidé la formation. Elles ont voté des règles de fonctionnement (cf Annexe) correspondant à l'état actuel des relations entre les groupes en question, modifiables, ainsi qu'il est précisé, en fonction d'accords politiques et programmatiques plus poussés et en fonction de la capacité des groupes de discuter de leurs activités respectives.
La deuxième partie de la conférence fut consacrée à la discussion d'un certain nombre de problèmes politiques, à savoir : les raisons de la crise de la IVe Internationale et la situation au Portugal (présenté par Lutte Ouvrière), la situation en Italie (présenté par Lega Communista), la question irlandaise, (présenté par ICL).
L'ICL a soumis à la conférence deux motions, dont l'une protestant contre l'utilisation de la calomnie dans le mouvement trotskyste (cf ci-dessous), a été votée par la conférence. L'autre, consacrée à la lutte nationale en Irlande, n'a pas été retenue.
Cinq organisations qui s'associent à la création d'un « cadre permanent de discussion et de collaboration » c'est évidemment peu. Le cadre mis en place permet simplement aux organisations qui en font partie - et aux observateurs éventuellement - d'établir entre elles un certain type de relations que l'ostracisme des organismes internationaux à légard des groupes qui ne sont pas sur leurs positions ne permet pas d'établir dans un autre cadre. Mais il est évident que la confrontation loyale des expériences et des politiques entre différents courants trotskystes, que nous souhaitons, ne pourra se faire, ni exclusivement, ni principalement, dans ce cadre s'il reste ainsi limité.
Le fait que la plupart des courants trotskystes ne se sentent pas concernés sinon par le cadre que nous avons proposé, du moins par les préoccupations qui sont les nôtres, reflète très exactement la situation du mouvement trotskyste et démontre, malheureusement par la négative, la nécessité de multiplier les initiatives dans le sens de l'établissement de relations débarrassées du sectarisme au sein du mouvement trotskyste. Nous avons l'intention de continuer dans ce sens.
Les suites de nos propositions de politique unitaire en direction de l'ensemble du mouvement trotskyste ne se limitent d'ailleurs pas à la seule conférence trotskyste. C'est l'adresse au mouvement trotskyste, à l'origine de cette conférence, qui est également à l'origine d'un début de dialogue avec le Secrétariat Unifié. Ce dialogue se concrétise aujourd'hui par un certain nombre de propositions du SU à partir desquelles une collaboration unitaire de nos deux courants est possible.
Motion
Les organisations ouvrières soussignées condamnent par la présente résolution la campagne de calomnies menée contre Joseph Hansen et George Novack par le WRP, et ceux qui font écho à cette campagne à l'échelle internationale.
Il s'agit là d'une campagne de division venimeuse et anti-ouvrière.
Certaines de nos organisations ont des divergences politiques importantes avec Hansen, Novack et le SWP, mais elles défendent leur politique sur la base de méthodes prolétariennes du débat de principes, et pas par le recours aux méthodes staliniennes de diffamation et de calomnies. Les accusations du WRP à l'encontre de Hansen et de Novack se réduisent au fait que ceux-ci ont refusé de se lancer dans une chasse aux sorcières généralisée à propos de la présence possible d'agents staliniens. Mais si cela suffit à condamner Hansen et Novack, cela aurait suffi aussi à condamner James P. Cannon et Léon Trotsky lui-même, qui ont toujours refusé de s'engager dans un régime permanent de chasse aux sorcières.
De la même manière, les organisations soussignées condamnent la campagne de l'OCI, accusant sans l'ombre d'une preuve Michel Varga d'être à la fois un agent du GPU et de la CIA, et le recours aux violences physiques utilisées contre les militants de la Ligue Ouvrière Révolutionnaire, comme contre d'autres militants révolutionnaires ayant tenté de s'interposer lors de ces incidents. Il s'agit là aussi de méthodes staliniennes qui doivent être vigoureusement bannies du mouvement trotskyste, comme du mouvement ouvrier tout entier.
Dans les deux cas, ceux qui sont vraiment coupables d'actions répréhensibles sont les dirigeants du WRP et de l'OCI, qui tentent de régler des problèmes politiques en recourant à ces campagnes indignes de calomnies.
er novembre 1976 motion signée par ICL - LO - Combat Ouvrier - UATCI - Spark (groupes invitants à la conférence) IKL - LC (FMR) (groupes participant à titre d'observateurs)
Règles de fonctionnement
- Considérant l'émiettement des organisations qui se réclament du trotskysme, l'inexistence, même, de confrontations loyales ;
- considérant que toutes les organisations d'accord pour créer un cadre de discussion sont d'accord sur les points suivants
1 ) la nécessité de reconstruire une Internationale centraliste démocratique dans la tradition politique de la IVe internationale de Trotsky ;
2) le fait qu'un cadre permettant un débat ouvert entre tous les courants qui se réclament du trotskysme et une discussion sur un bilan critique de l'évolution du mouvement trotskyste depuis la mort de Trotsky puisse jouer un rôle positif dans cette reconstruction (bien que les différentes organisations continuent à avoir des idées différentes sur ce que peut être exactement ce rôle positif ainsi que sur les moyens et les méthodes pour reconstruire l'Internationale) ;
- considérant qu'il est en tout état de cause nécessaire d'établir des relations internationales entre organisations qui ne partagent pas les ostracismes des regroupements internationaux existants.
Les organisations soussignées décident la formation d'un cadre permanent de discussion et de collaboration. Dans ce but, un comité de liaison international est mis en place.
Ce comité de liaison international n'est pas destiné à être un organisme international supplémentaire, concurrent de ceux qui existent. Il ne cherchera pas une unanimité de façade entre les organisations qui le composent, ni à parvenir à des textes de compromis cachant les divergences.
Il est destiné à permettre la confrontation loyale entre les différents groupes qui le composent, aussi bien sur les divergences programmatiques que sur l'analyse des questions politiques d'actualité, ainsi que sur la politique concrète de chacun des groupes.
Il est destiné, par ailleurs, à examiner concrètement l'aide politique et organisationnelle que les différents groupes souhaitent et peuvent mutuellement s'apporter.
Les règles de fonctionnement actuelles du comité de liaison sont définies comme suit
1 ) Le comité de liaison international est ouvert à toute organisation trotskyste, qu'elle appartienne à un regroupement international ou non.
2 ) Toutes les organisations participantes doivent s'affirmer publiquement trotskystes soit dans leurs programmes, soit dans leurs publications, et se réclamer de la IVe Internationale. Elles doivent exister en tant que groupes, c'est-à-dire, au minimum, avoir un texte programmatique et une publication régulière.
3 ) L'adhésion d'un nouveau groupe correspondant aux critères. ci-dessus est admise aux seules conditions que le groupe en exprime le désir et qu'il soit parrainé par deux groupes déjà membres du comité de liaison.
4 ) Tout groupe qui remplit ces conditions mais qui ne souhaite pas participer de plein droit au comité de liaison, peut participer à ses discussions en qualité d'observateur. Pour l'admission en tant qu'observateur, de tout groupe qui ne remplit pas intégralement ces conditions, il faut l'accord de toutes les organisations du comité de liaison.
5 ) Le mode de fonctionnement du comité de liaison est la tenue d'une conférence trimestrielle regroupant les organisations membres et les éventuels observateurs. Le calendrier de ces conférences est établi d'un commun accord.
6 ) L'inscription d'un point à l'ordre du jour d'une de ces conférences trimestrielles est automatique, même si la demande n'émane que d'un seul groupe, à la condition qu'elle soit faite à la conférence précédente ou, en tous les cas, assez tôt pour que les autres participants puissent en prendre connaissance avant la réunion.
7 ) La proposition de mettre à l'ordre du jour un nouveau point pourrait être faite le jour même de la réunion, à condition que la majorité simple des groupes participants soit d'accord pour l'inscription.
8 ) Chaque organisation participante a le droit de rendre publics les débats et les positions des uns et des autres, en son nom et dans ses propres publications.
9 ) Si le comité de liaison décide l'édition d'une revue afin de rendre publiques, de manière commune, les discussions engagées, cette revue sera publiée sous l'autorité du comité dans son ensemble, suivant des modalités à définir d'un commun accord.
10 ) Tout compte-rendu, comme plus généralement toute résolution, toute prise de position politique, rendus publics au nom du comité de liaison international, doit avoir l'accord unanime de tous les groupes.
11 ) Le secrétariat mis en place par le comité pour assurer la circulation des documents de la conférence ou des différents groupes, est un organisme purement technique. Il n'est habilité à prendre aucune décision politique et il n'est mandaté ni pour s'exprimer, ni pour agir au nom du comité de liaison international.
Ces règles de fonctionnement correspondent à l'état actuel des relations entre les organisations participantes. Elles pourront évoluer en fonction d'un accord programmatique et politique, ainsi qu'en fonction de la capacité des différents groupes à discuter avec compétence la politique des autres.