Nouvelle-Calédonie : les anti-indépendantistes veulent se venger04/09/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/09/une_2927-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1262%2C1644_crop_detail.jpg

Leur société

Nouvelle-Calédonie : les anti-indépendantistes veulent se venger

Le 29 août, dans le cadre du renouvellement de la présidence du Congrès de Nouvelle-Calédonie, les anti-indépendantistes ont renversé son président kanak, Roch Wamytan, de l’Union calédonienne (UC).

Ce renversement fait suite au désistement des anti-indépendantistes en faveur de la candidate du petit parti de la communauté wallisienne et futunienne, qui jusque-là soutenait les partis kanaks. La crise sociale et politique ouverte par le projet de loi de Macron sur le corps électoral calédonien, qui a provoqué une légitime colère chez les Kanaks, se prolonge donc maintenant au sein des partis et des institutions. Les anti-indépendantistes, aidés par la présence de milliers de gendarmes venus de métropole, poussent leur avantage. Alors que le renouvellement de l’ensemble du Congrès doit se faire avant la fin de l’année, ils comptent bien disloquer le camp indépendantiste pour y récupérer la majorité ainsi que le gouvernement qui en dépend.

Sous cette pression, le FLNKS, le Front de libération nationale kanak et socialiste, continue de se fissurer. Il associe depuis les années 1980 plusieurs partis indépendantistes, parmi lesquels le Palika, l’UC et l’UPM. Ces partis ont signé les accords de Matignon et de Nouméa en 1988 et 1998 quand la France leur promettait, pour faire patienter les Kanaks, une « souveraineté partagée » au travers d’institutions et de postes créés sur mesure pour les y associer.

Au fil des années, les notables de ces partis se sont bel et bien intégrés. Ils gèrent deux des trois provinces et ont même pris la tête du Congrès et du gouvernement. Ils ont obtenu des postes dans l’économie. Quelques jours après l’explosion de colère du 13 mai, les notables du Palika se sont ouvertement désolidarisés de la jeunesse mobilisée, qui a débordé les cadres de la mobilisation fixés dans le cadre de la CCAT (cellule de coordination des actions de terrain). Ainsi, Louis Mapou, président du gouvernement du territoire, tout en dénonçant le dégel du corps électoral, a déclaré le 8 juin qu’il ne pouvait « pas croire un seul instant que l’émancipation à laquelle nous travaillons depuis des années se construise sur la destruction de ce que nous avons déjà réussi à réaliser ». Le 26 août dernier, c’est le président de la province Nord, Paul Néaoutyine, une personnalité du Palika, qui attaquait la CCAT, la rendant responsable du 11e mort, tué par la police le 15 août, et dénonçant sa « stratégie du chaos ».

Le Palika et l’UPM ont donc boycotté le congrès extraordinaire du FLNKS du 31 août. L’UC et la CCAT, qui en est une émanation, ne se sont pas désolidarisés de la jeunesse révoltée, affirmant seulement qu’il y avait eu des « débordements », et ils ont nommé Christian Tein, leader de la CCAT, président du FLNKS, alors qu’il est toujours emprisonné en France avec six autres militants. Mais ils ont aussi montré lors de ce congrès que leur perspective était de « renouer le dialogue avec l’État colonial » pour atteindre l’indépendance de la Kanaky qui est leur objectif.

À l’annonce de la nomination de Christian Tein, la droite anti-indépendantiste s’est déchaînée. C’est selon elle la preuve de la collusion de l’UC avec des « terroristes », et de son irresponsabilité. Elle veut que l’État français « coupe » des têtes pour faire des exemples et rende la vie dure aux Kanaks et aux Océaniens les plus pauvres. Dans la province Sud, les loyalistes ont déjà commencé à couper certaines aides, comme l’aide médicale, et certaines subventions, par exemple à l’île des Pins, qui a dû fermer ses services publics.

En Nouvelle-Calédonie comme ailleurs, la lutte contre l’oppression coloniale est inséparable de la lutte des travailleurs contre toutes les formes de domination de la bourgeoisie.

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