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France : Que faire dans les syndicats ? 1 - L'activité des révolutionnaires à la CGT
Nous avons montré antérieurement [[ Voir Lutte de Classe N° 1 - Les militants révolutionnaires et les syndicats]] que dans les conditions qui existent actuellement en France, une organisation révolutionnaire doit, dans le domaine syndical, attacher une importance toute particulière à la CGT, confédération syndicale qui, par son importance et sa composition sociale, occupe une place privilégiée dans le mouvement syndical français.
Mais pour les révolutionnaires, militer à la CGT n'est pas chose facile car, sauf dans certains secteurs extrêmement marginaux, qui échappent plus ou moins au contrôle de l'appareil stalinien, et où l'activité militante revêt par là-même un caractère secondaire, il est à l'heure actuelle absolument impossible, pour un révolutionnaire, de militer à visage découvert à la CGT Non seulement il n'est pas possible de défendre ouvertement le programme révolutionnaire au sein de la CGT, mais le simple fait d'être étiqueté comme trotskyste, ou comme « gauchistes », ou d'être soupçonné de l'être, suffit le plus souvent à faire mettre un militant à l'écart de toute activité syndicale, sinon à le faire exclure.
C'est dire que l'ouvrier révolutionnaire militant à la CGT se voit tenu à une véritable conspirativité par rapport à l'appareil, non seulement dans son activité syndicale, mais évidemment par la même occasion, dans toute son activité à l'entreprise.
Et le problème se complique encore du fait que l'activité des militants révolutionnaires au sein des entreprises ne saurait se limiter au seul syndicat. Pour importante qu'elle soit, l'activité syndicale n'est en effet qu'une partie de l'activité des militants révolutionnaires et il est en particulier absolument nécessaire que ceux-ci possèdent une expression publique large, de masse, au soin des entreprises.
Ne pas se donner un moyen d'expression s'adressant à tous les travailleurs, syndiqués et non syndiqués, c'est en effet se condamner à ne faire connaître ses idées et son programme - avec bien des limitations, comme nous venons de le voir - qu'à une toute petite minorité de travailleurs, minorité agissante peut-être, mais pas toujours dans le bon sens puisqu'elle se confond souvent avec l'appareil. Et si les militants révolutionnaires ont le devoir de militer dans les organisations syndicales, ils ont aussi celui de militer au sein de l'ensemble de la classe ouvrière, et de prendre leurs responsabilités politiques vis-à-vis de l'ensemble des travailleurs, en leur nom propre et pas seulement par personne (syndicale) interposée.
Or il est évident que l'apparition, ou l'existence, d'une presse révolutionnaire locale dans une entreprise ne peut que susciter la méfiance de l'appareil, et que l'inciter à la « chasse aux trotskystes », rendant par là plus difficile encore l'activité syndicale des militants révolutionnaires.
Parce que nous sommes convaincus de l'importance capitale d'une expression politique des révolutionnaires dans les entreprises, nous nous efforçons de mener ces deux tâches de front : dans toutes les entreprises où existent des militants de notre tendance, ceux-ci publient un bulletin politique régulier destiné à l'ensemble de leurs camarades de travail (il existe actuellement deux cents de ces bulletins, publiés dans les principales entreprises du pays, et correspondant à des groupes d'entreprise plus ou moins développés), l'apparition politique étant la première tâche de nos camarades, ce qui ne veut pas dire pour autant qu'ils négligent l'activité syndicale.
Mais la nécessité de mener parallèlement ces deux tâches complémentaires est malheureusement bien loin d'être reconnue par l'ensemble de ce qu'on appelle communément les « gauchistes », car la plupart de ceux qui reconnaissent l'importance de l'activité syndicale renoncent bien souvent à l'apparition politique dans les entreprises pour ne pas rendre la première trop difficile, et beaucoup de ceux qui interviennent politiquement dans les entreprises ont reculé devant les difficultés de l'activité syndicale, ont déclaré celle-ci inutile, voire négative et ont abandonné les syndicats aux appareils.
C'est ainsi que l'exemple le plus typique du premier cas est celui des militants d'entreprise du PSU (que l'appareil stalinien tolère pourtant plus facilement que ceux des organisations révolutionnaires) qui ont généralement renoncé à toute intervention politique à l'usine. En dehors d'événements rarissimes, on ne voit guère, en effet, de tracts PSU. dans les entreprises, et les exceptions sont le plus souvent des tracts très généraux, mettant rarement en cause le rôle des appareils syndicaux, surtout au niveau local.
La pratique syndicale du PSU est d'ailleurs le plus bel exemple d'opportunisme que l'on puisse donner en ce domaine. Le PSU se déclare en effet opposé par principe, à tout travail de fraction au sein des syndicats, ce qui ne serait que pure hypocrisie si les militants du PSU défendaient la politique de leur parti dans leurs organisations syndicales... mais ce qui est presque honnête dans la mesure où il n'y a pas de politique syndicale du PSU, et où celui-ci, au nom de ses principes «anti-fractions», préfère laisser chaque militant libre d'adhérer à la confédération de son choix, et d'y mener sa propre politique sans aucun contrôle. Ces deux aspects de la politique du PSU, renoncement à l'expression politique au sein des entreprises et refus de toute intervention en tant que parti dans la vie syndicale, expliquent la relative tolérance dont les militants du PSU sont l'objet de la part des appareils.
Mais une telle adaptation opportuniste au syndicalisme n'est pas le propre du PSU, organisation centriste se réclamant elle-même du « droit à l'équivoque », elle se retrouve aussi chez certains groupes révolutionnaires se réclamant du trotskysme.
L'OCI (section française du Comité International avant la scission de celui-ci), qui se veut pourtant aux antipodes politiques du PSU, a une pratique qui, sur ce terrain-là, n'est pas très différente par bien des aspects. Les interventions politiques de ces camarades dans les entreprises sont en effet aussi rarissimes, se limitant à de sporadiques tracts de soutien à la campagne du moment de cette organisation. Et si l'OCI, qui se réclame du centralisme démocratique, mène une politique différente du « laisser faire, laisser aller » du PSU, loin de revendiquer pour les révolutionnaires le droit de constituer des fractions au sein des syndicats, elle multiplie les références à la Charte d'Amiens (texte fondamental de l'anarcho-syndicalisme français proclamant la nécessité de l'indépendance des syndicats par rapport aux organisations politiques), en particulier dans l'activité de ses militants au sein de Force Ouvrière.
Quant aux organisations qui ont donné naissance à la ligue Communiste, elles n'ont découvert qu'après Mai 1968 la nécessité d'une presse révolutionnaire d'entreprise, et considéraient avant cette date une telle activité comme objectivement provocatrice. Et ce soudain changement d'attitude (qui ne donna pas lieu à plus d'explications que l'abandon de l'entrisme) serait entièrement positif si le contenu des bulletins d'entreprise de la Ligue Communiste n'était pas parfois plus influencé par le désir de flatter telle ou telle centrale syndicale (dans laquelle militent ses militants locaux) plutôt que par la nécessité de combattre la politique de tous les appareils bureaucratiques sans exception.[[Voir Lutte Ouvrière n°186]]
A l'opposé de ces déviations syndicalistes, se situe bien sûr la position du courant mao-spontanéiste, qui publie une presse d'entreprise plus ou moins régulière (en régression d'ailleurs par rapport à la période qui a immédiatement suivi Mai 1968), mais qui a complètement renoncé à toute activité dans les syndicats, et qui, loin d'essayer de faire prendre conscience aux militants syndicaux du contenu réel de la politique de leurs confédérations, met dans le même sac Séguy, Maire, Bergeron, et les délégués du rang, et ne recule pas devant la pire démagogie.
Les militants ouvriers révolutionnaires doivent donc trouver un équilibre difficile entre l'attitude qui consiste à ne rien faire et à ne rien dire, dans le syndicat comme à l'extérieur, en attendant des jours meilleurs, pour éviter d'être exclus, et celle qui consiste à brandir ouvertement son drapeau, en se mettant par là-même, à court terme, dans l'impossibilité de militer au sein des syndicats en général, et de la CGT en particulier.
Pour parvenir à tracer correctement leur route, entre l'écueil de la soumission opportuniste aux appareils, et celui de l'impatience gauchiste, les militants révolutionnaires ne doivent jamais perdre de vue l'objectif qu'ils cherchent à atteindre par l'activité syndicale.
Si nous sommes partisans de militer à la CGT, ce n'est évidemment pas parce que nous croyons possible d'accéder à des responsabilités importantes dans le cadre de cette confédération, et encore moins d'y gagner la majorité à plus ou moins brève échéance. A partir d'un niveau relativement bas de la hiérarchie syndicale, l'appareil CGT n'est plus composé que de staliniens bon teint et cette emprise du PCF ne pourrait être battue en brèche, à l'échelle de la confédération, que dans le cadre d'une crise profonde du PCF lui-même ou d'une crise révolutionnaire, ou de la conjugaison des deux. Essayer de conquérir des responsabilités dans l'appareil syndical, en dissimulant complètement ses opinions à celui-ci, et sans que cela corresponde, et sans être soutenu activement par les travailleurs, ne peut que faire d'un militant révolutionnaire un otage de l'appareil, cautionnant purement et simplement la politique de celui-ci.
Si nous sommes partisans de militer à la CGT, c'est parce que les révolutionnaires ne peuvent espérer conquérir une certaine audience auprès des travailleurs, ne peuvent gagner leur confiance, et leur prouver du même coup la valeur de leurs idées, qu'en participant activement à toutes les luttes de la classe ouvrière, y compris les plus limitées, les plus humbles, et qu'en démontrant sur ce terrain-là leurs capacités à les animer à les diriger. Ce qui implique non seulement de militer dans les syndicats,, mais également de militer dans celui qui a le plus d'influence dans les luttes quotidiennes des travailleurs.
Le rôle des militants révolutionnaires, c'est de faire prendre conscience aux travailleurs de leur force et de leurs possibilités historiques. Cela signifie, bien sûr, opposer dans les luttes ouvrières une autre politique à la politique démoralisatrice et démobilisatrice de l'appareil stalinien. Mais cela signifie aussi combattre les méthodes de celui-ci, méthodes qui visent à empêcher la classe ouvrière de contrôler ses propres organisations, à assujettir les travailleurs aux appareils et qui sont, autant que la politique réformiste du PCF, un obstacle à la prise de conscience de la classe ouvrière.
C'est pourquoi la première tâche que devra se fixer le militant révolutionnaire appartenant à une section syndicale CGT sera de tout faire pour y créer une véritable vie syndicale.
Celle-ci est généralement inexistante. Les réunions de syndiqués sont rarissimes et peu fréquentées. L'activité syndicale est généralement dirigée par un petit nombre de membres de l'appareil, formant une « commission exécutive », d'ailleurs rarement élue dans les formes statutaires, et se confondant le plus souvent avec le collège de délégués... quand ce n'est pas avec la cellule du PCF Se faire inviter à de telles réunions, être présenté par le syndicat aux élections de délégués du personnel, n'est d'ailleurs souvent pas très difficile pour le nouveau syndiqué, non suspecté d'idées révolutionnaires, qui semble avoir envie de faire quelque chose, car le plus souvent l'appareil a bien du mal à trouver le nombre minimum de militants dévoués nécessaire pour faire fonctionner le syndicat, et pour occuper tous les mandats éligibles (délégués du personnel et délégués au Comité d'Entreprise) et non éligibles (délégués syndicaux et représentant syndical) auxquels il peut légalement prétendre. Dans ces cas-là, le nouveau militant CGT actif se verra vite coopté à la commission exécutive du syndicat (qui devrait pourtant être élue par l'ensemble des syndiqués), et pourra se retrouver assez rapidement élu délégué du personnel,, ce, qui multipliera évidemment ses possibilités d'intervention et de rayonnement dans l'entreprise.
La situation est cependant différente quand l'appareil est puissant, et que le PCF dispose des effectifs nécessaires pour occuper tous les rouages possibles de la section syndicale. Dans ce cas-là, le nouveau syndiqué pourra rester des mois avec sa carte an poche avant de pouvoir assister à sa première réunion. Sans que cela soit une règle absolue, cette situation est plus fréquente dans la région parisienne qu'on province, dans les grandes entreprises que dans les petites. Mais en tout état de cause, le poids de l'appareil stalinien dans l'entreprise déterminera dans une large mesure les possibilités d'action du militant révolutionnaire à l'intérieur du syndicat.
Quelles que soient les difficultés initiales rencontrées, l'axe d'intervention du militant révolutionnaire au soin de la CGT reste le même. Il s'agit de redonner aux travailleurs, syndiqués au non syndiqués, le goût de se réunir pour discuter de leurs problèmes, de leurs revendications, et des moyens de les faire aboutir. Il s'agit d'essayer de transformer le caractère des réunions existantes, le plus souvent rendues mortellement ennuyeuses par les méthodes bureaucratiques de l'appareil, de manière à ce que chacun des participants trouve de l'intérêt à se réunir régulièrement, Il s'agit de réintroduire au sein de la section syndicale des moeurs démocratiques, de manière à ce que les travailleurs se sentent concernés par les décisions adoptées, et que celles-ci traduisent effectivement leurs idées et leurs aspirations.
Sans doute tout cela constitue-t-il une tâche bien élémentaire. Mais c'est une tâche élémentaire qu'il est absolument indispensable d'effectuer dans les conditions actuelles, et qui s'avère à l'usage bien plus difficile que ce que peut imaginer celui qui ne connaît pas bien les problèmes de l'activité militante dans les entreprises.
En dépit du fait que le stalinisme ait désappris aux travailleurs le goût de l'organisation et de la démocratie, les difficultés ne viennent pas des syndiqués. Quand l'appareil ne s'y oppose pas ouvertement, il est relativement facile à la CGT, de réunir régulièrement un nombre non négligeable de syndiqués, et de créer une vie syndicale normale, parce que cette confédération attire un nombre suffisant de travailleurs qui sont prêts à consacrer un minimum de leur temps à l'activité syndicale (ce qui n'est pas toujours la cas à la CFDT, et encore moins à FO).
Mais sur ce terrain que certains jugent peu. « politique » (comme si l'apprentissage de la démocratie ouvrière par le prolétariat, condition indispensable de son affranchissement, n'était pas l'une des tâches les plus « politiques » des révolutionnaires !) l'appareil stalinien se défend généralement avec bec et ongles (parce qu'il est « politique », lui !). Et il est finalement plus prêt à tolérer l'opposant de service, qui fait son petit discours habituel lors de chacune des rares réunions, sans déranger vraiment le train-train bureaucratique du syndicat, que le militant qui, même plus discrètement, s'efforce de faire renaître un minimum de vie syndicale, de refaire du syndicat la propriété des travailleurs.
Et il faut quelquefois bien peu de chose pour déclencher la méfiance et les réactions de l'appareil. Demander la tenue de réunions syndicales, faire admettre la nécessité de leur régularité, est souvent le premier combat que devra livrer le militant révolutionnaire. C'est dire ce que sera la lutte pour imposer des moeurs démocratiques dans le syndicat,, ou pour défendre des revendications auxquelles l'appareil est violemment opposé, comme le retour immédiat aux quarante heures, ou le principe des augmentations de salaire égales pour tous, qui ne sortent pourtant pas la cadre des revendications économiques.
L'appareil est d'autant plus prompt à engager la lutte que celle-ci est le meilleur moyen d'empêcher les révolutionnaires de parvenir à leurs buts. Il ne s'agit pas seulement pour lui, en effet, de mettre les opposants on minorité par rapport à l'ensemble des syndiqués, ce qu'il fait quand il peut, mais ce qu'il ne peut pas toujours. Il s'agit aussi de créer dans le syndicat un climat détestable, qui éloigne les travailleurs de la vie syndicale. De ce point de vue, plus les méthodes utilisées sont anti-démocratiques calomniatrices et viles, et plus elles sont efficaces. Car s'il y a à la CGT bon nombre de travailleurs qui sont prêts à se réunir et à participer à la vie syndicale, il y en a évidemment beaucoup moins qui acceptent de se laisser insulter, calomnier, voire dénoncer nommément à la répression patronale, ou même qui acceptent tout simplement de participer à des réunions syndicales dans un tel climat. Sans doute ces méthodes risquent-elles d'amener un certain nombre de syndiqués à abandonner complètement le syndicat. Mais c'est un risque que l'appareil est prêt à courir, car le contrôle du syndicat est pour lui un impératif bien plus important que le recrutement, et il préfère des sections syndicales squelettiques, mais ne lui posant pas de problèmes, à des sections bien vivantes.
Les conditions de l'activité syndicale se sont dans l'ensemble sensiblement modifiées depuis 1968. La chasse aux militants révolutionnaires est devenue plus difficile pour l'appareil, d'une part parce que ceux-ci sont plus nombreux, d'autre part, surtout, parce que de nombreux jeunes travailleurs sont plus ou moins influencés dans leurs propos au dans leurs attitudes, par les «gauchistes», et qu'écarter systématiquement tous les jeunes suspectés de « gauchisme » amènerait l'appareil stalinien à se couper pratiquement toute possibilité de recruter de nouveaux éléments. Il lui a donc fallu s'adapter à la situation, et dans un certain nombre de cas au moins, essayer de « récupérer » un certain nombre de ces jeunes travailleurs plus au moins influencés par les idées révolutionnaires.
Ces conditions nouvelles font que, dans les affrontements avec l'appareil stalinien, les militants révolutionnaires sont souvent moins isolés que dans le passé, qu'il se trouve un plus grand nombre de syndiqués, loin de partager l'ensemble des conceptions des militants révolutionnaires, bien souvent, mais d'accord avec eux sur tel au tel point, pour s'engager à leurs côtés, en dépit des réactions des bureaucrates.
Mais il ne faut pas se faire d'illusions. Le rapport de forces entre les révolutionnaires et l'appareil stalinien reste globalement, et de façon très sensible, en faveur de ce dernier. Même s'il existe des entreprises où cet appareil est très faible, il possède sur les révolutionnaires l'avantage considérable d'exister à l'échelle nationale, de correspondre à un véritable milieu social, et de recruter de nouveaux éléments en bien moins de temps qu'il n'en faut, aux révolutionnaires, pour former des militants expérimentés et compétents.
C'est dire que, quelles que soient la compétence et la prudence des militants révolutionnaires qui la mènent, l'activité syndicale au soin de la CGT, en dehors de quelques entreprises échappant quasi complètement à l'appareil et (ou) n'intéressant guère celui-ci, débouche forcément, à un moment ou à un autre, sur une défaite : l'exclusion d'un ou de plusieurs militants, ou leur mise à l'écart de l'activité syndicale, parce que, même si les militants révolutionnaires ont su gagner la confiance de la majorité des syndiqués de leur entreprise, ou de leur secteur, ils sont pratiquement sans défense devant les décisions prises par les instances supérieures de l'appareil, rapidement exclusivement composées, dès qu'on s'élève un peu dans la hiérarchie, de staliniens bon teint.
La défaite est d'autant plus certaine que, contre les révolutionnaires, tous les coups sont permis. Quand il n'est pas possible de les mettre en minorité au cours d'une réunion, même en faisant appel au ban et à l'arrière-ban des sympathisants du PCF qui ne participent d'habitude jamais à une réunion syndicale, l'appareil organise dos votes « par correspondance », absolument incontrôlables, et s'il ne parvient pas à ses buts dans la cadre de ses propres statuts (qu'il interprète pourtant dans le sens qui lui convient), il n'hésite pas bien souvent à les violer ouvertement, quitte à anéantir toute une section syndicale si besoin est.
Mais de telles défaites, inévitables encore une fois à un moment ou à un autre, ne doivent pas détourner les militants ouvriers révolutionnaires de l'activité au sein de la CGT. Et si elles laissent sur le moment un goût amer, c'est pourtant au travers de telles luttes que les militants révolutionnaires enrichissent leur expérience, accroissent leur compétence, et qu'ils peuvent le plus efficacement gagner du crédit auprès des travailleurs influencés par la CGT et le PCF.
Ce sont de telles défaites qui permettent de préparer les victoires de demain.
Si elle est infiniment plus difficile, moins confortable, que l'activité au sein de la CFDT ou de F,O., l'activité syndicale au sein de la CGT est de ce point de vue plus efficace et plus importante. C'est pourquoi elle ne doit être abandonnée que par des militants qui sont dans l'impossibilité matérielle de la poursuivre, soit parce qu'ils en ont été exclus purement et simplement soit parce qu'ils ont été réduits à la situation de porteur de carte n'ayant jamais la possibilité d'assister à une réunion.
Mais, dans ce cas-là, seuls les militants ayant été isolés par l'appareil peuvent quitter la CGT pour essayer de trouver une position de repli au soin de la CFDT ou de FO. Les autres, ceux qui peuvent continuer à militer à la CGT, doivent le faire, comme les nouveaux militants entrant dans l'entreprise doivent se syndiquer à la CGT, et y poursuivre le travail entrepris, Car si, pour nous, militer à la CFDT ou à FO peut être un choix tactique juste pour un militant mis dans l'impossibilité de militer à la CGT, ce ne peut en aucun cas être un choix politique, ni à l'échelle nationale, ni au niveau d'une usine.
Quant au sens qui doit être celui de notre travail au sein de la CFDT ou de FO, ce sera l'objet d'un article ultérieur.