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Leur société
Mayotte : les moyens pour le militaire, pas pour l’humanitaire
Trois mois après le cyclone Chido, la vie quotidienne des habitants de Mayotte est toujours extrêmement difficile. Les pénuries alimentaires ne font que s’aggraver.
Il faut courir de magasin en magasin pour tenter d’avoir un pack d’eau. La destruction des cultures par Chido a fait disparaître les œufs et les légumes des rayons. Il y a régulièrement des bousculades pour tenter d’avoir quelques marchandises. Et encore, elles sont pour ceux qui arrivent ensuite à régler la note à la caisse, car les prix flambent. Un supermarché affiche ainsi un kilo de patate douce, aliment de base, à 10,90 euros !
Cette situation est en partie due au refus d’importer des marchandises des pays voisins : Madagascar, la Tanzanie et les autres îles des Comores. L’économie de comptoir qui a fait la fortune de la bourgeoisie française dans toutes ses colonies est toujours d’actualité. Alors, les poussins des exploitations avicoles par exemple arrivent par avion depuis l’Hexagone ! Les légumes eux aussi parcourent plusieurs milliers de kilomètres, assurant au passage les profits des transporteurs comme CMA-CGM. Et, une fois arrivées au port, les marchandises sont cette fois bloquées pour assurer les profits de la propriétaire des installations, une patronne réputée pour sa rapacité. Avant Chido, elle pratiquait déjà des tarifs très élevés, responsables pour partie de la vie chère sur l’île. Le cyclone est pour elle une nouvelle occasion de faire du profit.
Plusieurs associations, qui ont envoyé des conteneurs de dons depuis l’Hexagone, dénoncent ainsi ne pas pouvoir régler les frais demandés par les différents prestataires de la chaîne logistique et au bout de laquelle trône cette patronne. Faute de payer 3 900 euros par conteneur à cette véritable racketteuse, des dizaines de tonnes de nourriture, d’eau, de produits d’hygiène ou encore de vêtements sont bloqués, certains depuis deux mois, alors que la population manque de tout. Et quand ces associations demandent que l’État intervienne et réquisitionne les conteneurs pour qu’ils puissent être déchargés, le préfet s’y refuse catégoriquement. Plutôt que de prendre sur les marges patronales, il préfère aggraver les conditions de travail des ouvriers du port et de la logistique en permettant des horaires élargis et le travail le dimanche.
Pendant ce temps-là, le ministre des Outre-Mer, Manuel Valls, a promis la construction d’une deuxième base navale militaire à Mayotte, pour mieux assurer la présence de l’impérialisme français dans cette région stratégique du canal du Mozambique. Le message est clair : les habitants peuvent mourir de faim, l’État, lui, se préoccupe d’installer des canons.