Chine : les retraites des travailleurs attaquées18/09/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/09/une_2929-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

Dans le monde

Chine : les retraites des travailleurs attaquées

Le 13 septembre, le gouvernement chinois a annoncé qu’il comptait reculer l’âge de départ à la retraite des travailleurs.

Ainsi, à partir du 1er janvier 2025, si les travailleurs chinois ne s’y opposent pas, l’âge de départ à la retraite devrait progressivement passer de 60 à 63 ans pour les hommes, de 55 à 58 ans pour les femmes cadres et de 50 à 55 ans pour les ouvrières et les employées. La loi prévoit également d’étendre la durée minimale d’activité professionnelle donnant droit à une retraite de 15 à 20 ans. Ces mesures visent à augmenter le nombre de travailleurs disponibles, afin de faire pression sur les salaires. C’est une réelle régression sociale pour des centaines de millions de travailleurs.

Pendant longtemps, les dirigeants chinois n’ont pas osé toucher à cet âge de départ à la retraite, acquis aux lendemains de la révolution nationaliste de 1949. Quand ils ont privatisé de larges pans de l’économie dans les années 1990 et 2000, ils se sont surtout appliqués à démolir le régime du « bol de riz en fer » qui, dans les entreprises publiques et dans l’État, assurait en tout cas aux travailleurs un logement et un minimum de pension et de prestations sociales.

Depuis la fin des années 1990, les salariés et les employeurs sont tenus de cotiser au système de retraite. Mais depuis une dizaine d’années, le taux des cotisations patronales ne cesse de baisser. De plus, nombre d’entreprises ne payent pas aux caisses ce qu’elles leur doivent. Si ces caisses se sont vidées, on comprend qui en a profité.

La qualité des retraites ne dépend pas que de l’âge de départ. En Chine, elles ne sont pas les mêmes selon qu’on est employé en milieu urbain ou rural. Mais dans tous les cas, les pensions sont insuffisantes, les retraités doivent travailler ou compter sur la famille pour survivre. Ainsi, dans les grandes villes, les pensions ne couvrent en moyenne que 75 % du revenu des retraités. Dans les milieux « ruraux et urbains », les villes plus petites, cette couverture tombe à 50 % et elle tombe à 10 % à la campagne.

Et puis des centaines de millions de travailleurs n’arrivent pas à faire valoir leurs droits à la retraite. Ainsi, 80 % des travailleurs migrants, ceux qui ont quitté leur zone de résidence pour venir travailler dans les centres urbains, et qui étaient 285 millions fin 2020, ne sont pas couverts par le régime de retraite urbain où ils travaillent. Ils peuvent travailler plus de 15 ans sans que les entreprises aient payé les cotisations qui leur sont dues, et dans ce cas leurs années de travail ne seront pas comptabilisées.

Les 200 millions de travailleurs dits flexibles ont aussi des difficultés à obtenir une pension de vieillesse. Comme nombre de migrants, ils n’ont souvent pas de contrat de travail ou ont changé plusieurs fois de juridiction et ne peuvent pas satisfaire à l’exigence de 15 ans de travail dans un district donné.

Les raisons invoquées par le gouvernement chinois pour revoir le régime des retraites ressemblent à s’y méprendre à celles que les gouvernements occidentaux mettent en avant pour mener les mêmes attaques. Il parle du vieillissement de la population, des caisses vides, mais jamais des fortunes accumulées par la nouvelle bourgeoisie chinoise et les cadres dirigeants du parti. S’il a tant attendu avant d’annoncer ce recul de l’âge des retraites, c’est par crainte des réactions sociales. Ainsi, en février 2023, des dizaines de milliers de retraités ont manifesté contre l’amputation des remboursements de leurs dépenses de santé. Et les travailleurs chinois voient bien qu’on va les obliger à travailler plus longtemps alors que de plus en plus de jeunes ne trouvent pas de travail.

En Chine, le capitalisme est des plus sauvages, mais face à lui les centaines de millions de travailleurs pourraient reprendre conscience qu’ils sont une véritable force.

Partager