Gouvernement : l’art d’accommoder les restes25/12/20242024Journal/medias/journalarticle/images/2024/12/P4-1_Gouvernement_stable_OK_Lupo.jpg.420x236_q85_box-0%2C1%2C800%2C451_crop_detail.jpg

Leur société

Gouvernement : l’art d’accommoder les restes

Pour former un gouvernement, François Bayrou a été confronté au même problème que Barnier avant lui : trouver une majorité de députés qui acceptent, d’avance, de ne pas le censurer, quelle que soit sa politique.

Illustration - l’art d’accommoder les restes

Or chacun sait, y compris les députés, que Bayrou, comme tous les Premiers ministres avant lui, gouvernera contre les besoins élémentaires de la population. Il laissera le grand patronat accumuler des fortunes d’une main et licencier de l’autre. Il réduira les budgets utiles, y compris dans l’éducation et la santé, car l’État doit à la fois servir le grand capital et rembourser sa dette. Il restera les bras ballants devant les malheurs quotidiens qui frappent la population car les caisses sont vides ou, plus exactement, vidées pour autre chose. Les cours de la Bourse et le nombre de sans-abri doivent pouvoir poursuivre sous Bayrou leurs progressions parallèles. De plus, et c’est bien cela qui préoccupe les ambitieux et les carriéristes, ce gouvernement risque de ne pas durer plus que les autres, l’espace d’un matin ou d’une motion de censure. Il est difficile d’embarquer sur le Titanic quand on connaît la fin de l’histoire…

Le RN attend son heure, c’est-à-dire celle de Marine Le Pen et Jordan Bardella. C’est pourquoi il soutiendra Bayrou comme il a soutenu Barnier, en faisant montre de ce qu’il faut de respectabilité en direction des classes dominantes et en y ajoutant une cuiller de contestation à l’attention de l’électorat populaire. Tout cela sans jamais menacer les intérêts des puissants.

Bayrou n’est pas prêt à lâcher quoi que ce soit pour attirer des députés de gauche ou écologistes, car même un hochet serait encore trop cher pour qui veut étrangler les travailleurs. En ce sens, le Premier ministre a accepté de discuter de la réforme des retraites sauce Macron-Borne… en refusant de l’abroger et même de la modifier. Il ne reste donc à Bayrou que le bloc central, macronistes de tout poil et droite de divers pelages, c’est-à-dire exactement ce dont disposait Barnier.

Le choix des ministres ressort donc de l’art de la composition florale entre les différentes vanités. Il y a ceux qui restent car ils pensent avoir trouvé un rôle et un marchepied, comme Retailleau et Dati. Il y a aussi ceux qui changent d’attribution pour peaufiner leur CV, comme Darmanin. Il y a les jeunes aux dents longues dont personne n’a encore retenu les noms et les chevaux de retour comme Borne et Valls que tout le monde n’a que trop vus. Il fallait, d’après Bayrou, un gouvernement de poids lourds, de personnalités qui donnent confiance. Mais à qui ? Au patronat, sans doute, car il sait d’avance à quoi s’en tenir. À la population, certainement pas, car le choix s’est porté sur des responsables politiques vomis par les travailleurs. Ils n’ont souvent été réélus que par la magie du désistement des candidats de gauche en faveur des politiciens de droite, au nom du fameux front républicain.

Il est vrai que cette incapacité à stabiliser un gouvernement pose problème à une série de petits et moyens patrons dont l’activité dépend de décisions politiques, dans le bâtiment, les travaux publics, l’agriculture notamment. Dans le reste de la population, ces gesticulations ne suscitent que dégoût et ironie. Quant à la grande bourgeoisie, elle obtiendra quoi qu’il arrive les mesures qui l’intéressent.

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