États-Unis : le bateau ivre du capital03/04/20242024Journal/medias/journalarticle/images/2024/04/Baltimore.jpeg.1200x675_q85_box-014275168_crop_detail.jpg.420x236_q85_box-1%2C0%2C275%2C154_crop_detail.jpg

Dans le monde

États-Unis : le bateau ivre du capital

Bien que les opérations de découpage du pont Francis Scott Key aient commencé, le port de Baltimore, sur la côte Est des États-Unis, restera encore longtemps en travaux après la collision du 27 mars.

Illustration - le bateau ivre du capital

Cette nuit-là, les moteurs du porte-conteneurs Dali lui ont fait défaut. Le navire, privé de gouvernail, a heurté de plein fouet une pile de la section centrale de ce pont autoroutier long de 2,5 kilomètres. La structure métallique s’est effondrée sur l’avant du navire échoué. Six ouvriers, des immigrés d’Amérique latine qui travaillaient à la rénovation de la chaussée, sont tombés dans la rivière Patapsco et sont décédés.

Cet accident a certainement été provoqué par un ensemble de causes. Mais toutes reviennent au fonctionnement absurde d’une économie basée sur la concurrence entre grandes entreprises et leur recherche du profit maximum.

Le Dali avait déjà connu des pannes, comme bien d’autres navires. Mais aucune compagnie maritime n’a pris le temps et les ressources financières de lui faire passer une révision complète, ni le géant Maersk pour le compte duquel le Dali retournait en Asie lorsqu’il a tenté de quitter le port de Baltimore, ni son propriétaire, la compagnie Grace Ocean Private qui l’a fait immatriculer à Singapour, ni le Synergy Marine Group qui l’affrétait, parmi plus de 600 autres navires…

Ces capitalistes ne se sentent tenus à aucune responsabilité envers les populations des ports. À ce jour les autorités de Baltimore ne connaissent pas précisément, ou n’ont pas rendu public, le contenu des 56 conteneurs – sur les 4 700 transportés par le Dali – tombés dans le port. La population sait uniquement que certains contiennent des matières dangereuses. Mais lesquelles ?

La taille des navires commerciaux ne cesse d’augmenter. Le gabarit du canal de Panama – par lequel le Dali est passé il y a quelques semaines – a été augmenté en 2016. Mais les piles du pont de Baltimore, achevé en 1977, n’ont pas été conçues pour résister à la masse que représentent les navires actuels. Une de ses piles avait été heurtée par un navire en 1980, sans dégâts catastrophiques. Mais depuis les autorités du port n’ont rien entrepris pour parer au danger. Elles sont en compétition avec d’autres ports et investissent le minimum, pour offrir aux richissimes compagnies maritimes des prix attractifs. Pour la même raison, pour rentrer ou sortir du port de Baltimore, les remorqueurs sont optionnels, et les autorités fédérales n’imposent rien en la matière. Les 15 000 dollars qu’aurait coûté l’utilisation d’un remorqueur aux affréteurs du Dali n’auraient pourtant rien été au regard de ce que cette catastrophe va coûter à la collectivité.

Outre les six ouvriers décédés, les conséquences de l’obstruction du principal chenal d’accès au port de Baltimore vont vraisemblablement peser avant tout sur les travailleurs de la zone. Moins d’une semaine après l’effondrement du pont, des bureaux d’inscription au chômage avaient déjà été mis en place pour une partie des 15 000 salariés dont l’activité est arrêtée…

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