- Accueil
- Lutte de Classe n°13
- Pasaron
Pasaron
Une légion étrangère qui s'empare de la direction d'un pays d'Afrique du Nord et qui menace de traverser la Méditerranée pour imposer sa loi, c'est ce qui s'est passé le 17 juillet 1936 au Maroc espagnol alors que Franco, assumant le commandement des Maures et des Légionnaires du Maroc espagnol, diffusa par radio un manifeste aux garnisons espagnoles leur ordonnant de prendre le pouvoir dans leurs villes respectives.
Les points de ressemblance avec le putsch d'Alger n'ont pas été sans être remarqués par beaucoup et les instigateurs du putsch les avaient certainement en mémoire. La présence de Malraux au sein du gouvernement de Paris ajoutait du piquant à ce rappel historique. Mais les trois années de guerre civile et l'instauration pénible de la dictature franquiste faisaient peut-être également réfléchir certains.
Evidemment, d'un côté trois années de guerre civile, de l'autre, quatre jours d'état d'alerte, cela ne parait guère comparable. L'Espagne de 36 se trouvait dans un contexte international différent qu'elle a contribué à assombrir. Tandis qu'en Allemagne et en Italie le fascisme triomphait et devait durant la guerre civile apporter une aide matérielle importante à Franco, dans le pays même, comme en France à la même époque, les élections donnèrent une majorité « de gauche » reflétant le mouvement montant de la lutte des travailleurs espagnols. Les partisans de la dictature militaire allaient se décider à frapper pour prendre la place du gouvernement républicain Azana qui était soutenu par le Front Populaire.
A l'appel de Franco, une grande partie de l'armée rejoignait la rébellion le 18 juillet alors que le gouvernement déclare que personne en Espagne ne s'est joint à une entreprise aussi absurde, on apprend que Séville, Navarre et Saragosse sont aux mains des insurgés.
Les syndicats demandent au gouvernement d'armer les ouvriers. Pour justifier son refus, le gouvernement répond que tout va bien. Le 19 juillet, Azana essaie de séduire les chefs militaires en faisant démissionner Casares Quiroga, membre de son propre parti et en le remplaçant par un homme de « bonne » réputation, Barrio. Mais une telle complaisance ne fait que renforcer les exigences de la junte militaire qui demande la démission pure et simple du gouvernement. Pendant ce temps, les garnisons les unes après les autres, se rallient à Franco. Ainsi, pendant ces deux jours décisifs, le gouvernement républicain paralysé ne bouge pas tandis que le Front Populaire déclare gravement qu'il « se résoudra avec sérénité et impartialité à intervenir dans le conflit aussi rapidement que son intervention sera réclamée ». Comme à Madrid, le gouvernement catalan refuse d'armer les ouvriers, mais ceux-ci, et notamment les militants de la CNT, avec les quelques armes de fortune qu'ils peuvent trouver vont s'attaquer aux casernes et grâce à celles-ci et surtout à leurs armes politiques c'est-à-dire à la discussion avec les soldats, vont s'emparer des casernes et des arsenaux le 19 juillet. Les travailleurs de Madrid encouragés par l'exemple de Barcelone, feront pareil le 20 juillet, puis Valence suivra.
Devant l'apparition des milices ouvrières, le gouvernement Républicain procède par décret à la « création » des milices le 21 juillet, afin d'essayer de leur donner une forme légale et de les absorber au sein des forces gouvernementales.
ère D.I. à Madrid, la IIIe à Valence, la IVe à Barcelone, deux régiments de cavalerie, un régiment de chars un régiment d'artillerie à cheval, un groupe d'artillerie anti-aérienne, douze batteries de campagne, trois bataillons de génie, le régiment des chemins de fer et diverses petites unités (l'armée régulière comprenait plus de cinq cents généraux en réserve et en activité, 15 000 officiers, 35 000 gardes civils, tous factieux ou sympathisants factieux) Quant aux 100 000 hommes de troupe, éléments essentiellement paysans, ils se trouvaient en cette période pour les trois quarts encadrés par les factieux sauf ceux qui furent touchés par la propagande des travailleurs.
Acculés à se défendre, le gouvernement républicain tente de mobiliser à la fin du mois d'Août, les classes 33-34-35. Le 24 octobre, un décret de la Généralité de Catalogne portait sur la mobilisation des classes de 35 à 32.
Et c'est ainsi que commence le dernier drame qui précède la Seconde Guerre mondiale et qui, malheureusement, on le voit aujourd'hui, ne servit pas de leçon aux bureaucraties ouvrières, social-démocrate ou stalinienne, qui se trouvent toujours lorsque le fascisme menace, à la remorque des gouvernements « républicains ».