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Dans le monde
Mayotte : flambée xénophobe sur fond de crise sociale
Depuis plus de deux semaines, la situation se tend à Mayotte. Des barrages pour bloquer l’unique route de l’île principale se multiplient à l’appel de militants se disant « collectifs de citoyens », dont les cibles sont les étrangers.
La vie est de plus en plus difficile pour l’immense majorité de la population, confrontée à de nombreux problèmes. La pénurie d’eau a duré plus de quatre mois, la violence des gangs s’intensifie et la pauvreté touche plus de 75 % des habitants. Depuis des mois, les membres des collectifs rendent les immigrés responsables de tout. Avant ils accusaient les Comoriens, et désormais leurs nouveaux boucs émissaires sont les réfugiés africains, qui fuient la guerre et la misère de la région des Grands Lacs ou la Somalie.
Ces groupes occupaient depuis début décembre le hall de la préfecture, pour empêcher les immigrés de faire les démarches pour l’obtention d’un titre de séjour ou son renouvellement. Mais depuis le 21 janvier, leur colère s’est concentrée contre le campement du stade de Cavani, à Mamoudzou, où 500 personnes survivent dans un bidonville, faute d’autre refuge.
Les membres des collectifs, renommés Forces vives, ont érigé des barrages pour bloquer la circulation. Tous les travailleurs sont touchés : il leur est souvent impossible de se rendre à leur emploi ou d’en revenir. Le directeur de l’hôpital affirme que certains jours il manque près de la moitié des salariés. Dans les supermarchés, les rayons commencent à se vider car les camions ne livrent plus. Mais, pour certains travailleurs, s’ajoute la terreur d’être pris à partie en tant qu’immigré. Des taxis collectifs et même une ambulance ont été fouillés dans des barrages pour en faire sortir les non-Mahorais ! La peur se répand et le mot circule d’éviter de parler sa langue maternelle africaine, pour ne pas se faire repérer. Certains vivent terrés chez eux depuis des jours. Des propriétaires ont menacé leurs locataires immigrés : ils doivent dégager au plus vite.
À la suite d’un rassemblement des collectifs dimanche 4 février, le ton est encore monté. Ils ont annoncé qu’ils ne laisseraient même plus passer les ambulances ou autres véhicules d’urgence. Le rectorat a alors décidé de fermer les écoles, collèges et lycées jusqu’à nouvel ordre. Une manifestation pour accentuer cette pression sécuritaire et xénophobe était prévue le mardi 6 février à Mamoudzou.
Cette guerre entre pauvres rend bien service à l’État français, qui depuis des années laisse la population de Mayotte à l’abandon. Profitant aujourd’hui de la situation créée par ces collectifs, Darmanin veut restreindre encore plus le droit du sol dans le territoire, s’alignant encore un peu plus sur l’extrême droite. En s’attaquant aux immigrés et à leurs enfants, il espère en outre alimenter la division entre les travailleurs de l’île.
Tout cela ne résoudra en rien les problèmes auxquels est confrontée la population, au contraire. En plongeant toujours plus de femmes et d’hommes dans l’insécurité et la misère, cela prépare le terreau pour l’émergence de nouveaux gangs et toujours plus de violence.
L’État français y ajoute son lot de politique de division et de répression.