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- Lutte de Classe n°27
- 50 mégatonnes de mépris
50 mégatonnes de mépris
La reprise des essais nucléaires par l'URSS a provoqué des réactions plus importantes qu'on ne s'y serait attendu, à une époque aussi habituée que la nôtre, à ce que l'importance des arguments se mesure en tonnes de TNT et à ce que, tant à l'intérieur qu'à l'échelle internationale, les bombes de tous calibres et de tous genres soient des facteurs politiques de première importance.
Nous n'avons nullement l'intention de nous associer au choer de cette presse qui, depuis des organes d'extrême-droite jusqu'à ceux de gauche, ne cesse de pousser des cris d'horreur, d'invoquer l'humanisme, de pleurnicher ou de crier à l'assassin. Sans contester les dangers très réels de toute explosion, même expérimentale, on ne peut s'empêcher de sentir une certaine répugnance devant l'attitude quelque peu hypocrite de ceux qui parlent d'actes ignobles et inhumains, ou de nécessité impérieuse pour la défense du monde libre, suivant que l'explosion eut lieu en Sibérie ou dans la Sierra Nevada.
Tous ceux pour qui l'URSS, malgré la bureaucratie, les Staline et Krouchtchev, représente une partie des conquêtes socialistes de la Révolution d'Octobre, comprennent que tant que l'existence des pays impérialistes fait planer sur le monde le danger permanent d'une troisième guerre mondiale, l'Union Soviétique, qui en serait la première victime, doit être armée et, si possible, mieux et plus armée que les pays capitalistes. Mais justifier la bombe soviétique équivaut à condamner toute la propagande antérieure des Partis communistes et assimilés. Pendant de nombreuses années tout l'effort des propagandistes était de faire de l'URSS le champion du désarmement.
C'est dans cette optique que l'Union Soviétique a proposé, à maintes reprises, le désarmement général, qu'elle a décidé en 1958 d'interrompre les expériences nucléaires et que Krouchtchev traitait, il n'y a pas longtemps, de criminel celui qui reprendrait ces mêmes expériences.
Or, de deux choses l'une : soit la bureaucratie croit effectivement en la possibilité d'un désarmement général, auquel cas elle fait preuve d'une incompréhension totale du régime capitaliste ainsi que d'une ignorance non moins totale de la pensée de Lénine qui écrivait que : « Revendiquer le désarmement équivaudrait à répudier complètement le point de vue de la lutte de classe », ou elle n'y croit pas - ce que ses actes semblent justifier - et dans ce cas, c'est une escroquerie envers les masses.
Non seulement elle les trompe en entretenant des illusions fausses, mais en la mobilisant pour des objectifs que l'URSS est la première à renier, elle montre à quel point elle fait peu de cas de ce que les masses peuvent penser et ressentir.
La bureaucratie russe, on le voit là, méprise profondément les masses, que ce soit le prolétariat mondial ou les peuples coloniaux, et si elle ne refuse pas de se servir d'elles, elle se refuse à les considérer comme facteur conscient.