Niger : une mine de profits03/07/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/07/une_2918-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

Dans le monde

Niger : une mine de profits

Le 20 juin, la junte militaire nigérienne a retiré à l’entreprise française Orano le permis d’exploiter la mine d’Imouraren. C’est un des plus grands gisements d’uranium au monde, avec des réserves estimées à 200 000 tonnes. 20 % des importations françaises de ce matériau qui alimente les centrales nucléaires viennent du Niger.

Orano est une des plus grandes entreprises d’enrichissement d’uranium dans le monde, avec 4,8 milliards de chiffre d’affaires en 2023. Héritière d’Areva, démantelé après plusieurs scandales, le groupe est le lointain descendant du programme nucléaire militaire lancé par la France dans les années 1950, et qui a surtout consisté à piller les ressources des colonies comme le Gabon ou le Niger. Après leur indépendance, des accords leur ont été imposés, prévoyant par exemple de réserver l’uranium nigérien à la France. Pendant des dizaines d’années, cette richesse du sous-sol n’a rien rapporté à la population de ce pays parmi les plus pauvres du monde. C’est dire si l’histoire du groupe est intimement liée à celle de l’impérialisme français en Afrique.

Toute l’histoire du Niger est une alternance de rares tentatives d’imposer à Areva des conditions plus favorables et de longues périodes de soumission des régimes en place aux volontés du trust. La présence de l’armée française et les capacités de corruption des gouvernements français ont été déterminantes en la matière.

L’exploitation du site d’Imouraren était censée commencer en 2015. Mais, après la chute du prix de l’uranium consécutive à la catastrophe nucléaire de Fukushima au Japon en 2011, Orano a gelé les opérations. C’était autant de ressources fiscales en moins pour l’État nigérien. Le régime de Mahamadou Issoufou, président de 2011 à 2021 et par ailleurs ancien haut cadre d’Areva, s’était montré étrangement complaisant envers le trust français. En juillet 2023, la junte militaire a renversé le gouvernement corrompu de son successeur Mohamed Bazoum, elle a renvoyé l’ambassadeur de France et, avec le soutien de la population, forcé les troupes françaises à quitter le pays. Aujourd’hui, elle s’en prend donc à Orano en lui retirant son permis d’exploitation, et affirme vouloir reprendre en main les ressources minières.

Areva puis Orano ont fait depuis quarante ans de juteux profits en exploitant le sous-sol nigérien, obtenant toutes sortes d’exonérations de taxes et d’impôts des anciens dirigeants inféodés à la France. La population nigérienne ne versera pas une larme sur le départ d’Orano, même si la situation risque de ne pas beaucoup changer pour elle. Les militaires remplaceront sans doute les dirigeants corrompus à la mangeoire, et détourneront comme les autres les richesses du pays. Et même s’ils cherchaient un autre exploitant à de meilleures conditions, ils seraient soumis aux lois du marché, ce marché capitaliste qui étrangle les pays pauvres. Secouer les liens de l’impérialisme nécessite de s’attaquer au capitalisme lui-même.

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