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Leur société
Fonctionnaires : face aux attaques, une seule classe ouvrière
Mercredi 10 avril, Stanislas Guerini, ministre des différentes fonctions publiques, a lancé une véritable déclaration de guerre à tous les salariés de ces secteurs.
Selon Guerini, il faudrait en finir avec le prétendu tabou du licenciement, en finir avec les augmentations générales, introduire des réorganisations dans différents domaines, remettre en cause de nombreux droits...
Il y a officiellement 5,7 millions de travailleurs dans l’administration, l’enseignement, les hôpitaux, La Poste, les collectivités locales, etc. Ils sont en réalité bien plus, si l’on compte les contrats temporaires, les intérimaires, les sous- traitants. En fait, 3,7 millions de ces salariés seulement sont fonctionnaires de l’État, de la fonction publique hospitalière, de la fonction publique territoriale, mais l’offensive gouvernementale concerne l’ensemble des travailleurs de ces secteurs.
Les organisations, les grilles hiérarchiques, les organismes dits paritaires sont un leurre, car ils sont sous la seule autorité des administrations, donnant l’illusion d’une concertation mais visant à embrouiller la conscience des travailleurs. Le statut dit protecteur de la fonction publique est autant une illusion qu’un piège. Car, quand l’État a voulu se débarrasser en masse de fonctionnaires, il ne s’est jamais embarrassé de ce fameux statut protecteur. Il faut se rappeler le sort des salariés titulaires de ce statut chez France Télécom, devenu Orange. Une attaque a été déclenchée en 2006 pour liquider des dizaines de milliers d’emplois, et elle a été si brutale qu’elle a débouché sur une épidémie de suicides. Et aujourd’hui les travailleurs de La Poste, fussent-ils fonctionnaires, pourraient témoigner de leurs angoisses et de ce qu’ils doivent subir.
Ces divisions entretenues entre travailleurs aboutissent à des différences de rémunération inacceptables. Selon un document officiel, en 2022 les salaires dans la fonction publique hospitalière auraient augmenté de 2,9 %, quand ceux des travailleurs considérés comme contractuels, soit près du quart des effectifs, auraient baissé d’environ 1 %. Cette division entre travailleurs est non seulement totalement injuste, mais elle est un piège dans lequel, malheureusement, les directions syndicales les enferment.
Car, si la CGT et Force ouvrière appellent à la mobilisation contre les projets de Guerini et du gouvernement, elles restent totalement silencieuses sur ces divisions. En mettant en avant comme point principal la défense du statut, elles rejettent de fait des centaines de milliers de travailleurs qui seraient indispensables au succès de futures luttes.
Le passé l’a prouvé, c’est seulement quand la classe ouvrière a brisé les divisions artificielles et s’est engagée d’elle-même dans la lutte, toutes catégories confondues et sans consignes, qu’elle a pu inverser le rapport de force. En 1953, partie d’un bureau de poste de Bordeaux, la grève s’est étendue à tous les services publics du pays en plein été, mettant tous les transports publics à l’arrêt. Cette grève victorieuse contre les décrets-lois Laniel a marqué un changement durable du rapport de force entre la classe ouvrière, le patronat et les gouvernements.
L’attaque annoncée contre les travailleurs de la fonction publique est un signal du gouvernement : il va récupérer des milliards aux dépens de ses travailleurs et encourage ainsi le patronat à faire de même avec ses propres salariés. Il s’agit bien d’une attaque contre l’ensemble du monde du travail.
Les particularismes, le corporatisme, les fausses concertations et les fausses protections par des statuts divers sont autant de pièges visant à limiter et à émietter les réactions de la classe ouvrière. Forte de plus de 27 millions de salariés, c’est son unité dans la lutte qui peut mettre à la raison le patronat et ses serviteurs à la tête de l’État.